La réforme des retraites promise par Emmanuel Macron, d'abord prévue pour mi-2018, devrait finalement être finalisée « d'ici à l'été 2019 », a annoncé lundi le président de la République, qui se donne ainsi du temps pour résoudre une équation complexe.

« Ce grand chantier s'ouvrira dès cette année et je souhaite que l'ensemble des textes puisse être finalisé d'ici à l'été 2019 », a-t-il déclaré à l'audience de rentrée de la Cour des comptes. Un message volontaire, mais une formulation ambiguë, qui ne permet pas de savoir si la réforme des retraites sera votée ou seulement présentée à cette date.

Le chef de l'Etat a en tout cas abandonné son calendrier initial : en juillet, il affirmait que « les [seraient] présentées au Parlement au premier semestre 2018 ». En septembre encore, lors de la nomination de Jean-Paul Delevoye au poste de Haut-commissaire à la réforme des retraites, le gouvernement évoquait « une loi-cadre qui sera préparée (...) au premier semestre 2018 ».

Depuis, l'exécutif s'est montré plus réservé, comme la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, qui assurait en novembre qu'il n'y avait « pas de calendrier fixé » Et aucun ministre n'a contredit le président de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), Gérard Rivière, qui affirmait en décembre qu'il n'y aurait pas de loi-cadre et pas « obligatoirement une loi en 2018 ».

Un report attendu

Le report officialisé par Emmanuel Macron était donc attendu. « Je ne suis pas surpris », a confirmé à l'AFP le président de la fédération patronale U2P, Alain Griset, soulignant qu'une réforme en 2018 ne lui « paraissait pas raisonnable au regard de tous les textes actuellement dans les tuyaux ». L'agenda est en effet déjà saturé de projets de loi, à la fois dans le champ social (formation, apprentissage, assurance-chômage), sur le terrain économique (administration, entreprises) et sur des thèmes sociétaux (immigration, bioéthique).

Le choix d'un « calendrier plus détendu » est « une décision qui paraît sage », a aussi estimé Frédéric Sève, secrétaire national de la CFDT chargé des retraites. « On se donne du temps pour une vraie discussion » car « ce n'est pas la même méthode en 6 mois ou en 18 mois », a-t-il expliqué à l'AFP.

« Consultations citoyennes » et « mobilisations parlementaires »

Ce délai supplémentaire servira peut-être à « mettre en place des consultations citoyennes (et) des mobilisations parlementaires », comme l'envisageait Jean-Paul Delevoye dans un entretien au mensuel Notre Temps paru la semaine dernière. Une manière d'infuser le débat dans l'opinion avant le dénouement, qui coïncidera avec les élections européennes du printemps 2019.

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Pour l'heure, le contenu de la réforme reste à définir. Seul l'objectif est connu : « passer des 37 régimes de retraite actuels à un régime simplifié et lisible », a rappelé le président de la République lundi. Le futur système « universel » devra permettre aux Français de « comprendre en temps réel où ils en sont de leur droits à la retraite et (de ne) pas être pénalisés par des carrières non linéaires passant du public au privé, du salariat à l'entrepreneuriat et inversement », a-t-il ajouté.

Une intention louable qui se heurtera tôt ou tard aux inévitables sujets tabous : les régimes spéciaux, les réserves des caisses de retraite, la base de calcul des pensions, plus favorable aux fonctionnaires (6 derniers mois) qu'aux salariés du privé (25 meilleures années), l'âge de départ et la durée de cotisation.

« Choisir l'âge de son départ à la retraite, à partir d'un âge pivot »

Jean-Paul Delevoye a déjà avancé l'idée que chacun puisse « choisir l'âge de son départ à la retraite, à partir d'un âge pivot dont il conviendra de débattre ». La discussion devra en outre tenir compte d'un contexte financier moins favorable que pendant l'élection présidentielle. Après les réformes Woerth en 2010, puis Touraine en 2014, le retour à l'équilibre du système de retraite semblait atteignable au milieu de la décennie 2020. Il est désormais espéré au mieux en 2037, en raison d'une démographie moins dynamique selon les projections de l'Insee.