La suppression totale de la taxe d’habitation ne sera effective qu’en 2020 pour 80% des ménages, et à l’horizon 2021 ou 2022 pour les autres. En attendant, en 2018, l’exonération partielle annoncée n’est pas uniforme sur le territoire.

La suppression – progressive – de la taxe d’habitation a été l’une des promesses phare d’Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle. Les avis en cours de distribution devaient permettre au gouvernement de concrétiser le gain en pouvoir d’achat pour une partie de la population. Mais ce signal positif s’est transformé en incompréhension dans certains cas, et surtout en polémique puisque plusieurs milliers de communes ont voté des augmentations de taxe d’habitation. Au final, beaucoup d’informations contradictoires. Les éléments pour comprendre cette absence d'uniformité sur le territoire.

Comment voir l’évolution de votre taxe d’habitation ?

Comment savoir si vous faites partie des gagnants ou des perdants ? Facile. Si vous n’avez pas déménagé en 2017, votre avis de taxe d’habitation fait apparaître l’évolution de votre cotisation locale. Sur la deuxième page de l’avis figure un large cadre « évolution des impositions entre 2017 et 2018 » (en rouge sur la photo ci-dessous) qui permet de savoir si votre taxe d’habitation a augmenté ou baissé, et de combien. Par ailleurs, la mention « dégrèvement TH » (en rouge) vous permet de savoir si vous faites partie des ménages profitant de l’exonération progressive, et de chiffrer le gain pour cette année 2018.

Taxe d'habitation 2018
Avis de taxe d'habitation « vierge »

Comment fonctionne l’exonération progressive ?

Le gouvernement a annoncé de longue date que 80% de la population sera exonérée de taxe d’habitation en 2020. Une exonération progressive et qui se concrétise donc cette année par un « dégrèvement » de 30% sur la taxe d’habitation due pour la résidence principale. Pour en bénéficier, il faut que le revenu fiscal de référence (RFR) – celui figurant sur l’avis d’impôt 2018 – soit inférieur aux seuils suivants, et ne pas avoir été assujetti à l’ISF en 2017. Les ménages dont les revenus sont légèrement supérieurs à ces seuils bénéficient eux « d’une réduction partielle » de la taxe.

Seuil de RFR permettant l'exonération de taxe d'habitation
Parts fiscalesComposition du foyerPlafond de RFR
1Personne seule27.000 €
1,5Personne seule avec un enfant35.000 €
2Couple sans enfant (ou personne seule isolée avec un enfant)43.000 €
2,5Couple avec un enfant49.000 €
3Couple avec deux enfants55.000 €
4Couple avec trois enfants67.000 €
+0,5pour chaque demi-part supplémentaire+6.000 €

Si votre RFR figure sous ces seuils, comment expliquer que votre taxe d’habitation n’ait pas diminué précisément de 30% ? Une première explication, à la marge : cette taxe est calculée sur la base de la valeur locative cadastrale de votre logement, et cette valeur locative est revalorisée en fonction de l’inflation. Un élément qui explique des taux légèrement inférieurs à 30%.

Seconde explication, mise en exergue par Bercy dans la notice accompagnant la taxe d’habitation : « Les hausses de taux d’imposition ou les diminutions d’abattements votées par les collectivités entre 2018 et 2017 viennent réduire le dégrèvement de taxe d’habitation. »

Le mode de calcul de la taxe d’habitation

Base de calcul : la valeur locative cadastrale du logement, qui représente le loyer théorique annuel du bien.

Abattements : sont entre autres appliqués des abattements pour compenser les charges de famille, selon la taille du foyer, et de façon facultative (selon les collectivités) pour alléger la taxe de certains foyers modestes.

Taux d’imposition : ils sont votés par les collectivités pour fixer la part communal et la part intercommunale. Ils s’appliquent au montant après abattements.

Dégrèvement : cette réduction de 30% s’applique sur le montant obtenu. Ce dégrèvement sera de 65% en 2019, avant l’exonération en 2020.

Contribution à l’audiovisuel public : la CAP, ou redevance télé (139 euros par foyer fiscal équipé en 2018, sauf exception), s’ajoute à la taxe d’habitation et n’est pas concernée par le dégrèvement de 30%.

Exonération totale : de longue date, certains foyers modestes, les titulaires de l’AAH ou encore de l’ASPA sont totalement exonérés de taxe d’habitation.

Combien de communes ont augmenté leur taux de taxe d’habitation ?

La polémique est partie sur les réseaux sociaux, certains contribuables partageant leur surprise en découvrant une hausse de taxe d’habitation, puis elle a été étayée par un article du Figaro listant 6 000 communes ayant augmenté leurs taux d’imposition, malgré la promesse gouvernementale d’une compensation « à l’euro près » du manque à gagner pour les collectivités. En réaction, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a publié vendredi le fichier intégrant l’ensemble des évolutions de taux communaux et intercommunaux en 2016, 2017 et 2018. Vous pouvez ainsi découvrir les taux dans votre ville en naviguant dans ce fichier Excel.

Une publication vertement critiquée par de nombreux maires, car elle a alimenté la polémique sur les réseaux sociaux. Depuis, Gérald Darmanin a tenté de freiner la controverse et niant toute volonté de stigmatisation des collectivités.

D'importantes hausses à Cholet, Chantilly, Etampes...

Ce fichier a tout de même permis d’identifier les 6 200 communes concernées par les hausses, et dont 55 villes de plus de 10 000 habitants. Par exemple, en 2018, le taux communal est passé de 16,68% à 16,85% à Cholet (49), de 19,77% à 20,56% à Chantilly (60), de 20,9% à 21,53% à Bouguenais (44), de 17,25% à 18,72% à Corbeil-Essonnes (91), de 20,25% à 22,88% à Etampes (91), de 20,63% à 22,03% à Sceaux (92) ou encore de 11,34% à 12,47% au Chesnay (78).

Dans un communiqué diffusé vendredi, l’Association des maires de France affirme que « les 15% [de communes ayant augmenté leurs taux] n’ont pas été motivées par des considérations de politique nationale, mais par la recherche de financements nécessaires à l’accomplissement de leurs missions dans un contexte de baisse de leurs moyens ». Par ailleurs, selon l’état du bâti ou selon le niveau de revenus des habitants, un taux élevé n’implique pas systématiquement d’importantes ressources pour les communes.

Quelle conséquence pour les résidents des villes concernées ?

Pour les particuliers, la hausse du taux d’imposition communal ou intercommunal a une double incidence : augmenter la taxe d’habitation des 20% de foyers non concernés par l’exonération partielle, et limiter la réduction des ménages profitant du dégrèvement.

Pour rappel, le gouvernement a réaffirmé à maintes reprises sa volonté de supprimer cette taxe, y compris pour les 20% restants. Elle « sera supprimée en 2021, soit intégralement cette année-là, ou en deux fois, en 2021 et 2022 », a précisé Gérald Darmanin la semaine passée. Selon les chiffres de la Direction générale des finances publiques (Dgfip), près de 30 millions de ménages ont reçu un avis de taxe d’habitation en 2017, un impôt qui a ainsi rapporté 22,5 milliards d’euros aux collectivités territoriales l’an passé.