En 2023, plus d'un salarié sur deux va être augmenté. Face à une inflation qui atteint des niveaux inédits au 21e siècle, les cabinets d'étude planchant sur le sujet sont unanimes : l'augmentation annuelle sera quasi généralisée, pour une hausse moyenne de 4%. Dans ce contexte, voici 5 conseils d'experts si vous vous apprêtez à négocier votre salaire pour 2023.

1 – Ne pas hésiter à demander une augmentation

Déjà, c'est la loi : « l'employeur est tenu d'engager chaque année une négociation sur les salaires effectifs, la durée effective et l'organisation du temps de travail ». Extrait de l'article L132-27 du Code du travail. Il s'applique aux entreprises où un délégué syndical a été désigné, procédure évidemment plus automatique dans les entreprises de plus de 50 salariés que dans les autres.

Dans les faits, cette année, à la vue de toutes les études d'opinion et sondages auprès des services ressources humaines, il n'y a clairement pas de raison d'avoir peur de poser la question de l'augmentation lors d'un entretien annuel. Car les hausses de salaire et les réclamations de employés seront bien plus systématiques qu'à l'accoutumée. « Plus de la moitié des salariés sondés (54%) envisage de demander une augmentation de salaire lors de l'entretien annuel de fin d'année, et 64% comptent le faire au cours de l'année 2023 », relève le cabinet de recrutement Robert Half à l'issue d'un sondage réalisé cet automne (1).

En cette année particulière, dans un contexte de forte inflation (6,2% selon l'Insee en novembre), qui a entraîné trois hausses de Smic en 2022, et quelques mois après le vote des lois pouvoir d'achat, certaines entreprises ont même pris les devants : « Il y a effectivement des sociétés où les négociations annuelles ont été avancées en 2022 face à l'inflation », témoigne Franck Chéron, associé chez Deloitte et spécialiste du conseil RH. Et si votre employeur n'a pas pris les devants, l'entretien annuel est effectivement un moment adéquat : « La seule obligation est l'existence d'une négociation annuelle, peu importe quand. Mais en effet le plus souvent les négociations se décident entre début décembre et début février. »

2 - L'inflation, un argument pour une hausse en 2023

« La hausse des salaires en proportion de l'inflation est la mesure que 78% des salariés souhaiteraient que leur employeur adopte afin de faire plus facilement face à l'augmentation des coûts », glisse le cabinet Robert Half, suite à son sondage. Mais seuls 22% des employeurs interrogés pour confectionner le « guide des salaires » annuels du cabinet « affirment qu'ils augmenteront leurs salariés proportionnellement à l'inflation en 2023 ».

Les 7% ou 10% de hausse, ce ne sera pas pour tout le monde, la hausse moyenne étant annoncée autour de 4% (ou légèrement plus) par les cabinets People Base CBM, Deloitte, Alixio ou WTW. Précision d'importance : Franck Chéron, de Deloitte, précise que les 4% d'augmentation représentent la hause globale de la masse salariale. « On estime à +3,5% les augmentations de salaires [sans] évolution de poste. »

Augmentation de salaire 2023 : combien pouvez-vous négocier face aux 6% d'inflation ?

3 - Savoir (à peu près) combien sont payés vos confrères ou collègues (même si « c'est tabou »)

Aïe. Combien sont payés vos collègues ? Ou vos confrères, travaillant dans d'autres entreprises à des postes similaires ? « En France, c'est tabou », regrette Jérôme Blanc, senior manager au cabinet de recrutement Robert Half. « Et connaître la rémunération d'un ami ou un collègue ne sera pas forcément représentatif. Nous sommes un groupe américain et aux États-Unis les rémunérations sont affichées. »

Alors... quelle solution, pour vouloir comparer efficacement votre rémunération ? Jérôme Blanc conseille a minima de consulter les « guides des salaires », comme celui édité par son groupe Robert Half, ou ceux d'autres cabinets (Robert Walters, Michael Page, etc.), ou encore l'outil proposé par Linkedin, entre autres.

Reste ensuite à vous renseigner sur les évolutions régionales et, surtout, sur les évolutions de votre secteur d'activité. Exemple, dans l'hôtellerie-restauration, les hausses n'ont pas attendu janvier 2013 : « La hausse en cours d'année 2022 s'explique par une négociation de branche, précise Franck Chéron, de Deloitte. Ils ont voté 8% et les employeurs ont le plus souvent augmenté les salaires de 10% à 15%. » Au-delà de ce cas particulier, « les secteurs de l'énergie, de la finance et de la pharmacie sont généralement ceux qui poussent le plus les augmentations, souligne Franck Chéron. C'est à nouveau le cas mais cette année c'est effectivement bien plus généralisé qu'à l'accoutumée. »

« A combien sont les offres pour des postes équivalents ? »

4 – Savoir combien vous voulez

Demander la lune (beaucoup plus que ce que vous espérez) ou rester les pieds sur terre ? « Il n'y a pas de bonne méthode, répond Jérôme Blanc. Le but est de ne pas être déçu à la fin. » En clair : savoir à combien vous voulez parvenir en fin de négociation, si négociation il y a lors de votre entretien annuel. Avoir un objectif précis en tête, sans le dévoiler, en demandant légèrement (et raisonnablement) un peu plus.

Salaire net : combien de salariés gagnent plus ou moins que vous ?

Alors, combien ? Tout dépend évidemment de votre évolution personnelle, des objectifs fixés l'an passé par vos supérieurs, etc. Existe-t-il, pour un poste donné, un « juste » salaire ? « Savoir combien l'on vaut, c'est la question à un million ! », reconnaît Jérôme Blanc, du cabinet de recrutement Robert Half. Il voit plusieurs manières d'y répondre, et parmi elles : « Etes-vous bien dans vos baskets ? Avec trois éléments clés : la rémunération, la charge de travail et l'équilibre avec la vie personnelle. Enfin, la meilleure manière de savoir combien l'on vaut c'est ‘‘à combien est-on chassé ?'' ou ‘‘à combien sont les offres pour des postes équivalents ?''. »

5 - Ne pas oublier les à-côtés

« Il est impossible de tout mesurer mais les 4% [de hausse globale prévue en 2023] n'intègrent pas la prime Macron et l'épargne salariale ou les autres avantages sociaux », pointe Franck Chéron, de Deloitte.

Le rachat de RTT ? Le même cabinet estime que moins d'une entreprise sur deux compte accorder de rachat de RTT à ses salariés. La prime Macron revue et corrigée ? 48% des entreprises prévoient un versement en 2023 selon sa dernière enquête « budgets d'augmentation prévisionnels 2023 » (2). Les tickets resto réhaussés ? « 62% des répondants ont mis en place les titres restaurant. Parmi eux, 30% prévoient de revaloriser leur montant pour une moyenne de 9,10 euros soit une hausse de 30 centimes par rapport aux montants observés en 2022. » Et enfin le forfait mobilités durables ? Seul un peu plus d'un tiers des entreprises interrogées l'ont instauré mais Deloitte affirme que 27% des sociétés non équipées de ce forfait prévoient de l'intégrer à leurs négociations annuelles.

Primes, télétravail, ticket resto, transport... Ce qu'il faut négocier (en plus du salaire)

(1) « Sondage en ligne réalisé le 17 novembre 2022 auprès d'un panel représentatif de 1 000 salariés français de 18 à 55 ans ».

(2) L'étude NAO de Deloitte étude « repose sur un panel de 300 entreprises et plus d'un million de données individuelles de rémunération au sein des principaux secteurs d'activité ».