Après le Pot Commun en octobre dernier, BPCE vient de mettre la main, via sa filiale S-money, sur une nouvelle jeune pousse du secteur des paiements électroniques, Depopass. Explications avec Nicolas Chatillon, directeur du développement fonctions transverses de BPCE et président exécutif de S-Money.

Nicolas Chatillon, Depopass a été lancé sur le marché il y a moins d’un an. Qu’est-ce qui vous a convaincu d’investir dans cette très jeune fintech, qui opère sur un marché encore balbutiant ?

Nicolas Chatillon : « Nous connaissions très bien Depopass, puisque S-money lui fournissait déjà une prestation d’encaissement pour compte de tiers. Nous avons été très vite convaincu du potentiel de ce service, qui répond à un besoin bien identifié : celui de créer de la confiance entre particuliers à l’occasion d’une transaction de gros montant, comme la vente d’une automobile. Le marché des véhicules d’occasion en France, c’est entre 5 et 6 millions de ventes par an, la plupart réglées à l’aide de chèques de banque. Malheureusement, la fraude au chèque de banque, si elle est rare (2 à 3% des transactions), existe. Depopass permet de sécuriser le paiement, d’apporter de la simultanéité entre le vendeur et l’acheteur et répond à l’évolution des modes de consommation, de plus en plus tournés vers le numérique et le mobile. »

Quelles sont vos ambitions pour Depopass ?

N.C. : « Nous souhaitons en faire la solution de référence pour toutes les ventes de biens de valeur entre particuliers : les automobiles et autres véhicules (motos, camping-cars, etc.), mais aussi les bijoux ou les œuvres d’art. C’est à la fois une aventure, car le marché reste à construire, et un projet très rationnel, car le besoin d’un tiers de confiance pour ces transactions existe. »

Pour faire connaître Depopass, vous avez également noué un partenariat avec le groupe CarBoat Media, éditeur notamment du site d’annonces La Centrale…

N.C. : « Effectivement, nous avons choisi La Centrale comme partenaire stratégique. Depopass sera l’unique solution de paiement proposée sur le site. Ce partenariat, toutefois, n’est pas exclusif, et d’autres sites pourront proposer Depopass dans leur univers particulier, qui peut être celui des bateaux ou des caravanes, par exemple. »

En poussant ainsi Depopass, ne craignez-vous pas de signer l’arrêt de mort du chèque de banque ?

N.C. : « Le chèque de banque n’a pas attendu Depopass pour décliner. A l’échelle du groupe BPCE, son usage a régressé d’environ 30% au cours des cinq dernières années, et ce repli s’accélère encore depuis deux ans. Ceci étant dit, il n’est pas question de faire disparaître le chèque de banque. Nous en émettons toujours entre 1 et 2 millions par an, 7 fois sur 10 pour régler une automobile d’occasion. Depopass est une alternative possible, mais nos clients continueront d’avoir le choix. »

Depopass a un défaut majeur : il est plus cher que le chèque de banque…

N.C. : « Si on les compare avec les honoraires facturés par d’autres tiers de confiance, par exemple dans le domaine de l’immobilier, les tarifs de Depopass [voir encadré ci-dessous] sont très raisonnables, et d’ailleurs très bien acceptés par les clients. Sa valeur d’usage, en effet, est bien supérieure à celle du chèque de banque, puisqu’il permet la sécurisation des fonds, la simultanéité de la transaction, la vérification de l’identité de l’acheteur, entre autres services. »

Le concurrent Paycar

BPCE, via S-money, a l’intention d’imposer Depopass comme la solution de référence sur le marché des ventes de biens de valeur entre particuliers. Pour y parvenir, elle devra toutefois composer avec la concurrence, incarnée par Paycar, qui travaille avec le Crédit Mutuel Arkéa et sa filiale Mangopay. Principale différence entre les deux services : la tarification. Paycar a fait le choix d’une commission fixe unique de 40 euros, quel que soit le montant du bien vendu, partagée entre le vendeur et l’acheteur. Depopass, de son côté, fait supporter le coût du service au vendeur et a prévu une commission fixe de 25 euros jusqu’à 5.000 euros, puis de 0,2% du montant au-delà de ce seuil. Un principe sur lequel Nicolas Châtillon ne compte pas revenir, même s’il explique que Depopass « s’adaptera au marché ».

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