Une mise au point cinglante, dans le vocabulaire certes polissé du gendarme de l'assurance, mais le rappel à l'ordre est clair et net : les assureurs, banques ou courtiers vendant de l'assurance vie ne doivent pas oublier leur devoir de conseil. Et surtout ne pas inciter leurs clients à investir leur épargne de précaution sur des fonds où l'argent n'est pas disponible immédiatement.

SCPI, fonds structurés ou autres supports en unités de compte (UC) affichant des promesses de rendement alléchantes : l'intérêt de ces fonds de l'assurance vie n'est en rien remis en cause. Mais ils ne doivent pas être proposés sans un conseil sérieux et personnalisé. Tel est, en résumé, le propos de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le gendarme de la banque et de l'assurance, dans un communiqué de presse diffusé ce mardi 3 mai : l'autorité adossée à la Banque de France « appelle les distributeurs de contrats d'assurance vie à mieux respecter le devoir de conseil auprès des clients financièrement fragiles ou en difficulté ».

Sous-entendu, certains distributeurs - mais le régulateur ne livre aucun indice sur quelle famille de distributeurs - ont clairement manqué à leur devoir de conseil en oubliant d'avertir des clients sujets aux difficultés financières sur les supports où il faut prévoir un délai pour débloquer son argent. Là encore, il faut lire entre les lignes de ce communiqué mais les fonds UC incriminés ressemblent notamment aux fonds immobiliers et SCPI, aux fonds structurés, mais aussi plus généralement aux contrats d'assurance vie aux frais d'entrée élevés.

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Des clients fragiles sans épargne de précaution

Certains contrats d'assurance vie « sont susceptibles d'aggraver leur situation financière, dès lors qu'ils ne disposent pas d'une épargne de précaution pour faire face à leurs besoins de trésorerie de court terme », écrit l'ACPR. Ces clients fragiles - qui vont au-delà de la définition retenue pour l'offre bancaire spécifique, explique l'ACPR à MoneyVox - « peuvent ainsi être exposés à des frais d'entrée et de gestion particulièrement pénalisants s'ils sont contraints de racheter rapidement leur contrat d'assurance vie par manque de liquidités, alors que ces contrats ont vocation à constituer une épargne stable de long terme ».

Sur les frais, l'ACPR a confirmé à MoneyVox qu'elle les considère comme « pénalisants » si le client doit retirer cette épargne « trop rapidement après la souscription ». En clair : l'épargne de précaution n'a pas à être investie sur un support prévoyant des frais d'entrée.

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Le gendarme de l'assurance insiste sur les fonds en UC, potentiellement rentables sur le long terme mais risqués à court terme : certains distributeurs ont vendu des supports risqués à des clients alors qu'ils n'étaient pas adaptés. En clair : ils n'avaient pas perçu le risque de perte en capital de ces supports en UC.

L'ACPR rappelle donc le b.a.-ba du devoir de conseil aux distributeurs d'assurance vie, autrement dit les banques, assureurs, courtiers ou fintechs. Ils doivent tenir compte de « l'éventuelle fragilité [de son client], de ses difficultés financières et de son niveau d'épargne liquide » ; et proposer un niveau de risque d'investissement adapté à « ses connaissances et expériences en matière financière ».

Ce communiqué n'évoque aucune sanction ni renforcement des contrôles mais l'ACPR se dit « particulièrement vigilante » à ce sujet. Traduction : ceci est une mise en garde publique avant de sévir.

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Le 21 avril dernier, cette fois aux côtés de l'Autorité des marchés financiers (AMF), l'ACPR avait déjà adressé un autre point de vigilance vis-à-vis des professionnels vendant des produits d'épargne en ligne, relevant « de nombreux cas de non-respect de la réglementation concernant l'information et le consentement éclairé du client ».

Epargne de précaution : 2 mois de revenus minimum sur un livret

Un petit matelas de 2 mois de salaire minimum, pour faire face à un coup dur financier, à conserver sur un livret d'épargne ou a minima sur votre compte courant : voilà la définition d'une épargne de précaution minimale. Le support idoine est l'indémodable Livret A ou, mieux, le Livret d'épargne populaire (LEP) si vous y avez accès. Une fois l'épargne de précaution constituée, vous pouvez investir l'esprit plus léger.

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