Apple Pay, Orange Cash, Visa HCE, Flash’n’Pay d’Auchan : les annonces de lancement de solutions de paiement par mobile se multiplient ces derniers temps, sur un marché laissé libre, ou presque, par les banques françaises. Toutes devraient être utilisables dès 2015. Mais les usagers vont-ils suivre ?

Cela fait maintenant plusieurs années que le secteur bancaire français travaille à permettre à ses clients de payer sans contact avec leur mobile dans les commerces physiques. Depuis 2008, les trois principaux opérateurs téléphoniques (Orange, Bouygues et SFR) et quelques grandes enseignes (BNP Paribas, Crédit Mutuel-CIC, Société Générale) sont par exemple rassemblés au sein d’une association, l’AFSCM (Association française du sans contact mobile), dont l’objectif est à la fois de promouvoir cette technologie et de trouver des règles de fonctionnement communes aux différents acteurs du secteur.

Le résultat de cet activisme apparaît, pour l’instant, très limité. Malgré un parc de plus de 7 millions de mobiles compatibles (1) et après quatre années d’expérimentation à Nice, Caen ou Strasbourg, les usagers restent rares. Qui, en effet, a entendu parler de Kix, le service de BNP Paribas, ou de la M-Carte du Crédit Mutuel-CIC ? Faute de volonté, de promotion ou d’intérêt des usagers, les banques françaises ont laissé le champ du paiement mobile quasi-libre. Et certains acteurs, parfois non-bancaires, semblent prêts à en profiter.

Apple Pay change la donne

Le 9 septembre dernier, à l’occasion de la présentation de son nouveau smartphone, Apple annonçait le lancement de son propre service de paiement mobile, baptisé Pay. Une rupture, tant l’arrivée du géant américain sur ce marché était attendue par certains, redoutée par d’autres. Tous s’accordent sur un point : elle est de nature à faire décoller les usages du paiement mobile. La preuve : depuis le lancement de Pay, la solution de paiement mobile du concurrent Google, baptisée Wallet, a, selon le site Ars Technica [lien en anglais], doublé son nombre d’inscriptions.

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Dans l’immédiat, Apple Pay n’a été lancé qu’aux Etats-Unis, avec un certain succès : un million de cartes bancaires connectées au service en trois jours, sans doute beaucoup plus actuellement. Si Apple n’a encore confirmé aucune date, Pay devrait être déployé en Europe dans le courant de l’année 2015. La solution, toutefois, n’est accessible qu’aux possesseurs d’un iPhone 6, le dernier smartphone à la pomme, ce qui limite dans l’immédiat son rayonnement.

Orange et Auchan ont pris les devants

Les acteurs français, en tout cas, sont prévenus. Et certains ont pris les devants. L’opérateur Orange propose déjà son propre service, baptisé Orange Cash, dans cinq villes françaises : Caen, Strasbourg et depuis peu Rennes, Nice et Lille. Le déploiement devrait se poursuivre en 2015. Mais le service est assez contraignant. Il nécessite de disposer d’un mobile compatible (et tous ne le sont pas, loin de là), d’une carte SIM compatible et d’aller en agence installer une application dédiée.

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Autre initiative : celle du groupe de grande distribution Auchan, qui teste actuellement, pour une généralisation en 2015, une solution de paiement baptisée Flash’n’Pay. Contrairement aux autres, elle n’utilise pas la technologie NFC, mais le QR Code, moins pratique. Le groupe, propriétaire des hypermarchés du même nom mais qui possède aussi des intérêts dans Leroy-Merlin, Décathlon, Kiabi, Norauto, Boulanger, Alinéa, etc., peut toutefois compter sur sa puissance commerciale pour imposer sa solution.

Visa en première ligne de la fronde anti-Apple

Un autre acteur semble encore mieux placé pour contrer Apple. Il s’agit de Visa, gestionnaire du premier réseau d’acceptation de cartes bancaires au monde. Visa Europe vient en effet d’annoncer le lancement en 2015 d’une nouvelle solution de paiement mobile dont le fonctionnement ressemble beaucoup à celui d’Apple Pay, à ceci près qu’il n’est destiné qu’aux mobiles fonctionnant sous Android, l’OS mobile développé par Google.

Comme Apple Pay, cette technologie, baptisée HCE (pour Host Card Emulator), utilise pour l’authentification du paiement un « jeton » numérique à usage unique, qui permet d’éviter de faire transiter les données bancaires entre l’usager et le commerçant. Ces dernières ne sont pas stockées dans la mémoire du téléphone (contrairement à la solution d’Apple) mais dans un « cloud sécurisé ». La solution de Visa paraît par ailleurs plus ouverte que celle d’Apple : les banques qui le souhaiteraient peuvent proposer l’application « telle quelle ou l’intégrer à une application déjà existante (telle que banque en ligne, e-wallet) », explique un communiqué de l’opérateur. Elle sera disponible au cours du premier trimestre 2015.

Comment les usagers vont-ils réagir face à ces annonces ? Vont-ils être tentés de tester le paiement mobile, ou au contraire découragés face à la multiplication et l’éparpillement des services ? On devrait sans doute y voir plus clair à la fin 2015.

(1) Source : Observatoire du NFC et du sans-contact