Travaux en cours. Le gouvernement mène la concertation avec les syndicats afin de préparer le terrain de la réforme des retraites. Le ministère du Travail a envoyé ce mardi 8 novembre une synthèse de ce premier cycle de discussions. A la clé : plusieurs pistes de réflexion, mais pas de mesures concrètes à soumettre au débat.

Des arbitrages ? C'est ce que les syndicats attendaient. Mais cette première synthèse des concertations menées actuellement par le gouvernement en vue de la réforme des retraites ne livre aucune véritable mesure concrète. Uniquement des pistes de réflexion, en creux, et un « diagnostic précis » de la situation actuelle, selon la synthèse envoyé mardi par le ministère du Travail.

Un « faible taux d'emploi des seniors »

Le gouvernement pointe en particulier un « taux d'emploi des 60-64 ans significativement plus faible, de 33% contre environ 45% en moyenne » que chez les voisins européens. Cela est dû au chômage des seniors, qui n'ont pas encore l'âge de réclamer leurs droits à la retraite, mais aussi à des départs à la retraite autour de 60 ans, « près de 40% des nouveaux retraités » bénficiant d'un départ anticipé. Autre observation : « un pic de rupture de contrats de travail (licenciements ou ruptures conventionnelles) est constaté vers 59 ans, affaiblissant d'autant l'emploi des seniors ».

Aucune indication ne figure à ce chapitre, dans ce document, sur la volonté du gouvernement de reculer l'âge légal de départ à la retraite, aujourd'hui fixé à 62 ans, comme l'avait réaffirmé le président de la République, Emmanuel Macron, sur France 2 fin octobre : « Si certains [partenaires sociaux] sont prêts à s'engager et à dire : “nous, on ne veut pas aller jusqu'à 65 ans, mais en contrepartie, si vous faites ce geste, on est prêts à travailler un peu plus de trimestres” - parce qu'il y a d'autres façons de faire, c'est pas que l'âge légal, c'est travailler un peu plus de trimestres -, moi je suis ouvert. »

Pour rappel, après avoir laissé filtré en septembre une hésitation sur une réforme actée rapidement, l'exécutif a temporisé en rouvrant un nouveau cycle de concertations avec partenaires sociaux et forces politiques. L'objectif reste d'adopter un projet de loi global « avant la fin de l'hiver », a déclaré la Première ministre Elisabeth Borne fin septembre à l'AFP. Elle a rappelé que la réforme des retraites devait entrer en vigueur « à l'été 2023 ».

Renforcer la retraite progressive et le cumul emploi-retraite

« À l'issue des premières discussions, le Gouvernement confirme sa volonté d'inscrire dans la future réforme la transformation des dispositifs de transition activité-retraite », lit-on dans cette première synthèse des discussions en cours. Au premier rang de ces dispositifs que le gouvernement compte développer : la retraite progressive, dispositif existant permettant de réduire petit à petit votre activité professionnelle tout en commençant à toucher une partie de votre pension. Elle « doit être mieux connue et plus facilement mobilisée », et le gouvernement se dit ouvert à « l'assouplissement de certaines règles » pour favoriser ce développement.

Au premier rang, en parallèle : le cumul emploi-retraite. Le président-candidat Macron déclarait au printemps dernier vouloir permettre aux seniors de continuer « à cotiser et à gagner des droits à cotisation, qui est une des faiblesses du système de cumul actuel (...) ». Le gouvernement compte aussi sur son projet de compte épargne-temps universel pour favoriser cette transition emploi-retraite.

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Favoriser l'emploi des seniors : exonérations, formation et « index seniors »

C'est clairement le point noir à gommer, pour le gouvernement, pour faire adhérer la population à sa réforme des retraites : faire baisser le chômage des seniors. Le faible taux d'emploi des seniors, que le gouvernement confirme sans ambiguïté, est utilisé comme un argument contre la réforme des retraites et surtout contre le recul de l'âge de départ à 64 puis 65 ans d'ici 2031.

Le ministère du Travail appuie donc dans sa synthèse la « proposition d'un index seniors », qui fixerait un pourcentage minimal de seniors dans les entreprises. Une idée loin pourtant de faire l'unanimité. « Cela n'a aucun sens, par exemple, de demander à des start-up d'avoir un pourcentage minimal de seniors », a réagi mi-octobre le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux. Le gouvernement reconnaît « des questions et les réserves de certaines organisations, en raison de son association spontanée à l'index égalite professionnelle » mais veut « poursuivre l'instruction » de cet outil.

Parmi les autres cordes à l'arc du gouvernement, pour lutter contre le sous emploi des seniors, figure pêle-mêle : une réflexion en cours sur les propositions « d'exonérations de cotisations sociales ou de soutien à l'embauche », la volonté de « replacer la gestion des âges et la préparation des fins de carrières au cœur de la négociation collective », « engager une politique ambitieuse de prévention de l'usure professionnelle », ou encore favoriser la formation et la préparation des secondes parties de carrière notamment en « assurant l'accès à un bilan de compétences à mi-carrière » comme proposé par « plusieurs organisations » syndicales.

« Un relevé de discussions et pas un relevé de décisions »

Verdict de cette première synthèse... « Cela ne prédestine rien. Il n'y a aucune indication qui pourrait nous mettre sur la piste de ce que le gouvernement est prêt à lâcher », réagit Yvan Ricordeau, représentant de la CFDT pour la réforme des retraites, auprès du Parisien. Dans le quotidien, un porte-parole du gouvernement assume : « C'est un relevé de discussions et pas un relevé de décisions. »

Des pistes, une réflexion et des concertations en cours... mais l'échéance d'un texte visant à être voté avant la fin de l'hiver ne bouge pas, à ce stade. « Au 8 novembre, toutes les organisations ont participé à la concertation, à l'exception de la CGT, appuie le ministère du Travail dans ce document de synthèse. Les échanges se poursuivront cet automne, comme l'ont souhaité plusieurs organisations. »

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