Cette fois, même les chiffres de la Banque de France le montrent : le flux de crédits immobiliers accordés chaque mois par les banques aux particuliers fond à vitesse grand V. « Seulement » 14,4 milliards d'euros ont été prêtés à des propriétaires ou futurs propriétaires en janvier 2023, contre 26,7 milliards d'euros en mai dernier.

Pendant toute l'année 2022, sur le front du crédit immobilier, la bataille des chiffres a fait rage. Entre ceux qui voulaient prouver la rapidité de l'envolée des taux et un flux de nouveaux crédits grippé, et ceux qui voulaient minimiser cette analyse. La Banque de France fait partie de cette deuxième catégorie, modérant tout blocage du prêt à l'habitat.

La Banque de France a d'ailleurs musclé ses points statistiques mensuels sur le crédit, et publie désormais des « estimations avancées » afin de suivre le rythme de l'actualité. Ce vendredi 3 février, elle a donc publié des estimations sur le mois de janvier 2023.

Des sommes divisées par deux

Résultat : 14,4 milliards d'euros de nouveaux crédits à l'habitat en janvier 2023 (renégociation comprise), contre 15 milliards en décembre, 18,2 milliards en novembre, 21 milliards en août... et 26,7 milliards d'euros en mai dernier ou 23,7 milliards en janvier 2022, voici très exactement un an. La Banque de France ne livre pas le nombre d'emprunteurs, chaque mois, mais les sommes prêtées chaque mois pour le crédit immobilier ont quasiment été divisées par deux de mai 2022 à janvier 2023. Ou ont baissé d'un tiers de janvier 2022 à janvier 2023.

Analyse de la Banque de France : « Un premier semestre 2022 exceptionnellement dynamique bénéficiant de taux encore très bas, avec une production mensuelle moyenne de 19,7 milliards d'euros (contre 18,4 milliards d'euros en moyenne pour l'année 2021) suivi d'un second semestre de normalisation durant lequel la production mensuelle moyenne est redescendue à 16,7 milliards d'euros. »

Crédit immobilier : la pire chute depuis la crise financière de 2008

Si la production de prêts s'écroule maintenant du côté de la Banque de France, c'est notamment à cause d'un décalage dans les chiffres mis en avant par les courtiers, qui mesurent la demande au début de la procédure, par l'Observatoire Crédit Logement-CSA, qui mesure « la production de crédits immobiliers au moment de l'octroi de la garantie par Crédit Logement », et par la Banque de France, qui constate le prêt en fin de procédure. « Le temps de L'Observatoire précède ainsi de 2 à 3 mois celui de la signature auquel se place, par exemple, la mesure de la production mensuelle publiée par la Banque de France », explique ainsi Crédit Logement, afin de rejeter toute divergeance d'analyse avec la Banque de France.

La fin des années record

Par ailleurs, concernant la production mensuelle de 14,4 miliards d'euros en janvier, il faut souligner que, si la chute est vertigineuse, cela s'explique aussi par le fait que le flux mensuel de crédits immobiliers est monté très haut depuis 4 ans. Ainsi, la production de janvier 2023 reste par exemple comparable aux « trous » de août 2017 ou décembre 2015, pour se tenir aux mois les plus faibles dans un passé récent. Mais la faiblesse de la production de ce mois de janvier en annonce probablement d'autres en ce début 2023, alors que les trous évoqués étaient restés ponctuels.

Autre illustration logique de la crise que traverse le prêt immobilier : la part de renégociations ou rachats de crédit immobilier, chaque mois, chute à 12,5% en décembre, alors qu'elle était encore au-dessus de 22% en février 2022.

Enfin la Banque de France livre désormais une moyenne mensuelle des taux immobiliers sur le mois écoulé : 2,20% (hors frais et assurances) en janvier 2023, donc pour les dossiers de crédit ficelés et négociés quelques mois plus tôt. Très symboliquement, ce taux moyen toutes durées confondues est très exactement le double (1,10%) de la moyenne constatée en décembre 2021, record de taux bas, et quasi le double du 1,12% de janvier 2022. Un an plus tôt. Une éternité à l'échelle du crédit immobilier.

Prêt immobilier : ce qui va changer avec le nouveau mode de calcul du taux d'usure