Si les opérateurs se sont installés à Paris à la mi-mars à grand renfort de communication, la 5G est encore très inégalement déployée sur le territoire français et les accès réduits pour le grand public. Selon la CLCV, il faudra attendre 2030 pour une couverture nationale. Du côté des forfaits et des téléphones, les prix restent élevés pour un service encore très limité.

Vendredi 19 mars, la 5G est entrée dans Paris. Cette activation des bornes est symbolique car la capitale était considérée par les observateurs comme la dernière grande ville à ne pas la proposer. Les quatre opérateurs - Orange, Bouygues Telecom, SFR et Free mobile - ont allumé 80 antennes chacun après la signature d’une charte avec la mairie. Un nombre 5 fois moins important que la proportion d’antennes 4G mais chaque opérateur y a été de son communiqué pour saluer cette arrivée. « La 5G constitue un véritable avantage compétitif pour Paris », juge Richard Viel, PDG de Bouygues Telecom dans Les Echos. « La 5G est la seule solution disponible pour continuer à accompagner l'explosion des usages du numérique », estime de son côté Stéphane Richard, le patron d’Orange face aux lecteurs du Parisien.

Surtout, Paris et sa population à haut niveau de vie sont la promesse d’un marché dynamique pour vendre des forfaits et des téléphones estampillés 5G. C'est aussi une zone puissante du PIB français et la 5G y est vue, dans un premier temps, comme une solution à destination des professionnels. Néanmoins Paris et ses 2,2 millions d'habitants (12,2 millions avec l'Ile-de-France), n’est pas tout : la « capacité à déployer la 5G sur l’ensemble du pays est l’enjeu le plus important pour le consommateur qui, en plus d’être soumis à un matraquage commercial et à des prix élevés pourrait ne pas bénéficier d'un service à la hauteur de ce qu’il paye chaque mois, alerte Olivier Gayraud, juriste au sein de l’association de consommateurs CLCV. Dans les faits, la couverture optimale en France n’est pas attendue avant… 2030 ».

Pourtant, aujourd'hui, la France entière n’est pas encore raccordée à la 4G. Les opérateurs se sont d'ailleurs engagés à construire « 5 000 antennes supplémentaires afin d'améliorer la couverture des zones rurales », précise Stéphane Richard.

Quelle couverture 5G en France ?

Au 28 février, selon un rapport mensuel de l'Arcep publié le 18 mars, la répartition des antennes 5G en France est la suivante :

7 044 antennes pour Free mobile, 2 029 pour Bouygues Telecom, 1 059 pour Orange et 987 pour SFR. Des nombres en hausse depuis la fin de l’année 2020 mais qui cachent un tour de passe-passe, notamment chez Free. L'opérateur a converti des antennes 700 MHz qui servaient à la 4G en borne 5G. Problème, le débit y est moins important que sur les fréquences 3,5 GHz, uniquement dédiés à la 5G. En ne retenant que ces dernières, Orange en propose 808, Free mobile 562, Bouygues Telecom 325 et SFR 284. Soit un total de 1 979 antennes de « vraie 5G » en France à la fin du mois de février.

5G en France au 28 février
Évolution du nombre de sites 5G ouverts commercialement au 28 février en 3,5 GHz (source : Arcep)

Reste que tous ces chiffres montrent mal l’inégalité de la répartition du service :

5G en France au 28 février
5G en France au 28 février
Cartographie des sites 5G ouverts commercialement au 28 février (Source : Arcep)

On note que les installations (Free mis à part car il a réaffecté des antennes 3G et 4G) sont situées à proximité des (très) grandes métropoles, délaissant une fois encore les zones rurales. « Les sites représentés ici (sans Paris, ndlr) sont ceux déclarés ouverts commercialement par les opérateurs mobiles à une date donnée ; les déploiements sont amenés à évoluer rapidement », souligne l’Arcep. En effet, l’augmentation a été de 12% entre janvier et février. Il est aussi possible de télécharger sur le site de l’Arcep des cartes régionales pour entrer dans le détail des territoires.

Comment évoluent les forfaits proposés par les opérateurs ?

