Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a mis en garde mardi contre tout « attentisme » au sein de la zone euro, estimant que « différer » les réformes jusqu'à une potentielle nouvelle crise « serait dangereux ».

« Alors que des propositions ambitieuses avaient été mises sur la table, la tentation inavouée semble aujourd'hui de différer beaucoup des progrès jusqu'à une prochaine crise », a souligné François Villeroy de Galhau, en présentant sa traditionnelle « lettre au président de la République ». « Ce serait dangereux et ce serait dommage, parce que toutes les voies privilégiées ici sont accessibles sans révision des traités, ni transferts budgétaires lourds, d'une Union de financement à un rôle international accru », a ajouté le gouverneur de la Banque de France.

Dans sa « lettre » adressée à Emmanuel Macron, centrée cette année sur les 20 ans de la monnaie unique européenne, François Villeroy de Galhau estime que l'euro est devenu non seulement « une monnaie de confiance » mais aussi une source de « fierté ». « L'euro a délivré ses deux promesses fondatrices : la stabilité des prix avec une inflation moyenne de 1,7% par an en Europe », soit trois fois moins que dans les vingt années précédentes, « et la stabilité des changes », souligne le responsable de la banque centrale.

Le pouvoir d'achat a bondi de 20% en 20 ans

Une stabilité favorable aux citoyens, notamment en France. D'après la Banque de France, le pouvoir d'achat des Français a ainsi augmenté de 20% entre 1999 et 2018, contre 12% en zone euro. Et 2019 devrait renforcer cete dynamique, avec une croissance du pouvoir d'achat attendue « autour de 2% ». « Ces succès de l'euro n'appellent pour autant aucune complaisance », a toutefois insisté François Villeroy de Galhau, en estimant que l'euro méritait « mieux que l'attentisme pour optimiser son potentiel au bénéfice de tous les Européens ».

Ce message intervient quelques jours après la mise en garde de la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, qui a exhorté les membres de la zone euro à renforcer son système bancaire et estimé que la zone euro n'était pas encore assez préparée pour affronter la prochaine crise économique. « L'union monétaire est effectivement plus résiliente qu'il y a dix ans, mais elle ne l'est pas assez », a affirmé Christine Lagarde, alors que les perspectives pour l'économie mondiale sont en train de se dégrader.

Trois défis à relever

Trois « défis », selon lui, doivent être poursuivis. Le premier concerne la consolidation la zone euro, amorcée après les crises financières de 2007-2009 et 2011-2012 mais encore perfectible. « La zone euro n'a pas achevé l'Union bancaire initiée après la crise », a notamment souligné le responsable de la banque centrale française, jugeant nécessaire d'avoir « plus de banques paneuropéennes transfrontières ».

Le deuxième objectif concerne « la prospérité », qui doit être « mieux répartie ». La zone euro doit pour cela « amplifier sa croissance » et « sa convergence », par des réformes nationales mais aussi par « le renforcement de l'Union économique », a plaidé François Villeroy de Galhau.

Le gouverneur a enfin appelé la zone euro à affirmer sa « souveraineté », en défendant « le rôle international de l'euro ». Cet objectif est « plus nouveau, pour des raisons géopolitiques évidentes, mais aussi économiques », a-t-il souligné. « Ce sont des chantiers techniques mais nécessaires », a conclu François Villeroy de Galhau, jugeant « essentiel de rester mobilisé ».