La ministre de l'Economie Christine Lagarde a pris à plusieurs reprises des décisions contraires à l'avis des services de Bercy dans le règlement de l'affaire Tapie/Crédit Lyonnais, affirme le Canard enchaîné mercredi en s'appuyant sur un rapport de la Cour des comptes.

Selon l'hebdomadaire, la Cour épingle notamment le choix en 2007 d'une procédure d'arbitrage pour trancher le contentieux, jugé « contraire aux intérêts » de la puissance publique par l'Agence des participations de l'Etat (APE) citée dans le rapport. Le document relève aussi l'absence de recours après la condamnation du Consortium de réalisation (CDR, gérant le passif du Lyonnais) par un tribunal arbitral en juillet 2008 à verser 240 millions d'euros à M. Tapie, plus d'une centaine de millions d'intérêts et 45 millions pour préjudice moral.

Lagarde toujours sous la menace d'une enquête pour abus d'autorité

« On pourrait toutefois considérer que l'ampleur exceptionnelle de la condamnation (...) justifie en tout état de cause de former un recours en annulation, même si celui-ci a de faibles chances d'aboutir », avait écrit à l'époque l'APE, dans une note reprise par le rapport dont le Canard enchaîné publie l'extrait en fac-similé. « Pour nous, il n'y a franchement rien de nouveau », a réagi l'entourage de Mme Lagarde, interrogé par l'AFP. « Ce rapport a fait l'objet d'une lettre du premier président de la Cour des comptes au Premier ministre, qui lui a répondu. Tous les documents sont disponibles sur le site de l'Assemblée nationale », a-t-on ajouté de même source.

Début avril, LeFigaro.fr avait fait état de plusieurs « rapports confidentiels remis fin février », dans lesquels la Cour des comptes jugeait « incertaine » la « validité juridique » de la procédure d'arbitrage et relevait de « sérieux dysfonctionnements » dans le règlement de l'affaire Tapie. Dans celui mis en avant mercredi par le Canard enchaîné, la Cour, citée par l'hebdomadaire, estime qu'« il était nécessaire de s'assurer par toutes les voies appropriées, y compris par la consultation du Conseil d'Etat, que le CDR était habilité à recourir à l'arbitrage ».

Cible des attaques des députés socialistes pour sa gestion du règlement de l'affaire Tapie, Christine Lagarde est menacée d'une enquête pour abus d'autorité, dont le procureur général près la Cour de Cassation, Jean-Louis Nadal, a demandé le 10 mai l'ouverture à la Cour de justice de la République.