Si la 5G se déploie tranquillement, les forfaits proposés n’évoluent pas depuis les fêtes de Noël. Les données compilées dans le tableau ci-dessous montrent des prix d’entrée autour de 25 euros pour 70 ou 80 Go de data. Un prix souvent valable 12 mois car les opérateurs Orange, Bouygues Telecom et SFR ont multiplié les offres avec engagement pour le lancement de la 5G. Les contrats couplés mobile et box Internet permettent aussi de faire baisser la note d’une quinzaine d’euros. Free affiche les tarifs les plus agressifs : les abonnés Freebox et Freebox Pop profiteront pour 15,99 euros par mois et 9,99 euros par mois d’une enveloppe data illimitée…

OpérateurQuantité de data 5G disponibleTarif mensuelOffre abonnés boxEngagement
12 premiers moisAprès 12 mois
Orange70 Go24,99 €39,99 €Jusqu'à 15 € de remise12 mois minimum
avec une offre mobile
100 Go34,99 €49,99 €
150 Go49,99 €64,99 €
Illimité79,99 €94,99 €
SFR80 Go25 €40 €Jusqu'a 15 € de remise12 mois minimum
avec une offre mobile
100 Go35 €50 €
130 Go50 €65 €
Illimité80 €95 €
Red By SFR130 Go25 € Sans engagement
Bouygues Telecom50 Go15,99 €30,99 €Jusqu'à 7 € de remise12 mois minimum
avec une offre mobile
80 Go21,99 €36,99 €
B&You130 Go24,99 € Sans engagement
Free150 Go19,99 € Sans engagement
Illimité15,99 € (Freebox)
ou 9 ,99 € (Freebox POP)

Offres au 22 mars 2021

Le site monpetitforfait.com signale néanmoins l’arrivée sur le créneau de la 5G de deux opérateurs alternatifs. Prixtel propose ainsi une offre flash, c’est-à-dire commercialisée sur un temps court, sans engagement et garantie neutre en CO2, à 20 euros par mois et 150 Go de données mobiles. Son prix passe à 25 euros au bout d’un an. Une offre à 25 euros (puis 30 euros) pour 200 Go de data est aussi proposée. Le service Prixtel est distribué par les opérateurs Orange et SFR. Coriolis, de son côté, propose des prix équivalents aux opérateurs classiques (à partir de 25 euros les 20 Go) et demande un engagement de 24 mois à ses clients.

Le système des ventes flash est aussi utilisé ponctuellement par Orange, SFR et Bouygues Telecom.

Et les téléphones ?

Rien de neuf non plus de ce côté, si ce n’est un nombre d’appareils toujours plus important mais pas moins cher, avec une moyenne, selon les évaluations de MoneyVox, autour de 800 euros pour un mobile compatible sans engagement. « Les offres 5G des opérateurs servent surtout à vendre des téléphones », souligne le consultant indépendant en télécommunications Jérôme Nicolle. Avec, au passage, une confortable marge qu'il estime à environ 20%. Les offres avec engagement de 12 mois minimum permettent de faire baisser la facture de l'appareil, avec des prix qui débutent à 250 euros chez Orange, SFR ou Bouygues Telecom. Des produits d'appel que Free ne propose pas.

Pour faire une bonne affaire dans ce domaine... la meilleure solution est encore de profiter des téléphones 4G à prix cassés, en attendant 2030 !

L’Europe veut accélérer sur la 5G...

La 5G en est encore à ses débuts sur le continent européen. Les opérateurs de 23 des États membres (manque Chypre, la Lituanie, Malte et le Portugal, selon l'European 5G Observatory) de l’Union européenne ont déjà lancé la 5G dans les grandes villes. Un déploiement plus complet est attendu d’ici 2025 alors que la Corée du Sud, les Etats-Unis et la Chine ont une belle longueur d'avance sur l'Europe.

et pense déjà à la 6G

Mi-mars, la Commission européenne a annoncé qu’elle allait investir à hauteur de 900 millions d'euros dans la recherche sur la 6G via un groupe de travail appelé « Réseaux et services intelligents », explique Europeanscientist.com. « Travailler aujourd’hui sur la 6G, c’est imaginer ce que la 6G pourra être dans dix ans, c’est réfléchir à nos besoins futurs », expliquent deux spécialistes des réseaux à L'Obs.