L'Assemblée nationale a rejeté dans la nuit de mardi à mercredi la motion de censure de gauche ainsi que la motion de censure de la droite contre le gouvernement. Par conséquent, les députés adoptent du même coup en première lecture le projet de réforme des retraites, selon la procédure du 49-3.

La motion de la gauche a recueilli 91 voix, largement en dessous des 289 voix - la majorité absolue des députés - qui auraient été nécessaires pour renverser le gouvernement d'Edouard Philippe, a annoncé au perchoir le président de l'Assemblée Richard Ferrand (LREM). Une motion de la droite avait récolté plus tôt 148 voix. Plus tôt, une première motion, celle présentée par la droite, a recueilli 148 voix. Ce total est là encore largement inférieur aux 289 voix nécessaires pour renverser le gouvernement.

Texte examiné au Sénat en avril

En vertu de l'article 49-3 de la Constitution, le projet de loi instituant un « système universel de retraite », porté durant deux semaines dans l'hémicycle par le secrétaire d'Etat aux Retraites Laurent Pietraszewski, est donc adopté en première lecture. Le texte va partir au Sénat, qui doit l'examiner en avril, en vue d'une adoption définitive d'ici l'été.

« Vous avez fracturé le pays »

Défendant la motion commune PCF-LFI-PS, le communiste André Chassaigne avait dans l'après-midi fustigé un « désastre démocratique », après le recours à l'arme « funeste » du 49-3. « Vous avez fracturé le pays », avait renchéri la socialiste Valérie Rabault, tandis que Jean-Luc Mélenchon (LFI) taclait un 49-3 « décidé sournoisement », promettant la poursuite d'une « guérilla populaire et parlementaire, pacifique ». Les députés RN avaient prévu de voter la motion de gauche, de même qu'une majorité du groupe Libertés et territoires. La députée apparentée LREM Albane Gaillot, qui s'était mise en retrait du groupe majoritaire en septembre 2019, s'est également prononcée pour. « Mon vote n'est pas un vote de censure ou de sanction du gouvernement, il est un vote contre le 49-3 », a-t-elle précisé dans un communiqué.

Les élus LR n'ont pas joint leurs voix à celles de la gauche, ne voulant « pas de confusion avec ceux qui sont dans le blocage, l'obstruction et le déni de réalité », selon les mots de leur patron Damien Abad.

Un « fiasco parlementaire sans précédent »

Pour soutenir sa motion, présentée plus tôt, le président des députés LR Damien Abad avait demandé plus tôt la censure pour sanctionner un « fiasco parlementaire sans précédent » sur cette réforme qui fera des Français les « grands perdants » et pour laquelle le Premier ministre a actionné le 49-3. Aux voix LR se sont ajoutées notamment celles des Insoumis, bien qu'en « désaccord complet » avec les propositions de la droite, notamment d'un recul de l'âge de départ à la retraite. Mais « tous les moyens légaux, pacifiques, sont bons pour dire non à ce gouvernement, à ce président », a justifié leur orateur François Ruffin.

Même si le 49-3 était inédit pour lui, ce n'était pas la première fois qu'Edouard Philippe faisait face à l'exercice de la censure. Une motion de gauche dans le cadre de la crise des « gilets jaunes » avait fin 2018 recueilli 70 voix, et des motions de droite et de gauche à la suite de l'affaire Benalla l'été précédent 143 et 74 voix respectivement.