Vous touchez des intérêts ou autres gains tirés de votre épargne ? Vous devez les déclarer au fisc. Sauf les intérêts des placements défiscalisés comme le Livret A bien évidemment. Reste un choix crucial pour la déclaration de revenus : cocher, ou ne pas cocher, la case 2OP.

Question de Polichinelle, le 15 avril 2023

« Quand on est dans la tranche apparente à 11%, vaut-il mieux prendre l'option du barème, ou la “flat tax” pour les intérêts des PEL, comptes à terme... ?

On peut se résoudre à utiliser le simulateur en cochant puis en décochant la case 2OP, et opter pour la meilleure solution. Mais pour ceux qui aiment comprendre, c'est assez difficile. »

Un taux unique à 12,8% VS un barème progressif

Dilemme. La réforme Macron de la fiscalité de l'épargne, en 2018, a simplifié l'impôt pesant sur les gains de vos placements en créant un taux unique, plus exactement 30% de prélèvement fiscal unique, ou PFU : 17,2% de cotisations sociales + 12,8% d'impôt sur le revenu.

Une logique totalement différente du barème progressif, qui « saucissonne » vos revenus d'activité.

Barème officiel - impôt 2023 sur les revenus 2022
Tranche de revenu par part fiscaleTaux applicable pour la tranche
Jusqu'à 10 777 €0%
De 10 778 € à 27 478 €11%
De 27 479 € à 78 570 €30%
De 78 571 € à 168 994 €41%
Plus de 168 995 €45%

Avec le barème, pour 100 000 euros de revenu brut global, 10 777 euros sont imposés à 0%, les 16 701 euros suivants (jusqu'au seuil de 27 478 euros) à 11%, puis 30% jusqu'à 78 570 euros et « ce qui dépasse » jusqu'à 100 000 euros à 41%.

Par application, le taux moyen de l'impôt est de 23,4%. Et le taux marginal d'imposition est de 41% : cela signifie que si vous ajoutez 100 euros de gains de l'épargne à vos revenus du travail, ils engendreront mathématiquement 41 euros d'impôt supplémentaires.

Un doute pour la tranche à 11%...

Tant que vous figurez dans les tranches supérieures du barème, quasi aucun doute (1) : le prélèvement forfaitaire unique à 12,8% sera plus intéressant que le barème progressif.

Et si vous n'êtes pas imposable, aucune hésitation : le barème progressif synonyme d'impôt à 0% sera plus avantageux que les 12,8% de flat tax ! Et c'est à vous de réclamer cette option, en cochant la case 2OP de la déclaration de revenus. Faute de quoi vous risquez de payez 12,8% sur les revenus de votre épargne alors que vous n'avez théoriquement rien à payer.

2OP, la case magique qui allège vos impôts

Reste donc les 20 millions de foyers émargeant dans la tranche à 11% du barème progressif... C'est mathématique ? 11%, c'est moins que 12,8%, donc plus avantageux ? Eh non ! De façon totalement contre-intuitive, le taux marginal d'imposition « réel » de ces ménages n'est pas de 11%. Comment est-ce possible ?

Tranche à 11% ? La décote change la donne

L'Institut des politiques publiques (IPP) pointait dès la fin 2019 cette bizarrerie du barème de l'impôt revu et corrigé pour l'impôt 2020 : l'entrée dans l'impôt se fait à 16% et non 11%. MoneyVox a consacré un article à cet étrange phénomène mathématique...

Nouveau barème de l'impôt sur le revenu : y a-t-il des effets pervers ?

Attention, cette tranche est, de fait, bel et bien une tranche à 11%. C'est le taux du barème. Mais s'y ajoute une subtilité d'importance pour les foyers faiblement imposables : la décote, un mécanisme venant réduire l'impôt appliqué aux « classes moyennes ».

Si vous faites partie des 20 millions de foyers situés dans cette tranche à 11%, la décote vous offre d'office un rabais fiscal. Un rabais quasi invisible, puisqu'intégré au calcul final et qui n'apparaît que dans le détail final de votre déclaration. Or cette décote décroît au fur et à mesure que vos revenus augmentent.

Résultat : si vous ajoutez 100 euros à vos revenus et que vous figurez dans cette tranche, votre impôt ne progressera pas que de 11 euros. Mais plus ! Voici trois exemples pour bien comprendre.

Exemple 1 : si vous ajoutez 1 000 euros de revenu net imposable

Marc, célibataire, salaire de 22 222 euros, donc 20 000 euros de revenu net imposable soumis au barème après abattement pour frais professionnels de 10%. Tranche à 11% du barème. Impôt : 641 euros (et 374 euros de décote), selon le simulateur officiel de la DGFiP.

