Edouard Philippe est prêt à retirer l'âge pivot de 64 ans du projet de réforme des retraites mais sous conditions

L'exécutif veut y voir un tournant dans le conflit social prolongé contre la réforme des retraites. « Je suis disposé à retirer du projet de loi la mesure de court terme que j'avais proposée, consistant à converger progressivement à partir de 2022 vers un âge d'équilibre de 64 ans en 2027 », a indiqué le Premier ministre samedi, tout en maintenant le principe d'un âge d'équilibre dans le futur système universel par points.

Ce retrait est sous conditions : le Premier ministre propose qu'une « conférence de financement » soit réunie avec les partenaires sociaux pour « proposer les mesures permettant d'atteindre l'équilibre financier en 2027 ». Faute d'accord de cette conférence d'ici « la fin du mois d'avril 2020 », le gouvernement prendra par ordonnance les mesures nécessaires pour atteindre cet équilibre en 2027.

« Ce qui compte, ce n’est pas l’instrument, c’est l’objectif »

« J’ai toujours dit et je pense toujours à titre personnel que l’âge pivot est la meilleure façon de garantir le retour à l’équilibre du système actuel et la pérennité et l’équilibre financier du système futur. Mais les organisations syndicales et les organisations patronales se sont mises d’accord dans le respect d’un calendrier que je souhaitais pour me faire des propositions pour revenir à l’équilibre. Ce qui compte, ce n’est pas l’instrument, c’est l’objectif, c’est l’équilibre dès lors qu’ils admettent eux-mêmes », a expliqué dimanche soir sur France 2 Edouard Philippe, renvoyant à la conférence de financement qu’il a proposée.

La CFDT, premier syndicat en France et favorable au système universel par points, avait fait une « ligne rouge » de cet âge pivot incitant les Français à partir à 64 ans en 2027 sous peine de se voir infliger un malus. Dès l'annonce du gouvernement, la centrale a « salué » son retrait du projet de loi, « qui marque la volonté de compromis » de l'exécutif, indiquant qu'elle s'inscrira « dans la conférence de financement dont elle a proposé le principe ».

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« Le retrait de l'âge pivot est une bonne chose qui permet de discuter sereinement de l'équilibre », a abondé le secrétaire général de l'Unsa, Laurent Escure. Analyse similaire à la CFTC. Le Medef de son côté s'est dit satisfait et prêt à participer « pleinement » à la conférence de financement. Les autres organisations patronales, CPME et U2P, ont également salué la lettre du Premier ministre.

Un retrait très critiqué

Du côté de FO et de la CGT en revanche, on continue à réclamer le retrait de la réforme. D'ailleurs, l'intersyndicale a appelé à une nouvelle journée interprofessionnelle de grèves et manifestations le 16 janvier. Mais l'exécutif espère bien avoir lézardé définitivement le front syndical, au 40e jour de la mobilisation.

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Souvent critique ces derniers jours, l'aile gauche de la majorité, soucieuse de voir le gouvernement renouer rapidement avec la CFDT, a salué cette fois « une avancée majeure », à l'image du député marcheur Sacha Houlié. L'opposition en revanche, s'est montrée beaucoup moins convaincue. « L'âge pivot n'existait que pour pouvoir être retiré et faire passer la pilule d'une réforme qui précarisera des millions de retraités », a fustigé Marine Le Pen, dénonçant une « manipulation cousue de fil blanc ». A gauche, Olivier Faure (PS), Jean-Luc Mélenchon (LFI) et Fabien Roussel (PCF) ont de nouveau réclamé le retrait pur et simple du projet de loi qui doit être présenté en Conseil des ministres le 24 janvier avant d'être discuté à l'Assemblée à partir du 17 février, pour une adoption prévue pour l'été.

Dans les rangs de la droite, on a insisté sur « l'abandon de l'équilibre budgétaire » qui fera que « les Français auront eu les grèves sans la réforme », selon Aurélien Pradié, le N.3 du parti Les Républicains. « Tout ça pour ça ! C'est un faux semblant de réforme », a estimé Bruno Retailleau, chef de file des sénateurs LR. « La droite hurle au renoncement. La gauche hurle à l'entêtement. C'est donc que l'accord est bon », a tranché le député LREM Olivier Véran.

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