Passé de 70 000 à près de 28 000 dollars en deux ans, le bitcoin, considéré par certains comme une opportunité, est vu comme un danger par ses détracteurs. Pourtant, différentes annonces faites ces dernières semaines laissent à penser que le bitcoin pourrait bientôt devenir un produit d'épargne comme un autre pour les investisseurs.

69 992 dollars en novembre 2021, puis la chute. Après avoir frôlé les 15 000 dollars en novembre 2022, le bitcoin s'échange désormais à près de 28 000 dollars en ce début octobre 2023. Une bouffée d'air pour les investisseurs ayant misé sur la reine des cryptomonnaies, cependant encore loin de ses sommets. Alors, faut-il encore croire dans le bitcoin ou succomber aux sirènes de ses détracteurs qui n'y voient qu'une arnaque plus ou moins sophistiquée ? Plus important encore, le bitcoin est-il un bon produit d'épargne ?

« Le bitcoin reste un actif volatil. Mais si on regarde en 2019, il était à 4 000 dollars. Aujourd'hui, certains disent que le bitcoin est mort, mais il est tout de même à 28 000 dollars, détaille Pierre-Yves Dittlot, fondateur de Ledgity, première plateforme crypto patrimoniale. On voit quand même une certaine résilience, malgré les scandales que l'on a pu voir ces derniers temps. » En effet, les derniers mois ont été agités pour les cryptomonnaies.

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L'effondrement de la cryptomonnaie Terra en mai 2022, puis la faillite en novembre de la même année de FTX, la 3e place d'échanges de cryptomonnaies, ont fragilisé l'écosystème. Pourtant, le bitcoin semble garder la confiance des investisseurs. « Les plus grosses pertes des derniers mois pour les investisseurs crypto ne sont pas dues à la volatilité des cryptoactifs mais à des escroqueries ou à des fraudes. On retrouve les mêmes fraudes que l'on a pu voir dans la finance traditionnelle, mais sur les actifs numériques », analyse Pierre-Yves Dittlot.

Vers une adoption de masse du bitcoin ?

« Même si la faillite de FTX a été un cataclysme pour l'écosystème en termes de perte de confiance, cela n'a pas décrédibilisé le bitcoin. Cet épisode a surtout montré qu'il est très important d'éviter de passer par un tiers et qu'il vaut mieux posséder ses cryptoactifs sur une clé privée », confirme Jonathan Herscovici, fondateur de Stackinsat.

Comment expliquer cette résilience du bitcoin dans une période où de nombreux cryptoactifs ont plongé, parfois jusqu'à l'extinction ? « Contrairement à de nombreux autres tokens, le bitcoin a une réelle utilité, juge le fondateur de Stackinsat. Si, en France et en Europe, le bitcoin est une réserve de valeur et un moyen d'épargne à long terme, dans certains pays en développement, le bitcoin est une monnaie et un moyen de paiement. Or, selon moi, l'adoption du bitcoin dans les pays émergents est la clé à long terme de sa valeur. »

Tout le monde n'est cependant pas aussi catégorique quant à l'utilité du bitcoin. « Aujourd'hui, il y a peu de cas d'usage vraiment fonctionnels, tempère Mickaël Hilbé, co-fondateur du site Mon-Placement.fr. Même les pays qui ont essayé de l'adopter comme monnaie semblent en revenir, ça reste un pur produit spéculatif. J'ai du mal à voir ce qu'on peut faire concrètement avec le bitcoin aujourd'hui, quelle création de richesse il peut y avoir derrière. »

Une vision encore partagée par énormément d'observateurs. C'est pourquoi l'avenir de bitcoin ne pourra s'écrire qu'avec une adoption de masse. « Le problème du bitcoin aujourd'hui c'est qu'il est encore méconnu, concède Jonathan Herscovici. Il n'y a pas eu d'élément déclencheur qui a provoqué une adoption de masse. Aujourd'hui, la majorité des gens placent leur argent sur des produits proposés par les banques ou par des fonds comme BlackRock. »

« Demain, il sera peut-être possible de détenir du bitcoin sur son assurance vie »

Mais la donne pourrait bientôt changer. « Aujourd'hui, il y a un frein d'adoption car ce n'est pas encore un produit qui est accessible par les canaux traditionnels de l'industrie financière. Mais on voit une institutionnalisation du bitcoin, développe Pierre-Yves Dittlot. Aux États-Unis, plusieurs grandes institutions financières, dont BlackRock, ont déposé des demandes d'ETF Bitcoin auprès du régulateur américain. Ça veut dire qu'on se dirige vers une financiarisation du bitcoin dans un ETF qui est un produit financier assez traditionnel. Demain, il sera peut-être possible de détenir du bitcoin sur son assurance vie, et cela peut entraîner une adoption massive. »

