Qonto, Goodvest, Wecasa... En quelques heures, ces trois entreprises ont levé des millions auprès de leurs clients. Pourtant, ce n'est pas l'argent qui les intéresse. Ou du moins, pas seulement.

Si vous êtes client de Qonto, Goodvest, ou Wecasa, vous avez sans doute reçu un message vous invitant à participer à une levée de fonds. Car pour se financer, ces trois entreprises ont fait le choix de se tourner vers... leurs propres clients. Et elles ne sont pas les seules. Depuis quelques mois, la pratique a le vent en poupe, avec 101 millions d'euros collectés en 2021, contre 57 millions en 2020, soit une croissance annuelle record de +77% (1).

Pourtant le crowdequity, ou financement participatif en actions, existe depuis des années. Et ce mode de financement est très répandu dans les pays anglo-saxons. C'est d'ailleurs par une plateforme britannique, Crowdcube, que Qonto et Goodvest sont passées. Celle-ci compte plus de 1 300 opérations à son actif. Et déjà de beaux succès, comme celui de Finary. En mars dernier, la fintech avait levé 2,17 millions d'euros en 21 minutes auprès de 983 investisseurs.

Qonto n'est pas en reste. Le leader européen de la gestion financière des entreprises espérait lever 1 million d'euros. En 6h30, il a récolté cinq fois plus, et 1 800 clients sont entrés au capital. Le succès était également au rendez-vous pour Goodvest, qui a atteint son objectif de 250 000 euros en « seulement deux heures », selon son cofondateur et CEO, Joseph Choueifaty.

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« Ce n'est pas l'argent qui nous intéresse »

Un véritable tour de force. Toutefois, ce n'est pas l'argent qui intéresse les deux entreprises. Ou du moins pas seulement. « Nous n'en avons pas besoin », sourit Alexandre Prot, cofondateur et CEO de Qonto, qui vient de clôturer une levée de fonds record de 486 millions d'euros. Goodvest, de son côté, boucle tout juste un premier tour de table de 2 millions d'euros.

Mais alors, pourquoi recourir au crowdequity ? « Nous avons toujours construit notre offre avec nos clients, donc cela nous paraissait évident de leur permettre de bénéficier des fruits de la réussite de Goodvest », explique Joseph Choueifaty. « Il y a également un fort enjeu de notoriété : notre principal canal d'acquisition, ce sont les clients qui nous recommandent. Un client actionnaire, c'est un client encore plus engagé et plus impliqué ».

« Crowdcube est avant tout une solution d'engagement, pas de financement », confirme Pauline Pham, directrice de Crowdcube pour la France dans les colonnes des Echos. « Les entreprises avec qui nous travaillons en France sont soutenues par des fonds de capital-risque. Elles sont convaincues du rôle clé que jouent leurs communautés dans leur développement ».

D'ailleurs, les deux entreprises n'excluent pas de remettre le couvert. « Au vu du succès de cette levée de fonds participative, et de l'intérêt que cela peut représenter à la fois pour nos utilisateurs et pour le développement de Goodvest, il est probable que l'on reproduise ce type d'opération », indique Joseph Choueifaty.

Toutefois, les fonds d'investissements ont encore de beaux jours devant eux. « Cette démarche ne s'oppose pas aux levées de fonds plus classiques, elle est complémentaire », explique Fanny Knusmann, head of brand chez Wecasa, une plateforme de services à domicile. « Il est important pour nous d'être également accompagnés par des investisseurs institutionnels et expérimentés qui peuvent nous apporter une expertise stratégique », ajoute Joseph Choueyfaty.

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11,7% de rendement annuel moyen

Les particuliers peuvent profiter de ces opérations pour investir dans une entreprise qu'ils connaissent déjà bien. « Nos clients accèdent à notre levée de fonds dans les mêmes conditions que nos investisseurs de renom et peuvent espérer une plus-value sur le long terme si Goodvest continue à bien se développer », indique Joseph Choueifaty.

Entrer au capital de jeunes pousses en pleine croissance peut s'avérer rentable : selon une étude de France Invest et Grant Thornton (2), l'investissement dans des sociétés non cotées aurait rapporté 11,7% de rendement annuel moyen sur un horizon de 15 ans. Soit deux fois plus que les 5,4% de rendement par an servis par le CAC 40 sur la même période.

Bien sûr, la pratique n'est pas sans danger. Car, comme tout investissement, le financement participatif en actions présente un risque de perte en capital. Et « 90% des startups font faillite, dont 10% dès la première année », rappelle Claude Calmon, fondateur de Calmon Partners, un cabinet de conseil en levée de fonds.

Mais au-delà du seul aspect pécunier, le crowdequity redessine la relation entre les entreprises et leurs clients. « Pour nos clients, c'est l'opportunité de s'impliquer dans un projet auquel ils croient », estime Joseph Choueifaty. « C'est également une manière de dépasser le simple statut de consommateur », complète Fanny Knusmann.

Le succès de la formule réside aussi dans sa simplicité. Quelques clics suffisent pour devenir actionnaire de ces entreprises qui ne sont pas cotées en bourse. Et le ticket d'entrée, souvent accessible, permet à n'importe qui de « prendre part à l'aventure » en tant qu'investisseur. Le prix d'une action a ainsi été fixé à 1 euro pour Wecasa, 10 euros pour Goodvest, et 138 euros pour Qonto.

Pourquoi investir dans une société non cotée en bourse

(1) « Baromètre du crowdfunding en France 2021 réalisé par Mazars pour Financement Participatif France ».

(2) 35ème édition du baromètre de France Invest et Grant Thornton sur l'activité des acteurs français du capital-investissement et des fonds d'infrastructure.