Depuis de nombreuses années, vous effectuez des versements réguliers sur votre assurance vie. Mais voilà, vous atteignez bientôt l'âge de 70 ans et on vous a peut-être déjà soufflé à l'oreille qu'il n'était plus intéressant de verser sur votre contrat à partir de là. 70 ans c'est bien l'âge charnière en assurance vie et la fiscalité change. Mais les avantages liés à la succession sont toujours intéressants. Explications.

Ce qui fait la particularité de l'assurance vie c'est que le montant du contrat n'entre pas dans la succession de l'assuré... Mais cela concerne exclusivement les primes versées avant 70 ans. « Deux univers différents se côtoient dans l'assurance vie pour la transmission, ce sont les versements faits avant et après 70 ans », explique Gilles Belloir, directeur de Placement-direct.fr.

À l'ouverture de votre contrat, vous n'avez peut-être pas évoqué avec votre conseiller le cas des versements après 70 ans. Quelqu'un vous a peut-être même dit un jour qu'il n'était pas intéressant de continuer à effectuer des versements passé 70 ans. Ce qui change en réalité, c'est la fiscalité dans le cadre de la succession.

La fiscalité des versements après 70 ans

Au décès du souscripteur, chaque bénéficiaire pourra profiter d'une exonération de 152 500 euros (capital et intérêts compris) sur les versements réalisés avant 70 ans. Le taux d'imposition sera de 20% sur les 700 000 euros suivants, de 31,25% au-delà.

Régime en vigueur (contrats souscrits depuis le 13 octobre 1998)
Versements effectuésImposition
avant
70 ans

Base taxable : ce sont les versements ainsi que les plus-values pour l'ensemble des contrats. L'imposition est faite selon la part de chaque bénéficiaire :

  • exonération sur les premiers 152 500 €,
  • application d'un taux forfaitaire de 20% sur les 700 000 € suivants (soit entre 152 500 € et 852 500 €),
  • application d'un taux forfaitaire de 31,25% au-delà (soit au-dessus de 852 500 €).
après
70 ans
  • Base taxable : ce sont uniquement les versements bruts qui sont retenus au-delà de 30 500 € (pour l'ensemble des contrats du défunt).
  • La part de chaque bénéficiaire est soumise aux droits de succession (avec des taux d'imposition et de possibles exonérations en fonction des liens de parenté).

En revanche, pour les versements effectués après 70 ans, les intérêts sont exonérés en totalité. La fiscalité des sommes transmises au moment du décès aux bénéficiaires du contrat s'applique seulement aux versements. Les plus-values n'entrent donc pas du tout en ligne de compte. En cas de moins-values, si vous avez donc perdu une partie de vos investissements, les sommes taxables seront réduites du montant des pertes subies.

Les bénéficiaires profiteront d'un exonération fiscale sur les 30 500 premiers euros de versements. Cet abattement fiscal est appliqué sur le capital total des contrats de l'assuré (détenus ou non chez le même assureur) et non, par bénéficiaire. Les sommes allant au-delà de 30 500 euros sont donc soumises au régime commun des droits de succession. Le taux d'imposition et l'abattement dépendent alors de la qualité du bénéficiaire.

Pour rappel, le conjoint survivant est totalement exonéré de droits de succession sur l'assurance vie, tout comme le partenaire de Pacs en présence d'un testament. Par ailleurs, les enfants et ascendants (parents, grands-parents) bénéficient d'un abattement de 100 000 euros.

Droits de succession : abattements et taux d'imposition
Lien de parentéAbattementBarème après abattement
Entre époux ou pacsésExonération
Enfant100 000 €Barème des droits en ligne directe
Frère ou sœur15 392 €35% jusqu'à 24 430 € de part taxable
45% au-delà
Neveu ou nièce7 967 €55%
Petit-enfant1 594 €Barème des droits en ligne directe
Autre héritier ou légataire
(dont parents au-delà du 4ème degré)
1 594 €60%

A savoir : en cas d'héritage « par représentation », les barèmes et abattements sont plus avantageux.

« Comme l'assiette taxable n'est pas la même, c'est toujours compliqué de savoir quelles sont les plus-values apportées par les versements avant et après 70 ans. Les règles de calcul appliquées par le fisc ou la compagnie d'assurance ne sont pas toujours très avantageuses si on mélange le tout », précise Gilles Belloir.

