Le projet de loi Pacte revient ce mercredi à l’Assemblée nationale. Un texte dense et aux ambitions élevées pour le développement de l’épargne retraite. Comment les courtiers en ligne comptent-ils profiter de l’aubaine ?

L’épargne retraite « souffre d’un déficit d’attractivité ». Le constat a été dressé par le ministre de l’Economie Bruno Le Maire au printemps dernier au moment de présenter le volet épargne de son projet de loi Pacte. Le texte en discussion à l’Assemblée nationale prévoit notamment d’harmoniser les conditions de sortie des différents produits, de faciliter les transferts de contrats d’épargne retraite, tout en plafonnant les frais : « Le transfert sera gratuit si le produit a été détenu pendant 5 ans », a promis Bercy, « dans le cas contraire, les frais de transfert ne pourront excéder 3% de l’encours ».

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Le projet de loi renvoie toutefois à plusieurs textes réglementaires. Des points restent donc à éclaircir, en particulier sur la transférabilité des produits. Les particuliers pourront-ils transformer à leur guise un contrat Madelin en Perp, et vice-versa, changer de gestionnaire quand ils le veulent, voire regrouper tous leurs produits d'épargne retraite en un seul ? Sur ce point, les courtiers et sociétés de gestion n’interprètent pas tous les textes de la même manière… Les débats parlementaires permettront d’éclaircir les objectifs de la majorité.

Une offre d’épargne retraite renouvelée sur internet

« Selon notre interprétation, le texte devrait favoriser le transfert d’un produit d’épargne retraite à un autre, hors assurance-vie », avance Sébastien d’Ornano, président exécutif de Yomoni. « Cela devrait permettre de changer de gestionnaire, si l’épargnant le souhaite. Nous n’avons pas plus d’éclairage sur le texte pour le moment. » Pour profiter des nouvelles possibilités ouvertes par ce texte, Yomoni réfléchit au lancement d’une offre d’épargne-retraite à l’horizon 2019.

Le projet de loi Pacte suscite beaucoup d’attentes chez les autres courtiers et plateformes d’épargne en ligne. Mais la plupart de ces acteurs se gardent pour l’heure de s’avancer sur les nouveautés à venir. Mes-Placements compte par exemple bien « développer » son offre d’épargne retraite, tout en jugeant « prématuré » d’esquisser les contours de ce développement. Même retour de la part d’Assurancevie.com, qui confirme une volonté de développement : « Quant à la forme que cela prendra, c’est encore trop tôt pour le savoir. »

Un projet de loi non « figé »

François Leneveu, cofondateur d’Altaprofits, accueille lui aussi positivement toute mesure favorable au développement de l’épargne-retraite, mais il reste dans l’attente d’éclaircissements : « A ce stade, rien n’est vraiment précis et figé dans ce projet de loi. » En effet, la loi Pacte doit entrer en vigueur en 2019, mais le volet transférabilité et harmonisation des produits d’épargne retraite fera aussi l’objet d’une ordonnance, attendue courant 2019. Ce qui pourrait renvoyer à 2020 pour l’entrée en vigueur de certaines mesures.

Ce flou relatif ouvre aussi le champ des possibilités. Gilles Belloir, de Placement-Direct, se dit lui « très enthousiaste » : « La mise en place d’un nouveau contrat de retraite pouvant être racheté en cas d’acquisition de résidence principale ainsi qu’au départ en retraite me semble de nature à redynamiser l’épargne retraite. De plus la limitation des frais de transferts à 3% est une très bonne nouvelle pour les courtiers en ligne qui offrent des contrats beaucoup plus intéressants que les réseaux traditionnels. Nous étudions donc à ce stade le lancement d’un contrat dédié. »

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Profiter de l'effet médiatique

Même enthousiasme du côté de la plateforme WeSave : « La loi Pacte, dans sa version actuelle, vise notamment à orienter l’épargne des salariés français vers un objectif de long terme - donc sur des supports plus risqués - tout en rendant les produits d'épargne retraite plus lisibles, mais aussi plus performants avec une diversification optimale de l’épargne - via un mandat de gestion donné à un tiers », commente le cofondateur Jonathan Herscovici. « C’est donc un positionnement qui nous intéresse au plus haut point », ajoute-t-il, sans détailler les projets éventuels à ce stade.

Le courtier d’épargne en ligne Linxea n’a, lui, pas de projet de lancement de nouveau produit d’épargne retraite, mais son directeur général Yves Conan compte mettre en valeur l’offre déjà disponible : « Nous allons profiter de l’effet médiatique pour insister sur le caractère transférable de ces produits retraite et inciter les clients à quitter des produits de ''qualité moyenne'' pour des produits moins chargé en frais. »

De nouvelles possibilités sur l’épargne salariale ?

La fintech Yomoni espère aussi surfer sur un autre volet de la loi Pacte, celui qui vise à développer l’épargne salariale, en particulier dans les petites et moyennes entreprises. « Nous avons interrogé des chefs d’entreprise, en particulier de TPE et PME, pour comprendre ce qui les freinait », confie le président exécutif Sébastien d’Ornano, qui devrait très prochainement annoncer le lancement d’un produit d’épargne salariale. « La lourdeur administrative, la complexité du sujet et les frais élevés sont les principaux inconvénients soulevés. L’offre sur laquelle nous travaillons souhaite répondre à ce constat. »

Et tous ces acteurs seront bien entendu aussi en première ligne si le débat sur la transférabilité de l’assurance-vie refait son apparition lors des débats parlementaires.