Ajoutons 1 000 euros au revenu net imposable : 23 333 euros de salaire, donc 21 000 euros après abattement forfaitaire. Impôt : 801 euros, et une décote plus faible (324 euros). Soit 160 euros d'impôt en plus, pour 1 000 euros supplémentaires de revenu net imposable. Et non 110 euros... Le taux marginal « réel » est donc de 16%.

Exemple 2 : deux options pour 1 000 euros d'intérêts

Célibataire, salaire de 20 000 euros. Ajoutez 1 000 euros d'intérêts de l'épargne, à déclarer case 2TR et 2BH. La flat tax a été payée à la source (128 euros préremplis en 2CK) et vous choisissez de maintenir l'option flat tax en laissant la case 2OP vide.

Résultat : 322 euros d'impôt + 128 euros déjà prélevés à la source par votre banque, sur vos intérêts annuels début janvier.

Les mêmes montants, les mêmes cases, mais cette fois en cochant la 2OP afin de choisir le barème progressif. Résultat : 342 euros d'impôt, soit 20 euros de plus qu'avec la flat tax... et ce même si vous figurez dans la tranche à 11% (alors que la flat tax est un taux fixe à 12,8%). C'est bien la décote qui change la donne : 473 euros de rabais sur votre impôt si vous optez pour la flat tax, et 427 seulement avec l'option au barème.

Pour 100 € d'intérêts sur un livret d'épargne fiscalisé
Taux marginal d'imposition

Option au barème progressif
Case 2OP cochée

Option par défaut : PFU à 12,8%
Case 2OP non cochée

0%0 € d'impôt13 € d'impôt
11%16 € d'impôt13 € d'impôt
30%30 € d'impôt13 € d'impôt
41%41 € d'impôt13 € d'impôt
45%45 € d'impôt13 € d'impôt

Simulations théoriques, sans compter la CSG déductible - quasi systématique, sauf exceptions - pour l'option au barème.
Avec CSG déductible, pour l'option au barème : 15€ d'impôt pour la tranche à 11%, 28€ d'impôt pour la tranche à 30%, etc.

Exemple 3 : quand vos intérêts vous font changer de tranche

Célibataire, salaire de 2 500 euros, net mensuel, soit 30 000 euros annuels et 27 000 euros de revenu net imposable. Sans aucun revenu de placements : 1 760 euros d'impôt (avec 25 euros de décote). Tranche à 11% du barème.

Option flat tax à 12,8%. 1 000 euros d'intérêts de l'épargne (déclarés en 2TR et 2BH, et dispense d'acompte à la source) : 1 888 euros d'impôt (avec 25 euros de décote), soit 128 euros de plus à cause des gains financiers.

Option barème progressif. 1 000 euros d'intérêts de l'épargne, les mêmes cases... et la 2OP pour l'option au barème. Résultat : 1 973 euros d'impôt, donc 85 euros de plus qu'avec la flat tax pour cause de décote ramenée à zéro et de basculement dans la tranche à 30%.

Pour conclure, Polichinelle : mis à part le cas particulier de gains financiers complexes (1), le match est simple pour la fameuse case 2OP. Si vous êtes imposable, quelle que soit la tranche, mieux vaut ne pas cocher la case pour choisir la flat tax. Si vous n'êtes pas imposable : mieux vaut cocher pour choisir l'option au barème.

PEL, livret bancaire, compte à terme... comment déclarer vos intérêts 2022 aux impôts en 2023

Comment comparer sur votre déclaration ?

Option 1 : faites le même exercice via le simulateur officiel des impôts, en prenant soin de remplir toutes les cases concernées... ce qui peut être fastidieux.

Option 2, comme vous le suggérez vous-même, Polichinelle : valider tout d'abord votre déclaration sans cocher la case 2OP... puis corriger et valider la même déclaration en la cochant. Puis comparer le résultat. Tant que la date limite n'est pas passée, vous pouvez en effet modifier votre déclaration à volonté. Un test utile notamment si le calcul est complexe, par exemple si vous touchez des dividendes pour lesquels vous pouvez profiter d'un abattement.

Rappel d'importance : l'option au barème ou l'option flat tax s'applique à l'ensemble de vos revenus de placement. Impossible de choisir le barème pour vos dividendes et la flat tax pour vos intérêts de livrets. D'où l'intérêt du test si votre situation est complexe.

Impôts 2023 : quel est le revenu minimum pour être imposable ?

(1) Sauf pour des revenus du capital multiples, dont des dividendes. Ce qui nécessite comparaison.