Avant de s'aventurer dans un montage financier destiné à payer moins d'impôts, les entreprises pourront désormais consulter une carte des schémas les plus inventifs déjà débusqués par l'administration fiscale et qu'elle vient d'afficher sur son site en signe de mise en garde.

« Cette publication ne modifie pas le droit fiscal tel qu'il est aujourd'hui appliqué, notamment lors des contrôles. Mais nous souhaitons que toutes les entreprises (...) puissent connaître à l'avance les montages que l'administration ne regarde pas comme conformes au droit », a expliqué mercredi lors d'une conférence de presse le ministre des Finances Michel Sapin.

« Il s'agit de montages qui ont été déjà rencontrés lors de contrôles, qui ont fait l'objet de redressements » et dont 17 ont été publiés mercredi en fin d'après-midi sur le site internet de la DGFiP (Direction générale des finances publiques), a-t-il précisé. Le but affiché : donner plus de « prévisibilité » aux entreprises et « les inciter à renoncer à des schémas abusifs pour diminuer leurs impôts ».

Fausse délocalisation de main d'œuvre

Le secrétaire d'Etat chargé du Budget, Christian Eckert, a pour sa part cité deux exemples de ces acrobaties comptables, dont des prestations payées d'avance mais qualifiées de prêts. « Typiquement, un club de sport qui ferait financer son investissement en nouvelles machines de musculation par ses futurs clients en traitant les abonnements des utilisateurs comme des prêts plutôt que comme des prestations payées d'avance » avec « pour seul objectif de ne pas payer de TVA », a-t-il expliqué. Seconde machination : la fausse délocalisation de main d'œuvre, par laquelle une société étrangère facture à une société française les services d'une personne qui en réalité se trouve en France. Cette personne se soustrait donc ainsi aux obligations déclaratives françaises.

Cette carte s'ajoute à une mesure existante qui est le rescrit, par lequel une entreprise peut à tout moment vérifier à l'avance auprès de l'administration la légalité d'une pratique fiscale qu'elle envisage, a rappelé Christian Eckert.

Une instance de recours pour le CIR

Le gouvernement a présenté mercredi par la même occasion d'autres mesures, dont la création d'un comité des experts pour apporter un regard extérieur et aider l'administration fiscale à prendre une décision dans les cas de litiges les plus ardus.

Est également prévue la mise en place d'une instance de recours pour améliorer la conciliation concernant l'octroi du crédit d'impôt recherche (CIR). Ce comité consultatif du CIR, qui sera étendu au crédit d'impôt innovation, pourra être saisi par l'administration comme par les entreprises. Il sera présidé par un magistrat et créé par voie législative. « Le CIR est le point le plus soulevé par les entreprises concernant les contrôles », a indiqué Christian Eckert.

Principale niche fiscale pour les entreprises, le CIR, créé en 1983 et relancé en 2008, permet aux entreprises de déduire de l'impôt sur les sociétés 30% de leurs investissements recherche et développement, dans la limite de 100 millions d'euros d'investissements (et 5% au-delà). Il a coûté 5,8 milliards d'euros à l'Etat en 2014.