Il faudra cependant attendre de voir à quoi ressemble réellement ces produits, à en croire Mickaël Hilbé : « La création d'un ETF est une bonne idée pour un investisseur qui voudrait s'exposer sur le bitcoin. Mais je ne sais pas si cela montre une institutionnalisation. Le marché du bitcoin, c'est vraiment un petit marché si on le compare aux marchés des capitaux dans son ensemble. Est-ce qu'on est face à une institutionnalisation ou est-ce que c'est une manière pour certaines institutions de faire un coup un peu marketing, je me pose la question. »

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L'autre facteur favorable au bitcoin viendrait de sa législation, de plus en plus encadrée. La mise en place du PSAN (dispositif ayant pour objet la régulation du marché lié aux devises numériques, NDLR) encadre l'écosystème. Et en 2024, le règlement européen sur les marchés de cryptoactifs (« Markets in Crypto-Assets » ou « MiCA ») devrait renforcer la transparence et protéger les investisseurs, tout en harmonisant la réglementation au niveau européen.

« Tout cela va avoir un impact positif en termes d'adoption. Sans règles claires et sans cadre strict, c'est impossible, assure Pierre-Yves Dittlot. La majorité de l'épargne est entre les mains de personnes entre 40 et 80 ans. Ces personnes-là ont besoin d'un cadre sécurisé pour être rassurées et déployer une partie de leur épargne sur cette nouvelle classe d'actifs. » Et les clients rencontrés par Mickaël Hilbé confirment ce besoin d'être rassurés : « On avait une demande assez régulière dans la période d'effervescence bitcoin, des clients nous posaient des questions, confirme le co-fondateur de Mon-Placement.fr. Aujourd'hui, on a beaucoup moins de demande. Ça reviendra peut-être, mais comme les cours ont beaucoup baissé, l'intérêt a diminué en proportion. »

Bitcoin, désormais un actif comme un autre ?

Néanmoins, la mise en place d'un cadre législatif et la démocratisation du bitcoin à grande échelle pourraient être des leviers importants pour son prix. Mais sa valeur tient aussi dans son nombre défini à l'avance : 21 millions d'unités, pas une de plus. « Si l'usage augmente, que la demande augmente et que le bitcoin devient plus rare, sa valeur devrait repartir à la hausse », analyse Jonathan Herscovici.

Faut-il alors investir dans le bitcoin ? « On ne va pas, aujourd'hui, amener la thématique crypto dans notre conseil, car on n'y croit pas assez, explique Mickaël Hilbé. Si un de nos clients veut le faire, on ne va pas l'en dissuader, mais on conseillera de ne s'exposer que faiblement, avec une petite partie de son épargne car aujourd'hui, le bitcoin reste pour nous bien trop spéculatif ».

En revanche, pour le fondateur de Stackinsat, la réponse est oui. « Son utilité ne fait que progresser, et le potentiel de progression est encore énorme. Il y a de plus en plus de gens qui l'utilisent . » Attention cependant, si les cryptoactifs peuvent être un moyen de diversifier son épargne, ils restent un produit soumis à une importante volatilité. Néanmoins, il est possible de limiter les risques, notamment en pratiquant une stratégie DCA (pour Dollar Cost Averaging, NDLR) qui permet de lisser les points d'entrée en investissant la même somme régulièrement sur un temps donné, afin de gommer les fluctuations de prix.

« Il faut voir le bitcoin sur un horizon long terme, conclut Jonathan Herscovici. Celui qui cherche à acheter du bitcoin pour devenir riche demain se trompe. Il faut vraiment dissocier bitcoin des autres cryptoactifs car le bitcoin a une vraie utilité aujourd'hui et encore plus dans le futur. C'est pour ça que je pense que son prix va suivre sur le long terme. »

Alors, le bitcoin est-il l'or de demain ? Une chose est sûre : il y a « une tendance d'intégrer le bitcoin dans le patrimoine, soutient Pierre-Yves Dittlot. Ce n'est plus une classe d'actifs complètement à part, dans laquelle on investirait comme on joue au poker en ligne. Le bitcoin commence à s'intégrer comme un actif à part entière dans le paysage patrimonial. »

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