L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a présenté jeudi sa norme d'échange automatique de données fiscales, qu'elle espère voir adopter par le plus grand nombre de pays dans le but de lutter contre l'évasion fiscale.

« Il s'agit d'une forme multilatérale de FATCA », le système d'échange automatique de données opéré par les Etats-Unis, qui a eu un « rôle de catalyseur », a résumé Pascal Saint-Amans, responsable des questions fiscales de l'OCDE, lors d'une conférence de presse à Paris.

La loi américaine FATCA (Foreign account tax compliance act), qui a marqué un tournant dans la lutte contre l'évasion fiscale dans le monde, force les établissements financiers étrangers (EFE) à informer le fisc américain sur leurs clients imposables aux Etats-Unis, sous peine de sanctions financières. Achim Pross, en charge en particulier des aspects techniques de ce dossier, a lui précisé que là où FATCA prend pour base la nationalité américaine des entreprises ou des particuliers, la norme de l'OCDE s'appuiera sur le « critère de résidence ».

Une norme compatible avec les règles européennes

« Nous travaillons très étroitement avec la Commission européenne pour s'assurer de la compatibilité » de cette norme avec les initiatives européennes, en particulier la révision de la directive européenne sur la fiscalité de l'épargne, censée durcir les exigences de transparence fiscale, a dit Pascal Saint-Amans. « Nous voulons un standard global qui soit compatible avec toutes les normes existantes », de manière à « limiter le fardeau » réglementaire, technique ainsi que le coût pour les banques et institutions financières, a-t-il déclaré.

Un système en fonctionnement fin 2015

La mise en place de l'échange automatique de données fiscales, allant plus loin que des coopérations reposant sur la bonne volonté des différents pays concernés, a été élevée au rang de priorité lors du dernier sommet du G20 en 2013 à Saint-Pétersbourg. Il doit débuter fin 2015. Pour le secrétaire général de l'OCDE Angel Gurria, cette initiative va « réellement changer les règles du jeu ». Le champ d'application de cette norme « ne pourrait pas être beaucoup plus large », a assuré Pascal Saint-Amans selon qui le modèle de l'OCDE va « beaucoup plus loin » que les exigences européennes notamment.

La norme de l'OCDE obligera les administrations fiscales des pays qui l'adoptent à livrer toutes les informations à leur disposition sur les actifs financiers détenus chez eux par des personnes ou des entités non-résidentes. Elle couvre les dépôts bancaires mais aussi les intérêts et les plus-values, et s'appuie sur le principe du « bénéficiaire ultime et réel », de manière à empêcher en théorie la fraude fiscale via des « trusts » et autres sociétés-écran. Pascal Saint-Amans a toutefois reconnu que l'or et les métaux précieux échappaient au système « car nous ne pouvons pas vraiment espérer que les banques nous ouvrent leurs coffres », ce qui « est un problème ».

Présentation officielle les 22 et 23 février

Par ailleurs, il a assuré que l'OCDE voulait s'attaquer « aux besoins et aux défis spécifiques aux pays en voie de développement » pour les inclure dans le mouvement. Les organisations non-gouvernementales en particulier s'inquiètent de voir les pays pauvres, qui sont très concernés par les problèmes d'évasion fiscale, rester sur la touche pendant que les pays riches négocieraient entre eux. L'OCDE présentera officiellement son modèle pour adoption lors de la réunion des ministres des Finances du G20 de Sydney, le 22 et 23 février, avant une nouvelle étape en septembre.

L'OCDE a précisé qu'une quarantaine de pays s'étaient engagés à une « adoption précoce » de cette nouvelle norme, dont des juridictions souvent critiquées pour leur opacité comme le Luxembourg, le Liechtenstein, et plusieurs territoires de la sphère d'influence britannique (Jersey, Guernesey). Et ce bien que le Luxembourg par exemple bloque au niveau européen les initiatives visant à renforcer la transparence fiscale.