Lors de la souscription d'un contrat d'assurance vie, vous devrez renseigner la clause bénéficiaire de votre contrat, c'est-à-dire désigner la ou les personnes qui recevront les fonds après votre décès. Comment la rédiger et quels sont les pièges à éviter ?

Quand vous souscrivez une assurance vie, votre assureur vous demandera de renseigner la clause bénéficiaire, qui permet de désigner la ou les personnes à qui vous souhaitez que votre argent soit versé en cas de décès.

Pour le moment, ce contrat vous sert probablement d'épargne à long terme et la question de la succession ne revêt pas à vos yeux un caractère primordial. Il est pourtant très important de s'y attarder. Voici trois pièges à éviter lorsque vous rédigez la clause bénéficiaire.

Se contenter de la clause standard

Souvent, la clause bénéficiaire est une clause par défaut : « Mon conjoint et mes enfants vivants ou représentés, à défaut mes héritiers ». Une clause standard qui fonctionne bien dans le cas d'une famille non recomposée et si vous êtes mariés ou pacsés. Si ce n'est pas le cas,et que votre décès survient brutalement, la personne qui aura partagé votre vie ne pourra rien percevoir. Ce seront les héritiers du défunt, en fonction de l'ordre de priorité, qui pourront en profiter.

Dans ce cas, si vous n'avez pas prévu de vous unir légalement, il serait préférable d'indiquer le nom et et la date de naissance de votre partenaire dans la clause bénéficiaire. Idem en cas de famille recomposée, et notamment si vous n'avez pas de lien de parenté avec un ou plusieurs enfants, mais que vous souhaitez les inclure dans la liste des bénéficiaires.

Ne pas mettre à jour son ou ses bénéficiaires

En cas de changement de votre situation familiale (décès, mariage, divorce, naissance, etc), il faut absolument revoir la clause renseignée et la mettre à jour. Si vous n'y pensez pas tout de suite, la lecture de votre relevé annuel peut vous y aider. C'est le moment idéal pour faire le point sur son contrat et vérifier que les bénéficiaires sont toujours ceux que vous souhaitiez initialement.

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Par ailleurs, si vous ne voulez pas attribuer la même part de votre épargne à tous vos bénéficiaires, il faudra également le préciser dans la clause. Votre assureur ne peut et ne présumera jamais de ce que vous aviez en tête lors de sa rédaction. Par défaut, les bénéficiaires percevront des parts égales.

Exemple. Vous avez trois enfants mais vous avez décidé de léguer 50% au premier et 25% pour chacun des deux derniers : il faudra le préciser. Le détenteur du contrat peut également changer ou ajouter un ou plusieurs bénéficiaires via un testament. Dans ce cas, il est conseillé de le préciser à son assureur.

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Les primes manifestement exagérées

C'est là que les choses se compliquent. Les héritiers peuvent dans certains cas contester la clause bénéficiaire d'une assurance vie. Lors de la souscription de votre contrat, vous avez la possibilité de désigner votre conjoint, vos héritiers ou n'importe qui d'autre. Votre assureur ne pourra pas vous en empêcher.

Après votre décès, les héritiers lésés peuvent toutefois invoquer la notion de « primes manifestement exagérées » et contester ainsi votre décision. Deux conditions doivent être réunies : les primes versées sont plus élevées que le reste de votre patrimoine et le contrat a été souscrit dans le but d'ôter tout droit à la succession.

Attention toutefois ! Il n'existe pas de règle. Le calcul est fait par le juge, au cas par cas. Plusieurs critères sont pris en compte, notamment l'âge de l'assuré au moment de la souscription. Si le souscripteur est âgé, on pourra se demander s'il avait voulu éluder la succession. Le juge pourra aussi s'attarder sur les versements, leur nombre et à quel moment ils ont été faits.

Le fisc aussi peut s'en mêler

Si les héritiers peuvent contester la clause bénéficiaire, ils ne sont pas les seuls. L'administration fiscale peut aussi mettre son grain de sel pour vérifier s'il y a ou non abus de droit. Pour être qualifié « d'abus de droit fiscal », deux conditions doivent être remplies : les sommes transférées au sein du contrat d'assurance vie sont plus élevées que le reste du patrimoine de l'assuré et la réalisation de ce transfert a eu lieu peu de temps avant le décès prévisible de l'assuré. Et ce n'est pas si simple à prouver.

Exemple de versement exagéré

Voici un arrêt rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation, le 30 janvier 2019, qui illustre ce qu'est un abus de droit. En l'espèce, Daniel Z. avait 79 ans quand il a décidé de verser au cours de l'année 2001 un montant total de 158 547 euros sur trois contrats d'assurance vie, soit une moyenne mensuelle de 13 212 euros.

Or son avis d'imposition de 2001 indiquait qu'il avait perçu 47 798 euros de pensions de retraite et 6 732 euros de salaire, soit une moyenne de 4 544 euros par mois. Les versements sur les contrats d'assurance vie étaient donc trois fois plus élevés que ses revenus. Par ailleurs, Daniel Z. ne disposait d'aucun patrimoine immobilier.

Les magistrats ont décidé qu'« eu égard à son âge et à ses situations familiale et patrimoniale, les primes versées sur les contrats d'assurance vie en 2001 sont manifestement exagérées ; qu'en conséquence, la valeur de ses trois contrats d'assurance vie sera rapportée à la succession de Daniel Z. pour être partagée conformément aux dispositions testamentaires ».

Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 30 janvier 2019, pourvoi n° 18-12045

La fiscalité de l'assurance vie en cas de décès

Si les juges établissent que ces deux conditions (montant trop élevé + clause modifiée juste avant le décès) sont avérées, le montant présent sur l'assurance vie sera réintégré à la succession. Ce qui veut dire que les frais inhérents à la succession s'appliqueront et que les avantages fiscaux spécifiques de l'assurance vie seront perdus.

L'assurance vie permet en effet de profiter d'une fiscalité réduite sur la transmission d'un patrimoine financier au moment du décès. Pour les primes versées sur le contrat avant les 70 ans du souscripteur, les sommes transmises  bénéficient d'un abattement fiscal allant jusqu'à 152  500 euros par bénéficiaire. Les primes versées après 70 ans et supérieures à 30 500 euros sont imposables aux droits de succession.

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