La fin d'un long processus visant à « mieux partager la valeur au sein des entreprises » : la loi sur le partage de la valeur a été promulguée le 29 novembre et a été publiée au Journal officiel du 30 novembre. Principales nouveautés ? La prime Macron transformée à long terme et des dispositifs d'épargne salariale renforcés. Quand ? En 2024... mais surtout à plus moyen terme.

C'est un chantier long mais discret qui se clôt ce jeudi 30 novembre, pour une entrée en vigueur progressive en 2024 et 2025. Les députés ont adopté le 22 novembre le projet de loi sur le « partage de la valeur », sous-entendu entre salariés et employeurs. Tout sauf une surprise : avant ce vote, les députés et sénateurs s'étaient mis d'accord, le 15 novembre lors d'une commission mixte paritaire. Le Conseil constitutionnel n'ayant pas été saisi, la nouvelle loi est déjà publiée au Journal officiel.

Ce chantier a démarré au printemps dernier : in fine, les principaux changements sont globalement ceux qui avaient déjà été annoncés dès la fin mai. Rappelons que ce texte reprenait les conclusions d'un accord signé en février 2023 par le patronat et la plupart des grands syndicats (sauf la CGT). Zoom sur 3 changements à venir.

1. Prime Macron : un complément durable de l'épargne salariale

Cette « prime Macron » rendue pérenne, et dont le montant pourra s'envoler plus facilement, sera-t-elle réellement favorable aux salariés ? Ou remplacera-t-elle en partie l'épargne salariale existante ? Ou prendra-t-elle la place d'augmentations du salaire fixe, comme l'Insee l'a déjà constaté ? Il est évidemment trop tôt pour répondre à ces questions. Mais concernant la prime de partage de la valeur (PPV), le nom officiel de la si souvent surnommée « prime Macron », cette future loi en acte le caractère durable.

Ce qui va changer. La PPV restera plafonnée à 3 000 euros voire 6 000 euros en cas d'accord d'entreprise sur le partage des profits, mais vous pourrez toucher la prime Macron « nouvelle version » en deux fois dans l'année, à condition que le cumul des deux primes ne dépasse pas le plafond annuel (3 000 ou 6 000 euros, comme aujourd'hui). La future loi permettra aussi de verser cette prime Macron sur votre plan d'épargne salariale.

Quel intérêt ? A ce jour aucun (mis à part le fait de miser sur un placement financier) puisque la PPV est défiscalisée. Or en 2024, cette défiscalisation intégrale prend fin. Placer la prime Macron sur un plan d'épargne entreprise (PEE) permettra alors d'échapper à l'impôt sur le revenu, comme pour les primes d'intéressement et de participation actuellement. Ultime changement pour la PPV : elle restera totalement défiscalisée jusqu'en 2026 pour les salariés des petites entreprises (moins de 50 salariés) si leur rémunération est inférieure à 3 Smic.

Quand ? Dès 2024.

Un bémol ? Dans un communiqué, la CFTC alerte « sur le fait que les dispositifs de partage de la valeur ne sont pas suffisants face aux pertes de pouvoir d'achat des salariés et ne sont en aucun cas des substituts au salaire ». Une critique valant en particulier pour la prime Macron nouvelle génération, puisque l'Insee a mis en lumière la potentielle perte en rémunération fixe liée à cette prime dont l'attribution reste liée à la bonne volonté de l'employeur.

Cette prime qui vous prive d'une véritable augmentation de salaire

2. Prime et plan de « partage de la valorisation de l'entreprise »

C'est une nouveauté : la création d'un « plan de partage de la valorisation de l'entreprise » vise à faire bénéficier à tout salarié ayant plus d'un an d'ancienneté d'une « prime de partage de la valorisation de l'entreprise » (PPVE) « dans le cas où la valeur de l'entreprise a augmenté » en l'espace de 3 ans. Les primes, versées directement ou reversées sur un plan d'épargne salariale, lors des premières années (dans les faits en 2026, 2027 et 2028) seront exonérées de cotisations sociales.

Comment ça fonctionne ? Empruntons l'exemple du gouvernement, dans son dossier de presse de mai 2023 : « L'entreprise d'Ernest décide de mettre en place un plan de partage de la valorisation de l'entreprise. C'est une société qui est capitalisée en bourse. Elle met en place en février 2024 le plan en décidant que l'ensemble des salariés ayant 8 mois d'ancienneté se voient attribuer des montants de référence qui varient en fonction de la rémunération du salarié. Ernest se voit attribuer un montant de référence de 4 000 euros. Trois ans plus tard, en février 2026, la valeur de l'entreprise a augmenté de 30%. Ernest perçoit donc une prime de 1 200 € (4 000 x 30%). »

Quand ? Dès 2024, mais les premières primes seront versées au mieux fin 2026.

Un bémol ? L'apparition d'un nouveau droit, donc, pour les salariés mais le syndicat CFE-CGC pointait une limite dès le printemps : « ce dispositif vient s'ajouter à ceux existants (épargne salariale, PPV), pouvant créer des confusions et augmentant mécaniquement les risques de substitutions ».

3. Entreprises de 11 salariés ou plus : une obligation de dispositif de partage

Ce qui va changer. Le texte va contraindre les entreprises entre 11 et 49 salariés à mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur, c'est-à-dire la participation, l'intéressement ou la prime Macron (PPV). Principale condition : être rentable... durablement, donc, si le bénéfice net représente au moins 1% du chiffre d'affaires pendant 3 années consécutives. A savoir : dans le cas de ces petites entreprises, le complexe mécanisme de la participation sera simplifié avec une formule dérogatoire.

Quand ? A partir du 1er janvier 2025, à titre expérimental pour une période de 5 ans, laquelle sera suivie d'un bilan et d'un suivi annuel.

Le bémol ? L'entrée en vigueur en 2025 malgré la volonté des députés d'avancer l'échéance à 2024.

Et aussi...

  • Un meilleur partage des bénéfices exceptionnels. Dès 50 salariés, les entreprises devront désormais prendre en compte l'augmentation exceptionnelle de leur bénéfice dans le partage de la valeur. Des négociations devront être menées avant juin 2024 en entreprises pour définir le caractère exceptionnel.
  • Les plans d'épargne salariale, PEE ou PER collectifs, devront intégrer à leur panel de fonds disponibles un support satisfaisant à des critères de financement de la transition énergétique et écologique ou d'investissement socialement responsable, en plus du fonds solidaire qui doit déjà être proposé.

Prime Macron, intéressement, épargne salariale... Chiffres clés

  • Participation : 1 409 euros par an par salarié bénéficiaire, en moyenne, en 2020 selon la Dares ;
  • Intéressement : 1 850 euros par an par salarié bénéficiaire, en moyenne, en 2020 ;
  • Prime de partage de la valeur ou « prime Macron » : 790 euros par salarié en 2022 selon les chiffres du ministère du Travail.