Best-seller de l’épargne, le fonds euros de l’assurance vie est en train de muter. Objectif : donner plus de latitude aux assureurs pris en étau par la baisse des taux d’intérêt. Les épargnants vont, quant à eux, devoir s’habituer à ces nouveaux supports, potentiellement plus rémunérateurs, mais aussi plus complexes.

Acte 1 : on limite. Acte 2 : on réforme. Il y a encore quelques années, le fonds euros était l’eldorado des épargnants. Aussi sûr qu’un livret d’épargne, il est parvenu à rapporter en moyenne, plus de 3% nets de frais de gestion jusqu’en 2011. Mais, depuis, sa rémunération est tombée à 1,50% de moyenne pour 2019. Cette chute s’explique par les rendements des actifs composant les fonds euros, qui, dans le sillage des taux d’intérêt en général, ont décliné.

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Le piège des fonds euros classiques

Cette dégringolade, combinée au fonctionnement du fonds euros, piègent les assureurs. D’un côté, la garantie en capital les empêche d’investir sur des actifs risqués. De l’autre, ils doivent tout de même parvenir à dégager une performance au moins égale à leurs frais de gestion. Et même si la rémunération du fonds euros est de plus en plus faible, les épargnants continuent à miser dessus : près des trois quarts des montants des assurances vie sont investis sur des supports en euros, selon la Fédération française de l'assurance.

C’est pourquoi, après avoir, étape 1, conditionné l’accès au fonds euros à un investissement minimum sur des unités de compte (UC), non garanties, les assureurs passent à l’étape 2 : réformer les fonds euros eux-mêmes pour rendre la garantie en capital moins contraignante à gérer. Pour les épargnants, la promesse est bien sûr d’infléchir la baisse des rendements. A ce stade, trois alternatives aux fonds euros classiques émergent.

Option 1 : le fonds euros à garantie partielle

Cet été, Spirica, filiale du Crédit Agricole, a mis sur le devant de la scène son premier fonds euros à garantie partielle. Depuis le 15 septembre, ses anciens supports euros ne sont plus accessibles, remplacés par deux nouveaux dont un, dit « Nouvelle Génération », qui couvre le capital à hauteur de 97,7% à 98% en fonction des contrats, contre 100% pour un fonds euros classique.

Cela signifie que pour un versement de 1 000 euros, l’épargnant est assuré de récupérer au moins 977 ou 980 euros. Cet écart d’une vingtaine d’euros entre le capital versé et le capital garanti donne un peu de latitude à Spirica pour investir en actions ou en immobilier, des marchés plus volatiles que les placements obligataires habituels. Ainsi, alors que les précédents fonds euros de Spirica comptaient au moins 80% à 85% d’obligations, ce fonds euros Nouvelle Génération pourra n’en contenir que 70%.

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Dans les faits, ce mécanisme n’est pas une nouveauté. Apicil a mis sur le marché un support euros de ce type dès 2017. Baptisé Euroflex, il protège l’investissement à seulement 96% (pour 1 000 euros investis, l’épargnant récupère au moins 960 euros). En contrepartie, Apicil visait un rendement plus élevé d’au moins 0,5 point par rapport à son fonds euros classique (Apicil Euro Garanti). Deux ans plus tard, le bilan est mitigé : Euroflex a rapporté 1,70% net de frais de gestion en 2019, contre de 1,10% à 1,70% (avec le bonus unités de compte) pour Apicil Euro Garanti. A ce stade, « nous n’allons pas en faire un fond phare de la gamme, à voir en 2021 », nous explique Apicil.

Option 2 : l’eurocroissance

Après le lancement d’Euroflex, Apicil a maintenu un fonds euros classique, sans perte en capital, à la différence toutefois de Spirica. Son second fonds récemment lancé ne protège également que partiellement les sommes investies. Et cette garantie, limitée à 80%, n’est acquise qu’après 8 ans. Résultat, pour 1 000 euros placés en septembre 2020, l’épargnant est certain de récupérer au moins 800 euros fin 2028.

Ce support baptisé Croissance allocation long terme est un fonds eurocroissance. Ni vraiment un fonds euros, ni vraiment une unité de compte, ces fonds eurocroissance (lancés en 2014 et reformés en 2020) peinent à se faire une place. Mais les assureurs commencent à les mettre un peu plus avant. « Aujourd’hui, chez AXA, nous avons une forte conviction sur le fait que l’eurocroissance est l’avenir des fonds en euros », expliquait sur MoneyVox en février Youmna Hamze, directrice adjointe marché épargne et prévoyance d’AXA France.

Option 3 : le fonds à garantie de rendement

Le 21 septembre, Allianz a également lancé un nouveau fonds euros, en remplacement de ses anciens supports, dont la logique s’approche de celle d'un fonds eurocroissance. En effet, les gains annuels générés par ce nouveau fonds euros – c’est-à-dire la participation aux bénéfices – sont inaccessibles pendant 5 ans. L’assureur les place automatiquement sur Allianz Dynamic Multi Asset Strategy SRI 15, une UC à risque « modéré », dans l’optique de les faire fructifier.

Ce n’est que 5 ans après la souscription du contrat que cet argent est reversé à l’épargnant. Or, en cas de sérieux retournements de marché, il est possible que l’UC où les gains du fonds euros ont été investis perdent de sa valeur. Pour rassurer les investisseurs, Allianz s’engage donc à reverser au moins 10% d’intérêts.

Si l’épargnant récupère son argent avant 5 ans, il fait une croix sur les gains du fonds euros. En cas de gros coups durs (invalidité de l’assuré, surendettement, décès du conjoint…), Allianz a tout de même prévu 6 situations dans lesquelles il est possible de récupérer de manière anticipée la plus-value du fonds euros.

A l’inverse du fonds eurocroissance ou du fonds Nouvelle Génération de Spirica, la garantie en capital est ici intégrale. En revanche, la garantie d’obtenir un rendement s’acquiert au bout de 5 ans, avec au moins 10% de gains, soit environ 1,60% par année d'immobilisation.

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