Le comité de suivi du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) qui devra vérifier si ce dispositif « répond bien au problème pour lequel il a été créé » a tenu jeudi sa première réunion, a annoncé son président Jean Pisani-Ferry.

« Le CICE est controversé », a admis M. Pisani-Ferry à l'issue de la première réunion de ce comité créé en même temps que ce crédit d'impôt de 20 milliards d'euros par an calculé sur la masse salariale des employés rémunérés entre 1 et 2,5 Smic. L'économiste faisait allusion entre autres aux critiques concernant le ciblage de cet avantage fiscal, qui exclut les hauts salaires et donc la partie de l'industrie située sur les secteurs de technologies avancées en concurrence avec leurs homologues allemandes ou japonaises, tandis qu'une entreprise non exposée à la concurrence internationale telle que La Poste est un des plus grands bénéficiaires.

Il évoquait également des témoignages de « racket » de ce crédit d'impôt par des grands groupes qui exigent de leurs fournisseurs de le répercuter sur leurs prix. « Il y a des questions de ciblage, de comportement des entreprises - vont-elles l'utiliser pour créer des emplois, pour investir ? - des questions sur les relations inter-entreprises - ce qu'on a appelé le racket - sur ce que cela va impliquer pour la dynamique des salaires du fait de l'effet de seuil », a-t-il énuméré. « Cela prendra du temps » parce qu'il faudra d'abord que les comportements des entreprises se modifient sous l'effet du CICE puis que des données soient accessibles, a-t-il expliqué, en précisant que de premiers éléments seraient donnés fin septembre. « Ensuite, cela nourrira une discussion pour déterminer si ce dispositif est bien calibré, mal calibré, s'il faut le réformer, s'il faut le supprimer, s'il faut l'amplifier », a-t-il déclaré.

L'un des buts affichés de ce crédit d'impôt introduit en début d'année est de rendre plus compétitive l'industrie française afin d'encourager le maintien dans l'Hexagone de sites de production et l'installation d'usines par des étrangers. L'autre est de favoriser directement l'emploi. Il couvre « environ un peu plus de trois quarts des salariés de l'industrie » et 22% de la somme totale de 20 milliards d'euros par an reviendront à l'industrie, qui représente 17% de la valeur ajoutée dans l'économie du pays, a précisé l'économiste. « Tous les secteurs à forte composante d'ingénierie de travail très qualifié ne sont pas du tout couverts », a souligné M. Pisani-Ferry. « En quoi cela va modifier la structure sectorielle des exportations, est-ce que cela va favoriser des secteurs qui sont moins intensifs en recherche et développement ? Ce sont tout à fait de bonnes questions à se poser », a-t-il fait remarquer.

Le comité est composé de huit représentants des partenaires sociaux (CFDT, CFE-CGC, Medef, UPA, CGT, CFTC, CGT-FO, CGPME), de huit membres des administrations dont le Directeur général des Finances publiques, Bruno Bézard, un représentant de l'Institut national des statistiques et des études économiques (Insee) et le directeur général du Trésor, Ramon Fernandez. En font également partie deux experts ainsi qu'un représentant de la Banque de France et un responsable de l'Agence centrale des Organismes de Sécurité sociale (Acoss). Les évaluations complexes des effets de cette mesure phare du gouvernement seront sous-traitées à des équipes de recherche.