À partir de ce mardi, 1er août, les tickets de caisse ne seront plus imprimés automatiquement. Une décision qui soulève de nombreuses questions et fait craindre plusieurs effets néfastes pour les consommateurs. Explications.

Ce n'est pas encore la fin définitive des tickets de caisse, mais une première étape. A compter du 1er août, celui-ci ne sera plus imprimé sauf si le client le réclame. Cette mesure votée en 2020 devait initialement entrer en vigueur au 1er janvier 2023, avant d'être décalée au 1er avril, puis repoussée au 1er août en raison de l'inflation.

« Nous avons des remontées de terrain, nous discutons avec les associations de consommateurs, avec la grande distribution, qui nous disent que, face à l'inflation, beaucoup de Français souhaitent vérifier l'exactitude du montant des courses qu'ils font », expliquait alors Bercy. Même si la hausse des prix reste vive, sa progression ralentit : +4,5% en juin sur un an.

L'interdiction de l'impression automatique des tickets en magasin a comme objectif de réduire la production de déchets. Chaque année, ce sont près de 30 milliards de facturettes qui sont ainsi imprimées.

Attention cependant aux effets pervers d'une telle décision, dénoncés par 12 associations de consommateurs qui ont publié en l'an dernier un rare communiqué commun pour réclamer que l'impression du ticket de caisse soit « systématiquement proposée » au consommateur.

Publicité intrusive

Elles estiment ainsi que cette réforme « ouvre la voie à une dématérialisation à marche forcée du ticket... susceptible de faciliter via des techniques marketing la création de base de données par les commerçants et notamment d'entraîner l'essor de publicités intrusives ou non désirées. ».

En effet, le consommateur pourra désormais choisir soit de ne pas obtenir de ticket de caisse, soit demander l'impression papier du ticket de caisse, soit récupérer le ticket de caisse par voie dématérialisée, notamment via SMS ou encore courriel.

« La récupération du ticket par voie dématérialisée présente parfois plus de risques pour le respect de votre vie privée car elle implique, dans certains cas, la communication de vos coordonnées », prévient d'ailleurs la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil).

Preuve d'achat plus difficile

Mais ce n'est pas le seul effet pervers. « La suppression par défaut du ticket porte les germes d'une explosion des situations où le consommateur sera privé de la possibilité de faire valoir ses droits. En renonçant implicitement et par manque d'information sur l'utilité du ticket de caisse, les consommateurs se verront exposés au risque de ne pouvoir apporter la preuve de leur achat. Preuve d'achat indispensable pour se prévaloir des garanties légales ou commerciales, ou encore pour le remboursement en cas de rappel d'un produit alimentaire. Procéder à l'échange d'un vêtement que le vendeur avait proposé pour décider le consommateur au moment d'acheter pourrait également se compliquer », estiment les associations de consommateurs.

Impossible de vérifier le montant exact payé

Autre argument avancé : le ticket permet de vérifier l'exactitude du montant de la transaction, « une précaution loin d'être anodine pour éviter les erreurs en caisse, comme la non prise en compte d'une promotion », pointent ces associations de consommateurs.

Risque de fraude accru

Les associations mettent en garde aussi contre le risque de fraude accru aux paiements sans contact en cas de non-impression. « Sur les terminaux de paiement, il est tout à fait possible que le commerçant tape le montant à payer sans que le client le voie s'afficher. Le ticket est alors son seul moyen de vérifier qu'il règle bien la somme qu'il doit au professionnel », explique ainsi l'UFC-Que Choisir.

Un outil de gestion budgétaire supprimé

Dernier point non négligeable en cette période de forte inflation, « le ticket de caisse constitue un outil de gestion du budget familial, qui permet aux consommateurs de matérialiser et de suivre leurs dépenses du quotidien. Dans un contexte d'érosion du pouvoir d'achat, cet élément ne peut être négligé », souligne le communiqué de presse des 12 associations de consommateurs.

Dans ce contexte, la CLCV demandait à ce que soit défini un montant maximum d'achat, de 25 euros au-delà duquel l'impression du ticket reste systématique sauf opposition du client. « Cette mesure cantonnerait aux petits achats le risque d'oubli de demander son ticket. Elle aurait également le mérite de permettre aux consommateurs d'entrer progressivement dans l'ère de la dématérialisation », estimait récemment l'association.