Le cas particulier des vieux contrats

Le régime fiscal lié aux primes versées après 70 ans ne concerne que les contrats d'assurance vie souscrits depuis le 20 novembre 1991. Pour les contrats souscrits avant cette date, le capital ne sera pas soumis aux droits de succession à votre décès. Peu importe, votre âge au moment des versements, le régime le plus avantageux sera appliqué : l'abattement de 152 500 euros par bénéficiaire puis les prélèvements de 20% ou 31,25%.

Anciens contrats (souscrits jusqu'au 12 octobre 1998)
Date de souscriptionDate des versementsAge au moment du versementImposition
avant le 20/11/1991avant le 13/10/1998-cas 1
avant le 20/11/1991depuis le 13/10/1998-cas 2
Entre le 20/11/1991 et le 12/10/1998avant le 13/10/1998Avant 70 anscas 1
Entre le 20/11/1991 et le 12/10/1998depuis le 13/10/1998Avant 70 anscas 2
Entre le 20/11/1991 et le 12/10/1998-Après 70 anscas 3
  • Cas 1 : exonération totale.
  • Cas 2 : Par bénéficiaire : exonération jusqu'à 152.500 € ; taux forfaitaire à 20% ensuite ; puis 31,25% au-delà de 852.500 €.
  • Cas 3 : exonération jusqu'à 30.500 € ; Droits de succession ensuite.

Ouvrir un second contrat d'assurance vie après 70 ans

Il est légitime de se demander s'il est donc réellement intéressant, dans le cadre de la succession, d'alimenter son assurance vie passé l'âge de 70 ans. La réponse est oui, mais sur un contrat différent.

« Parfois les versements après 70 ans sont plus intéressants. La base de taxation étant les primes versées, de facto, les plus-values sont totalement exonérées. Si on prend le cas d'une personne qui a 70 ans et qui va avoir encore une espérance de vie de 19 ans devant elle, si on capitalise les intérêts sur une vingtaine d'années, cela peut donner des montants très importants », estime Gilles Belloir.

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Par ailleurs, détenir deux contrats d'assurance vie pour bien séparer ces versements permet « en cas de besoin de rachat partiel, de choisir sur quel contrat il est plus intéressant de le faire afin d'optimiser la transmission », ajoute le directeur de Placement-direct.

Exemple

M. Martin, veuf avec deux enfants, détient deux contrats d'assurance vie :

  • Un contrat, alimenté avant ses 70 ans, à hauteur de 300 000 euros, et ayant accumulé 10% de plus-values, soit une valeur de rachat de 330 000 euros.
  • Un contrat alimenté après ses 70 ans, à hauteur de 30 500 euros, avec 10% de plus-value, soit 33 550 euros de valeur de rachat.

M. Martin souhaite faire un rachat partiel de 25 000 euros.

Le montant sur l'épargne accumulée sur l'assurance vie alimentée avant ses 70 ans dépasse le seuil de 152 500 euros par bénéficiaire, il va avoir intérêt à effectuer son rachat sur celle-là.

En effet, puisque l'abattement fiscal est plafonné à 152 500 euros par bénéficiaire (donc 305 000 euros pour deux bénéficiaires), les montants au-dessus de ce plafond auraient subi un prélèvement forfaitaire de 20% au moment de la succession. En retirant les 25 000 euros sur ce contrat, les 305 000 euros qui restent seront exonérés d'impôt au décès de M. Martin.

Tandis que pour l'assurance vie alimentée avec des versements effectués après ses 70 ans, seuls ceux réalisés au-delà de 30 500 euros sont taxés. Les plus-values, elles, demeurent exonérées. Toujours dans l'optique de faciliter sa succession, M. Martin aura tout intérêt à garder ce contrat tel quel.

Pour rappel, dans le cadre du rachat partiel d'un contrat d'assurance vie de plus de 8 ans, l'épargnant bénéficie d'un abattement fiscal annuel global, de 4 600 euros pour une personne seule ou de 9 200 euros pour un couple, sur l'ensemble des gains.

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Enfin, tout dépend également à qui l'épargnant souhaite transmettre son patrimoine financier. Le contrat sur lequel vous versez après l'âge de 70 ans est toujours intéressant pour votre conjoint, vos enfants, c'est-à-dire ceux entrant dans la ligne directe de succession.

Mais si le souscripteur n'a pas de lien de parenté avec le bénéficiaire ou un lien très éloigné, l'exonération 152 500 euros appliquée pour les versements faits avant 70 ans est plus avantageuse. En choisissant de souscrire deux contrats distincts, l'épargnant pourra faire profiter des meilleurs avantages fiscaux à chacun de ses bénéficiaires.

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