Alors que les taux de crédit immobilier ne cessent d'augmenter, de plus en plus d'emprunteurs, notamment les ménages les plus fragiles et les primo-accédants, sont exclus à cause de l'effet ciseau provoqué par le taux d'usure. De nombreux acteurs du secteur militent depuis longtemps pour une révision de son mode de calcul et pourraient être entendus dans les prochaines semaines.

Une révision du mode de calcul du taux d'usure, c'est pour bientôt ? Face à la hausse ininterrompue des taux de crédit immobilier depuis 6 mois, le taux d'usure fait de plus en plus débat.

« L'objectif, lors de la création de ce taux, était de protéger les emprunteurs car les robinets de crédit étaient fermés et les banques pouvaient donc prêter à des taux aberrants. C'était une sorte de taux plafond pour que les banques ne puissent pas faire n'importe quoi », rappelait récemment Sandrine Allonier, directrice des études pour le courtier VousFinancer, à Moneyvox.

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Mais avec la hausse des taux actuelle (1,55%, hors assurance, pour un prêt sur 20 ans selon les chiffres d'Empruntis en ce début juin), l'effet ciseau provoqué par un taux d'usure à 2,40% rejette de plus en plus de ménages plus fragiles financièrement ou non pourvus d'apport personnel. Car à ce taux nominal de 1,55% doit s'ajouter l'assurance emprunteur et un certain nombre d'autres frais. Le tout donc, sans dépasser les 2,40%. Une équation de plus en plus compliquée.

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Des solutions envisagées par le ministère de l'Économie

« On traite en moyenne cinq dossiers par mois et sur les cinq de ce mois-ci, tous ont eu des problématiques de taux d'usure », racontait ce courtier à Moneyvox. Sur des dossiers où « l'on avait (auparavant) un accord automatique de toutes les parties, aujourd'hui on passe pratiquement deux ou trois heures à essayer de trouver une solution »

Instaurer une marge fixe, recalculer le taux d'usure tous les mois plutôt que tous les trimestres ou encore sortir l'assurance emprunteur du calcul sont autant de pistes proposées par les acteurs du secteur à l'image de Bruno Rouleau, président de l'Association professionnelle des intermédiaires en crédits (Apic).

Seront-ils bientôt entendus ? « C'est vrai que le sujet peut être un peu plus sensible en phase de retournement de taux comme celle que nous vivons actuellement », a reconnu François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, cité par Les Échos. Ce dernier a tout de même tenu à nuancer en ajoutant que « nous n'avons pas aujourd'hui d'évidence aveuglante que, en particulier dans le cadre du secteur immobilier, cela se traduit par des évictions. Je crois que ce sera aux pouvoirs publics (...) de voir s'il faut adapter les choses en la matière ou s'il s'agit juste d'un problème d'ajustement transitoire. »

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Du côté du gouvernement, alors que le ministre de l'Économie Bruno Le Maire assure depuis plusieurs semaines prendre ce sujet au sérieux, on réfléchit à des ajustements. « Nous sommes ouverts, a fait savoir l'entourage du ministre au Parisien. On travaille à des solutions rapides pour prendre en compte l'impact de la remontée des taux sur le taux d'usure (...), pour trouver un équilibre entre la protection des consommateurs et l'accès à la propriété. »

Un courtier interrogé par Moneyvox se montre cependant circonspect : « Je crois savoir qu'une consultation a été lancée auprès des banques pour faire évoluer le mécanisme de calcul. Ma crainte, c'est le temps de réaction, car ce sont des processus qui peuvent prendre longtemps. » En attendant, le nouveau taux d'usure qui sortira le 1er juillet pour les trois prochains mois est particulièrement attendu.

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