Le Premier ministre Edouard Philippe a lancé jeudi la mission de la Cour des comptes sur la fraude fiscale, voulue par Emmanuel Macron, qui visera notamment à établir un chiffrage solide de cette « attaque insupportable contre le pacte républicain ».

Dans une lettre adressée à son premier président, l'ancien élu socialiste Didier Migaud, le chef du gouvernement précise que « l'objectif principal » de cette enquête est de « dresser un état des lieux de la fraude fiscale et de son montant en proposant un chiffrage » dont la méthode permettrait un suivi dans le temps, selon ce courrier dont l'AFP a obtenu copie. Le Premier ministre demande également à la Cour d'établir les « lacunes éventuelles » des outils et de l'organisation actuels de l'Etat contre la fraude fiscale, ainsi qu'un point sur la situation internationale et sur les nouvelles formes de fraude, de plus en plus sophistiquées. Le rapport devra lui être remis pour « début novembre », au moment des discussions du budget 2020.

80 à 100 milliards d'euros d'impôts s'évaporent chaque année

Selon le syndicat Solidaires finances publiques, 80 à 100 milliards d'euros d'impôts, soit l'équivalent du déficit budgétaire français, échappent chaque année à l'Etat à cause de la fraude, un chiffre abondamment repris dans le débat politique et économique. Mais aucune estimation officielle n'existe pour corroborer cette fourchette, jugée surévaluée par Bercy.

« Il est clair qu'on manque d'un regard impartial et rigoureux sur ce sujet », confirme ainsi Matignon, en se félicitant que « quelqu'un d'autre que le gouvernement se penche sur cette question pour répondre à la suspicion exprimée durant le grand débat que l'on n'en fait pas assez » en matière de lutte contre la fraude fiscale.

Lors de sa conférence de presse post-grand débat national fin avril, Emmanuel Macron avait annoncé un audit de la Cour des Comptes pour lutter contre « l'injustice fiscale » et s'était dit prêt à « aller plus loin » sur ce sujet, après de premières initiatives prises par l'exécutif et le Parlement dans la loi d'octobre 2018 (durcissement des sanctions, fin du +verrou de Bercy, nouveau service de police fiscale...). « Il y a de bonnes chances que la Cour dise que l'on a déjà un arsenal assez robuste. Ca ne veut pas dire que l'on ne peut pas l'améliorer », fait-on valoir à Matignon.