L'examen du budget 2024 en commission continue d'être compliqué pour le camp présidentiel, qui a vu des amendements de l'opposition et de son allié du MoDem adoptés contre l'avis du rapporteur général, notamment pour empêcher de recentrer le « prêt à taux zéro » sur les zones tendues.

Les votes en commission des Finances ont une valeur surtout symbolique puisque c'est le texte initial du projet de loi de finances (PLF) qui sera débattu dès mardi dans l'hémicycle. Mais les déconvenues des macronistes en commission pourraient inciter le gouvernement à déclencher rapidement l'arme constitutionnelle du 49.3, afin de faire adopter sans vote le texte, en écartant les amendements de son choix.

« Cela pousserait pour un 49.3 plus rapide »

« On a déjà une dizaine de paumes (défaites). Pragmatiquement, cela pousserait pour un 49.3 plus rapide », convient une source parlementaire macroniste, dans une Assemblée sans majorité absolue.

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Le PTZ, nouvelle source de débats en commission

Jeudi des amendements des oppositions mais aussi de députés MoDem et Renaissance ont supprimé une mesure du budget, qui recentre le dispositif « prêt à taux zéro » (PTZ) sur les zones « tendues ». « Cela va encore empêcher un certain nombre de personnes qui ont un souhait d'acquérir » un logement, a alerté Véronique Louwagie (LR).

« Il y a une mauvaise compréhension », a estimé le rapporteur général Jean-René Cazeneuve (Renaissance), assurant que le PTZ allait au final toucher 6 millions de bénéficiaires supplémentaires, à la faveur d'amendements au budget. « Nous ne touchons pas au PTZ pour le logement social (ni) sur l'ancien », a poursuivi le député, revendiquant en revanche le fait de resserrer le dispositif, pour le logement neuf, sur les zones tendues comme les grandes villes, notamment en raison du « prix du foncier ». « C'est une économie substantielle de ce budget », a également défendu Mathieu Lefèvre (Renaissance).

Mais les députés opposés à la mesure y voient une injustice pour les zones rurales, et un risque pour un marché du logement en crise. « C'est comme ça qu'on fabrique ce sentiment d'abandon », selon Christine Pirès Beaune (PS).

Plus grande taxation des rachats par les grandes entreprises de leurs propres actions ?

Un autre amendement MoDem a divisé la majorité. Le groupe centriste réclame une plus grande taxation des rachats par les grandes entreprises de leurs propres actions. Le MoDem relève que ces opérations ont « considérablement augmenté » et « servent en grande partie des objectifs de court terme »: à savoir « rémunérer les actionnaires en complément du versement de dividendes, soutenir le cours de la bourse ou encore augmenter le bénéfice par action ». Cela concernerait « les grandes entreprises cotées générant un milliard d'euros de chiffre d'affaires », a souligné le chef des députés MoDem Jean-Paul Mattei, membre de la majorité présidentielle.

Jean-René Cazeneuve (Renaissance) s'y est opposé, soulignant que le rachat d'actions n'est pas une pratique « condamnable ». « Ce qui est important pour nous, c'est le partage de la valeur. J'espère que le gouvernement viendra dans l'hémicycle avec une proposition de taxation » limitée aux entreprises qui ne « feraient pas ce partage de la valeur », a-t-il glissé.

Eric Coquerel, président LFI de la commission, a reproché au gouvernement de tenter de « réduire à peau de chagrin » les initiatives parlementaires. Dans la soirée les députés ont adopté des amendements identiques de Jean-René Cazeneuve et de députés Horizons et MoDem, afin de prolonger en 2024 la contribution sur la rente inframarginale des énergéticiens, soit une taxation sur des profits excédentaires, notamment en raison « de la forte volatilité des prix de l'électricité ».