Lorsqu'on est salarié, on sait combien on va toucher à chaque fin de mois. Mais pour les micro-entrepreneurs, c'est une autre histoire. Sur 1 000, 2 000 ou 5 000 euros de chiffre d'affaires encaissé, combien pouvez-vous vraiment verser sur votre compte personnel ?

C'est le nerf de la guerre. En France, la moitié des entreprises (49,5%) mettent la clé sous la porte en moins de 5 ans, selon l'Insee. Or, pour près d'un quart d'entre elles, la cessation d'activité survient suite à des problèmes de trésorerie.

Malgré une fiscalité et des obligations administratives simplifiées, les micro-entrepreneurs n'échappent pas à ce constat. Car gérer son argent lorsqu'on est indépendant, c'est loin d'être une partie de plaisir.

Et pour cause. Pas de salaire fixe. Ni de congés payés. Peu de cotisations pour la retraite. Et des charges qu'il n'est pas toujours facile d'anticiper. Alors quelle méthode appliquer pour mieux piloter le budget de votre micro-entreprise ?

Étape 1 : estimer votre chiffre d'affaire

« La première étape, c'est d'avoir une vision claire de vos revenus », estime Théau de Maupeou, ancien freelance et responsable du contenu chez Shine, le compte pro des entreprises et des indépendants. Et pour cela, le mieux c'est encore d'avoir deux comptes bancaires. Un pour vos finances personnelles, et un pour votre micro-entreprise.

« D'après la loi, l'ouverture d'un compte en banque dédié à votre micro-entreprise n'est obligatoire que si votre chiffre d'affaires dépasse 10 000 euros pendant deux années civiles consécutives », rappelle Théau de Maupeou. « Toutefois nous conseillons à tous les indépendants d'ouvrir un compte pour leur entreprise ».

Le but ? Maintenir une séparation stricte entre vos revenus personnels et professionnels, pour obtenir une meilleure visibilité sur la santé financière de votre petite entreprise. « Pour aller plus loin, vous pouvez aussi réaliser un rapide bilan prévisionnel au début de chaque trimestre », reprend Théau de Maupeou.

L'exercice prend moins de 10 minutes. Regardez votre nombre de clients, passés et actuels, votre carnet de commande, vos missions en cours, et tentez de vous projeter sur les trois prochains mois. Quel chiffre d'affaires pensez-vous générer ? « Ce bilan est également l'occasion de planifier vos éventuelles vacances », indique Théau de Maupeou.

Puis, à la fin de chaque mois, faites le point sur vos revenus. Où en êtes-vous par rapport à l'objectif que vous aviez fixé en début de semestre ? Combien avez-vous gagné ce mois-ci ? Avez-vous des factures en attente ? Armé de ces éléments, vous aurez (enfin) une vision claire sur l'argent qui rentre dans les caisses de votre petite entreprise.

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Étape 2 : provisionner vos charges fiscales

Mais connaître votre chiffre d'affaires ne suffit pas. Et si vous transférez chaque euro encaissé vers votre compte personnel, vous allez au devant d'une mauvaise surprise. Car pour gérer votre budget, il faut penser à vos revenus, mais aussi à vos charges. Or ces dernières peuvent prendre plusieurs formes.

Il y a d'abord les cotisations sociales, dont vous êtes redevable aux Urssaf tous les mois ou tous les trois mois. Ces cotisations (allocations familiales, invalidité-décès, assurance maladie-maternité...) s'élèvent à 12,3% si vous faites de la vente de marchandises ou si vous proposez des prestations d'hébergement, et 21,2% dans les autres cas.

À cela, vient s'ajouter la taxe pour la contribution à la formation professionnelle, dont le montant représente 0,1% si vous êtes commerçant, 0,2% pour les professionnels libéraux et les prestations de services, et 0,3% pour les artisans. Plusieurs outils, comme Shine ou Freebe, calculent automatiquement ces charges, et vous indiquent le montant à provisionner.

Dernier point : les impôts. « Trop souvent, les indépendants s'imaginent que leur seule obligation fiscale consiste à payer leurs cotisations sociales », indique Théau de Maupeou. « Mais c'est oublier qu'ils sont également assujettis à l'impôt sur le revenu, ainsi qu'à la cotisation foncière des entreprises ».

Son conseil ? « Prenez le temps de calculer le montant de vos charges fiscales (cotisations sociales + impôts), et mettez cet argent de côté pour ne pas être pris au dépourvu lorsque le fisc viendra chercher son dû. À titre indicatif, cela représente souvent environ 35% de votre chiffre d'affaires, même si ce montant dépend bien sûr de votre situation ».

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Étape 3 : déduire vos coûts de fonctionnement

Pour compléter ce panorama de vos dépenses, il faut également prendre en compte vos autres postes de dépense. Quels sont les outils que vous utilisez dans le cadre de votre entreprise ? Et combien ces derniers vous coûtent-ils ? Assurance, abonnements à des logiciels pros, coworking... Listez toutes les dépenses liées à votre activité professionnelle.

« Pour aller plus loin, vous pouvez aussi calculer le coût d'amortissement de votre matériel, comme votre ordinateur, et épargner une fraction de ce montant tous les mois pour éviter de devoir sortir toute la somme d'un seul coup lorsqu'il faudra le remplacer », recommande Théau de Maupeou.

Afin de savoir quel salaire vous allez pouvoir vous verser, il vous suffit ensuite de prendre votre chiffre d'affaires, et d'en soustraire vos charges fiscales, puis vos coûts de fonctionnement et vos frais d'amortissement. Vous obtenez alors votre revenu réel. Mais il est encore trop tôt pour dépenser cet argent.

Car, pour bien faire, une partie de ces revenus devrait alimenter votre trésorerie. Et ce pour plusieurs raisons. À commencer par les aléas de la vie. « Pour vous prémunir contre les imprévus (accident, maladie, baisse d'activité...), assurez-vous de conserver au moins 3 mois de salaire sur un livret d'épargne ou un compte courant », appuie Théau de Maupeou.

Veillez également à mettre un peu d'argent de côté chaque mois pour préparer votre retraite. Sans oublier de financer vos vacances. « Ce n'est pas parce qu'on est à son compte qu'il ne faut pas prévoir de vacances. Sinon on prend le risque d'exploser en plein vol », termine Théau de Maupeou.

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