Le tarif réglementé du gaz d'Engie va disparaître le 30 juin, six mois avant la fin du bouclier tarifaire déployé par le gouvernement depuis la fin 2021. Est-ce à dire que les consommateurs ne seront plus protégés d'une hausse folle de leur facture à partir du 1er juillet ?

Le bouclier tarifaire pour le gaz prendra fin en décembre 2023, six mois après la fin du tarif réglementé (TRV) qui disparaît au 30 juin. Pourquoi ? « Il n'y a plus de raison d'avoir un bouclier, car les prix sont revenus à la normale », a expliqué le ministre de l'Economie Bruno Le Maire en avril dernier.

« En ce moment, on n'a même pas besoin du bouclier tarifaire parce que les prix sont bas. Ils sont bas pour la fin de l'année, ils sont bas pour l'année prochaine. (...) Le gaz sera bien couvert jusqu'à la fin de l'année, mais simplement ce sera une application théorique », confirme Emmanuelle Wargon, la présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE).

Il faut dire que sur les marchés, le mégawattheure (MWh) de gaz naturel livré en 2024 en France s'échange désormais à des prix 6 à 8 fois inférieurs de ceux de la fin août 2022.

Un bouclier tarifaire qui coûte cher

Une bonne nouvelle pour le gouvernement alors que le bouclier tarifaire a coûté cher aux finances publiques : 11 milliards d'euros en 2022 pour geler la hausse des prix du gaz. Et c'est sans compter, les multiples chèques énergie envoyés à des millions de ménages pour limiter la flambée des coûts de l'énergie.

« C'est seulement grâce à ce bouclier que la hausse des prix a été limitée à 15% en moyenne en 2023 pour les Français. Il s'applique bien à tous les contrats, pas seulement aux contrats TRV », insiste le ministère de la Transition énergétique.

En effet, le bouclier tarifaire sur le prix du gaz a d'abord protégé les clients aux tarifs réglementés ou ayant une offre indexée sur ces derniers. En 2023, le gouvernement a étendu ce bouclier à l'ensemble des 11 millions de foyers qui utilisent du gaz, y compris pour ceux ayant une offre de marché chez un fournisseur alternatif.

« Le bouclier tarifaire s'applique également aux offres de marché, car il s'agit d'une subvention, confirme Lucile Buisson, chargée de mission Energie à l'UFC-Que Choisir. Il ne s'agit pas d'un blocage des prix, contrairement à ce qui a pu être dit ».

Dans ce contexte, la disparition du tarif réglementé du gaz ne devrait pas avoir d'impact sur le bouclier tarifaire. Sans TRV, l'Etat pourra toujours imposer des prix planchers aux fournisseurs si les prix du gaz venaient de nouveau à flamber d'ici la fin de l'année. Ou bien utiliser un dispositif comme l'amortisseur électricité mis en place depuis janvier 2023 pour les entreprises et les collectivités.

L'Etat paiera la différence et compte sur Engie

« La mise en place du bouclier tarifaire est prévue par l'article 181 de la loi de finances pour 2023. Il donne la possibilité au gouvernement de le prolonger par décret entre le 1er juillet et le 31 décembre 2023, explique la CRE à MoneyVox. La fin du tarif réglementé de vente du gaz au 1er juillet 2023 entraîne la disparition de la référence de coût d'approvisionnement utilisée pour calculer les pertes de recettes des fournisseurs de gaz naturel, qui seront compensées. »

« Le bouclier reste en place pour protéger les Français, mais ne s'activera que si les prix du gaz connaissaient à nouveau une forte hausse sur les marchés, précise le cabinet de la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher.

En clair, l'Etat paiera alors la différence entre le prix repère de la CRE et le coût réel supporté par les fournisseurs. Ce nouvel outil doit permettre aux consommateurs de comparer les offres dès juillet. La méthodologie de calcul de ce nouveau prix de référence suit en fait celle du tarif réglementé du gaz avec pour objectif de refléter les modalités de construction des offres de marché des fournisseurs. Ce prix proposé tient compte de « l'ensemble des composantes de coût de fourniture du gaz, coûts d'approvisionnement en gaz et coûts hors approvisionnement : coûts d'acheminement, coût de stockage, coûts commerciaux, marge, etc. », détaille la CRE.

De plus, à la demande du gouvernement, Engie, le fournisseur historique, s'est engagé à proposer une offre suivant ce calcul repère. Appelé Passerelle, ce contrat en offre de marché verra son prix changer chaque mois. Il sera attribué d'office aux clients du tarif réglementé qui n'auront pas choisi une nouvelle offre avant la fin des TRV au 30 juin.

« Tout va bien tant que les prix baissent »

Une fin des TRV que conteste François Carlier délégué général de la CLCV : « Tout va bien tant que les prix baissent, car le jour où les prix montent, vous n'avez plus de garantie ». D'autant plus avec la fin programmée du bouclée tarifaire à la fin de l'année.

En effet, au-delà de la possible intervention de l'Etat, c'est un nouvel emballement des factures qui est à redouter. Par conséquent, selon Julien Teddé « l'échéance importante pour les consommateurs est plus la fin du bouclier tarifaire en gaz, soit le 31 décembre 2023, que la fin du TRV le 30 juin prochain ».