Alors que les taux immobiliers atteignent aujourd'hui 2,5% en moyenne sur 20 ans, la source du crédit continue de se tarir, mois après mois. L'année 2023 se placera t-elle sous de meilleurs auspices ?

Les emprunteurs pourront-ils souscrire un crédit immobilier en 2023 ? Si la question est volontairement provocante, force est de constater que la situation est de plus en plus complexe pour les candidats à l'emprunt.

Ainsi, en décembre, les banques ont été peu nombreuses à mettre à jour leurs barèmes mais celles qui l'ont fait ont encore augmenté leurs taux. Sur le dernier mois de l'année 2022, le courtier Vousfinancer fait ainsi état d'un taux moyen de 2,2% sur 20 ans, quand Meilleurtaux monte même à 2,5% sur la même durée. Soit une hausse de plus d'un point en moins d'un an, puisqu'il était possible d'emprunter à moins de 1% en début d'année.

« Certaines banques affichent même des taux à 3% sur 25 ans, pour l'instant inapplicables compte tenu du niveau des taux d'usure », note Vousfinancer. Pour rappel, ce taux maximum au-dessus duquel les banques n'ont pas le droit de prêter comprend les intérêts du crédit, l'assurance, et les éventuels frais bancaires. Fixé à 3,05% pour les prêts d'une durée de 20 ans et plus jusqu'au 1er janvier prochain, il bloque aujourd'hui de nombreux emprunteurs.

Pas question de lâcher le crédit immobilier

Et les choses ne devraient pas s'améliorer sur le premier trimestre 2023. « Pour les banques, les trois premiers mois de production sont presque déjà perdus, estime Maël Bernier, porte-parole de Meilleurtaux. Il y a un un délai de 3 mois environ, ce qui veut dire que les dossiers lancés aujourd'hui seront financés fin février ou début mars. Le premier trimestre de l'année est donc quasiment déjà gâché. »

Un décalage que remarque aussi Damien Pacouil, fondateur de Prelys courtage, qui estime cependant que cela se fait à l'avantage des emprunteurs : « La majorité des banques a déjà réalisé ses objectifs pour l'année 2022 et est déjà penchée sur l'année 2023. Ce qui veut dire que les banques proposent aujourd'hui des taux en fonction non pas du taux d'usure actuel (3,05% pour les crédits de 20 ans et plus) mais bien sur le prochain taux d'usure applicable à partir du mois de janvier. » Ainsi, les futurs emprunteurs peuvent accepter une proposition en décembre, pour un prêt qui sera de toute façon débloqué au mois de janvier, le temps de bancariser le client et de finaliser le projet. « Aujourd'hui, on est sur des taux nominaux entre 2,40% et 2,80% en fonction des banques et de la durée », détaille le fondateur de Prelys courtage.

Et demain ? « Certains établissements bancaires ont des objectifs importants sur l'année 2023, donc il n'est pas du tout question de lâcher le crédit immobilier, rappelle Damien Pacouil. Même si les banques perdent de l'argent sur certains prêts, le crédit immobilier reste un produit d'appel incontournable. En janvier, certaines banques vont donc chercher à aller capter des clients. »

Des taux à 3% au 1er semestre 2023 ?

D'autres risquent cependant d'augmenter une nouvelle fois leurs barèmes. « Au 1er trimestre de 2023, les taux seront autour des 3%, c'est une certitude », assure Damien Pacouil. Un scénario de hausse également privilégié par l'Observatoire Crédit Logement CSA, qui met cependant la barre légèrement moins haut, estimant qu'avec « l'accélération de l'inflation et la montée des incertitudes », le taux moyen pour un crédit immobilier pourrait atteindre 2,80% en juin 2023 « pour redescendre lentement à 2,45% fin 2023, niveau auquel il se stabiliserait en 2024 ».

Et l'avenir pourrait être encore plus clément pour les emprunteurs, en cas de stabilisation de l'OAT 10 ans. Après avoir dépassé les 3% durant le mois de novembre, l'indice de référence des banques pour leurs coûts de financement des crédits, est repassé à 2,24% au 7 décembre. « Même si c'est très volatile et qu'une nouvelle annonce de hausse des taux de la BCE pourrait les faire repartir, on peut espérer une stabilisation de l'OAT 10 ans autour de 2,5%, explique Maël Bernier. Dans ce cas, les taux d'intérêts des banques pourraient eux se stabiliser vers 3% ou 3,20% d'ici février. Cela permettrait, au mois de juillet, d'avoir un taux d'usure en phase avec la réalité. » Les emprunteurs comme les banques auront donc les yeux rivés sur cette donnée, qui continue pour l'instant à fluctuer. Au 20 décembre, l'OAT 10 ans était ainsi remonté à 2,81%.

Le nouveau taux d'usure de janvier va-t-il déjà donner de l'air aux emprunteurs ? Pour rappel, la Banque de France se base normalement sur la moyenne des taux de crédit (en prenant le TAEG, le taux « tout compris » du crédit) des trois derniers mois et la majore d'un tiers pour fixer le taux d'usure du trimestre suivant. Mais selon Maël Bernier, le mode de calcul souffre en fait d'un double décalage : « Pour le taux d'usure de janvier, la Banque de France va se baser sur des dossiers débloqués entre octobre et décembre et donc négociés en banque sur des barèmes de juillet, août et septembre. » Un décalage qui renforce « l'effet ciseau » entre des taux de crédit qui remontent rapidement et un taux d'usure qui peine à répercuter cette augmentation.

« Dans le meilleur des cas, un taux d'usure à 3,50% »

Alors qu'il avait été rehaussé de 2,57% à 3,05% au 1er octobre, la prochaine hausse sera t-elle du même acabit ? « Pour moi, dans le meilleur des cas, on sera à 3,50% », anticipe Maël Bernier. Cependant, la Banque de France expliquait il y a quelques jours que « le taux a sensiblement augmenté en juillet, puis plus fortement en octobre et il le sera à nouveau plus fortement en janvier prochain, compte tenu d'un effet de base plus élevé. » Il est ainsi possible d'espérer un taux d'usure au-dessus des 3,55%, voire des 3,60%, pour le mois de janvier. De quoi donner un peu d'air aux emprunteurs.

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