Cinquième et dernier article de notre série consacrée aux « flops » communication et marketing des banques. Voyage cette fois dans les années 1960 pour découvrir les « drive-in » bancaires, qui n’ont alors pas séduit les Français. Mais, surprise, le concept a depuis été ressorti des cartons par la Caisse d'Epargne et BNP Paribas. Top ou re-flop ? Récit.

Dans les années 1960, à l’heure de la démocratisation de l’usage des voitures, certaines agences bancaires imaginent un dispositif de « drive-in », lit-on dans les archives de la Société Générale. Le principe : « Un circuit adjacent à l’agence est aménagé et l’une des façades est percée pour placer un comptoir d’accueil protégé. La clientèle peut alors effectuer quelques opérations courantes auprès du guichetier préposé sans quitter le volant de son véhicule. » A la Société Générale, des caisses « auto-banque » sont installées à Dakar, au Sénégal, et à Roubaix en 1965, puis à Nancy dix ans plus tard. « Si ce service d’auto-banque donne satisfaction à la clientèle, il n’a pas perduré sous cette forme », relève la SocGen.

« C’est tout de même étonnant que les banques imaginent que l’on soit dans l’urgence, au point de ne pas pouvoir descendre de la voiture, en ce qui concerne nos comptes », commente aujourd’hui Guillaume Almeras, éditeur du site spécialisé Score Advisor, où interviennent plusieurs consultants en innovation bancaire. « Le drive-in, c’est l’esprit de la grande consommation. Or les clients ont besoin d’un rapport humain avec leur banquier. »

Dix distributeurs en « drive-in » à la Caisse d’Epargne

Pourtant, l'histoire ne s'arrête pas là. Si la Société Générale semble avoir rangé le concept aux oubliettes, BNP Paribas et la Caisse d’Epargne l'ont ressuscité à la fin des années 2000. BNP Paribas a inauguré en 2009, au Prado à Marseille, « le 1er guichet automatique de banque (GAB) drive-in de son réseau en France » selon un communiqué diffusé à l’époque. Il permet d’effectuer dépôts d'espèces et de chèques ou retraits d'espèces sans descendre de son véhicule, tous les jours, de 6h à 22h. Un atout selon BNP Paribas « pour les personnes à mobilité réduite ainsi que pour les commerçants puisqu'ils auront accès à des services de caisse sept jours sur sept ». Encore ouvert à ce jour, ce GAB reste unique dans le réseau BNP Paribas.

En revanche, à la Caisse d’Epargne, le concept apparaît moins marginal. Le Journal de Saône-et-Loire évoque un « drive-in » installé depuis novembre 2007 à Châtenoy dans un article datant de 2012. Surprise : « Depuis son installation, le distributeur drive de Châtenoy réalise près de 2.400 opérations mensuelles, soit 80 par jour », deux fois plus que dans un GAB classique selon un chargé d'études de la banque cité par le journal local (1).

Contacté, le service presse des Caisses d’Epargne affirme que le réseau compte « une petite dizaine de [distributeurs] drive en France » à ce jour. Et le « drive-in » bancaire fonctionne par exemple aux Etats-Unis, comme en témoigne la photo illustrant cet article, prise au Texas en 2008. Affaire à suivre, pour savoir si le « flop » d’hier se transforme en succès d’aujourd’hui.

(1) Une affirmation qu'il convient de nuancer : selon une étude de Score Advisor (actualisée fin 2012) réalisée auprès de « 4 des 6 premiers groupes bancaires français », le nombre moyen de transactions par jour par GAB s'établit à 385, dont 216 retraits.