La Cour des comptes a dressé un bilan positif du plan de soutien au secteur bancaire français, qui a atteint, selon elle, ses objectifs immédiats, mais a émis plusieurs réserves, notamment quant à l'impact budgétaire pour l'Etat, selon un rapport publié jeudi.

« Le bilan que la Cour peut, à ce stade, tirer du plan de soutien aux établissements de crédit mis en place à l'automne 2008 est positif », selon le rapport, qui fait suite à un premier document d'étape publié fin juin 2009. Le plan a ainsi permis de stabiliser le système bancaire, de restaurer la confiance sur les marchés et de limiter les effets de la crise « qui aurait été plus durable et plus grave sans un soutien massif des banques », écrivent les auteurs du rapport.

Néanmoins, la Cour nuance ce constat en soulignant que si le dispositif doit générer un gain direct de 1,29 milliard d'euros pour le budget de l'Etat pour les années 2008 à 2010, des effets ultérieurs « sont susceptibles d'annuler complètement le résultat budgétaire à partir de l'année 2011 ».

Recettes ponctuelles, coûts permanents

En cause, le coût lié à l'endettement souscrit par l'Etat pour financer le plan (9,5 milliards d'euros environ), les dotations allouées à la banque publique Oséo pour soutenir le crédit aux entreprises et les conséquences de la décentralisation des fonds d'épargne. La réforme du Livret A a ainsi eu pour effet de permettre aux banques de conserver une partie des dépôts effectués sur ce produit alors qu'ils étaient jusqu'ici intégralement centralisés par la Caisse des dépôts. Cette mesure induit un manque à gagner pour l'Etat. 

« Si les concours publics génèrent des recettes ponctuelles, ils engendrent des coûts permanents », a déclaré le premier président de la Cour des comptes Didier Migaud, lors d'une conférence de presse. Le plan « ne rapportera vraisemblablement pas autant qu'on a pu l'afficher », a-t-il ajouté. « Si (le) bilan final devait faire apparaître un coût, rien ne s'opposerait alors à ce que les profits du secteur bancaire fassent l'objet d'un prélèvement ponctuel (...) destiné à compenser ce coût pour les finances publiques », considère l'institution.

5,8 milliards de manque à gagner pour l'Etat

La Cour formule également des réserves quant aux conditions de l'apport de fonds publics aux banques cotées BNP Paribas et Société Générale, par le biais de la Société de prises de participations de l'Etat (SPPE). La SPPE a apporté respectivement 5,1 et 1,7 milliards d'euros en souscrivant des actions dites de préférence (privées de droit de vote) à BNP Paribas et Société Générale au printemps 2009. Des actions qui ont été achetées à un prix unitaire « très bas », proche du cours de Bourse de ces deux banques à l'époque, dans un contexte de marché déprimé. « Il était donc conforme aux règles du marché d'en attendre une plus-value importante lors du rachat des titres par ces banques », écrit la Cour.

Mais la convention conclue entre l'Etat et ces banques prévoyait que le prix de rachat ne pouvait excéder 103% du coût d'acquisition. L'Etat n'a donc pas pu profiter de la nette remontée des cours de BNP Paribas et Société Générale entre l'achat des titres et leur remboursement. 

« Le manque à gagner théorique » atteindrait 5,79 milliards d'euros, dont 5,3 milliards pour BNP Paribas, conclut la Cour. « L'Etat n'a pas profité de l'augmentation des cours de Bourse des banques, alors que ce rétablissement est largement imputable à ses concours », font valoir les magistrats.