Malgré l'inflation, les Français mettent toujours beaucoup d'argent de côté. Le taux d'épargne est d'ailleurs nettement supérieur à celui enregistré avant la crise Covid. Explications.

Ce jeudi, l'Insee a présenté sa dernière note de conjoncture. Et parmi les sujets évoqués, il y a eu l'inflation avec son impact sur le taux du LEP et sur une éventuelle hausse automatique du Smic, mais aussi la question du taux d'épargne des ménages.

Cet indicateur établit le rapport entre ce que les Français épargnent et leurs revenus disponibles bruts. Et il devrait ressortir à 18,1% en 2023. Même si ce taux d'épargne est logiquement inférieur aux records supérieurs aux 20% enregistrés en 2020 durant la crise Covid, il reste largement plus élevé que ce qu'il était avant la crise sanitaire à 15%.

« Cela peut être étonnant, c'est plus élevé que ce que nous avions avant la crise »

« Oui cela peut être étonnant. 18% de l'épargne, c'est sensiblement plus élevé que ce que nous avions avant la crise. Cependant, concernant les indicateurs de consommation et de confiance de ménages, qui restent très dégradés, tout cela ne nous incite pas à avoir une prévision de consommation très dynamique », reconnaît Julien Pouget, le chef du département conjoncture de l'Insee.

Si les divers chèques exceptionnels versés en 2021 et 2022 par l'Etat pour faire face à la hausse des prix ont permis de protéger le pouvoir d'achat des ménages, celui-ci ayant même progressé de 0,2% l'an dernier, ces aides ont été nettement rabotées en 2023. Ce qui explique en partie pour quoi le taux d'épargne en 2023 sera supérieur au 17,5% enregistré en 2022.

« Le réflexe est de maintenir la valeur de son patrimoine »

Un taux d'épargne de 18,1% en 2023 donc qui ne surprend pas l'économiste Philippe Crevel : « En période d'inflation, le réflexe est de maintenir la valeur de son patrimoine. Les Français préfèrent réduire leur consommation que de puiser dans leur épargne, car ils anticipent les hausses de prix à venir. Cela témoigne de la persistance d'un fort niveau d'inquiétude. »

Selon la dernière enquête du Cercle de l'épargne publiée en avril, 65% des Français indiquent réduire leurs dépenses de consommation quand seulement 27% puisent dans leur épargne. Dans le même temps, 22% déclarent, en revanche, avoir accru leur effort d'épargne.

La hausse du taux du Livret A incite à épargner

Un effort d'épargne qui est renforcé par la hausse de la rémunération des produits d'épargne réglementés comme le Livret A et le LDDS dont le taux est à 3% depuis le 1er février et qui devrait être encore relevé au 1er août. Résultat, la collecte nette sur ces deux livrets a frisé les 30 milliards d'euros sur les quatre premiers mois de l'année.

Investissez dans l'immobilier dès 1 000 €. Notre palmarès des meilleures SCPI

Autre phénomène, selon Philippe Crevel, à avoir en tête pour expliquer ce niveau du taux d'épargne, le vieillissement de la population : « Le poids des personnes de plus de 45 ans au sein de la population augmente ; or ces tranches d'âge sont celles qui préparent financièrement leur retraite en épargnant. » Selon l'enquête du Cercle de l'Epargne, 72% des Français en âge de travailler estiment que leurs pensions ne suffiront pas pour vivre correctement et 59% mettent de l'argent de côté pour leur retraite.

Un taux d'épargne à relativiser

Mais comme le rappelle Julien Pouget, ce taux d'épargne de 18,1% est une moyenne « et donc il y a sans doute beaucoup de variabilité au sein des ménages. » En effet, tous les foyers n'ont pas les moyens d'économiser près d'un cinquième de ce qu'ils gagnent. Logiquement, plus on est riche, plus ce pourcentage augmente. Le taux d'épargne des 20% les plus aisés se rapproche des 30%.

Mais ces derniers pourraient être amenés à modifier leur comportement à la fin de l'année. « La baisse de l'inflation attendue au cours du second semestre devrait conduire les ménages à relâcher leurs efforts en matière d'épargne en se faisant davantage plaisir, anticipe Philippe Crevel. Les dépenses de consommation pourraient repartir alors à la hausse. »

Livret A : voici comment les banques et l'Etat utilisent votre argent