« Sous-dimensionnés », « débordés », « exsangues »: le procureur national financier, Eliane Houlette, s'est inquiétée lundi du manque de moyens des services d'enquête spécialisés face à des dossiers de plus en plus « complexes et chronophages ».

Ces services sont « sous-dimensionnés », « débordés voire exsangues » au regard des défis actuels, a déploré Eliane Houlette lors de l'audience solennelle de rentrée du tribunal de grande instance de Paris. La brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF) n'est composée que de « 40 enquêteurs », la brigade centrale de lutte contre la corruption (BCLC) de « 17 enquêteurs », a-t-elle relevé. Ce manque de moyens humains pèse sur « la durée des enquêtes ».

Lenteur des procédures

Le procureur a également déploré la lenteur des procédures, « un long parcours parsemé d'embûches », prenant l'exemple, sans la citer nommément, de l'affaire sur le compte caché de l'ancien ministre socialiste du Budget, Jérôme Cahuzac.

Dans ce dossier, les juges financiers ont notifié la fin de leurs investigations le 1er décembre 2014, avant les réquisitions du procureur et le renvoi en procès. Mais ce procès, fixé du 8 au 18 février, pourrait être retardé par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur la légalité des doubles poursuites administratives et pénales en matière fiscale comme ce fût le cas à l'ouverture du procès du marchand d'art Guy Wildenstein qui a été suspendu. Si c'est le cas, l'affaire Cahuzac ne pourra être jugée « dans le meilleur des cas, avant le mois de septembre 2016, presque deux années après la clôture de l'instruction », a regretté Eliane Houlette.

Elle a également dénoncé la fréquence des « recours contre les décisions des juges d'instruction (...) exercées à seule fin de retarder l'heure du procès et son issue », déplorant « une instrumentalisation » des règles de procédure.

Le parquet national financier (PNF) a été mis en place en février 2014 à l'issue de la révélation de l'affaire Cahuzac. Depuis sa création, treize dossiers ont été jugés, mais seules deux décisions sont définitives, les autres ayant été frappées d'appel. Le PNF a actuellement en charge 317 dossiers.