L’assurance-vie a enregistré une décollecte nette record depuis le début de l’année 2012 (–5,1 milliards d’euros sur les neuf premiers mois). Pourtant, Hervé Bouclier, directeur général d’ACMN Vie et président du directoire de NEA (Nord Europe Assurances), le pôle assurance du Crédit Mutuel Nord Europe (CMNE), estime que les perspectives ne sont pas si sombres que cela pour le premier support d’épargne en France.

Hervé Bouclier, le marché de l’assurance-vie a enregistré une forte décollecte sur les neufs premiers mois de 2012 (1). Quelle est votre analyse et quelles sont les perspectives ?

« Le premier semestre 2012 a été marqué par les incertitudes électorales. Les épargnants pouvaient se demander ce qu’il adviendrait de la fiscalité de l’épargne et de l’assurance-vie. Le Livret A a permis de répondre à ce phénomène d’attente. Concernant les perspectives, l’assurance-vie retrouve un attrait depuis début juillet du point de vue de la transmission entre parents d’une même famille. La loi TEPA (2) avait mis pratiquement à égalité, l’assurance-vie et les donations dans ce domaine. Mais les diminutions récentes des seuils n’ont pas impacté l’assurance-vie. De plus, il n’y a pas eu beaucoup d’annonces sur la fiscalité, mais l’année n’est pas encore terminée. La préconisation du rapport Gallois pour un allongement de la durée de détention de l’assurance-vie peut être étudiée. Retrouver une perspective de moyen et long terme permettrait de revenir aux fondamentaux du métier de l’assurance. »

Les rendements des fonds en euros sont en baisse depuis plusieurs années, quels sont les produits alternatifs que vous mettez en avant ?

« Même si les performances des fonds en euros sont en baisse régulière ramenées à l’inflation, elles permettent toujours de maintenir au minimum le pouvoir d’achat des assurés. Toutefois, nous devons aujourd’hui modifier la promesse client que nous pouvons prendre sur ces fonds, notamment si les taux obligataires restent aussi bas. Face à cette lente érosion des performances, il faut plus que jamais conseiller aux assurés d’opter pour une diversification partielle du capital. L’assuré doit accepter de prendre un peu de risque, notamment au travers des unités de compte. »

Quelle sont les tendances que vous enregistrez sur les contrats d’assurance-vie en ligne qui sont diffusés par vos partenaires ?

« Elles sont identiques à celles du marché. Ces contrats représentent 3% de notre collecte. Internet est avant tout un moyen de communication autour des contrats bancaires, ce qui nous permet de mieux répondre aux attentes des assurés (par exemple, la consultation des comptes bancaires sur téléphone). »

Quels seront les impacts de Solvabilité II et de Bâle III sur les bancassureurs ?

« Les mesures quantitatives et les règles liées à Solvabilité II changent régulièrement en termes de paramètres, la mesure du besoin de fonds propres est par conséquent complexe à gérer. Le propre du métier de l’assurance est de percevoir des primes et ensuite de prendre des engagements à moyen et long-terme vis-à-vis des clients. Nous ne savons pas à l’heure actuelle quelle sera précisément l’allocation des fonds propres qu’il faudra mettre pour servir nos engagements. »

(1) ACMN Vie a enregistré une production de 585,8 millions d’euros sur les huit premiers mois de l’année 2012. La collecte nette de prestations (hors chargements sur primes et arbitrages) est négative, à –45,3 millions d’euros.

(2) Loi du 21 août 2007 « en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat », conçue à l’époque par le gouvernement Fillon.