Créer une taxe sur les institutions financières dont les activités peuvent favoriser le risque systémique et en affecter le produit au budget de l'Etat est une des propositions de Jean-François Lepetit, en charge d'un rapport sur le sujet dévoilé mercredi par Bercy.

Mis en lumière par l'accélération de la crise financière après la chute de la banque Lehman Brothers, le risque systémique correspond aux répercussions d'une défaillance sur l'ensemble du secteur financier voire sur le système.

Or, les acteurs financiers ne peuvent pas « se protéger contre une défaillance généralisée du système financier », souligne le rapport.

M. Lepetit fait une liste de 17 recommandations dont la plus emblématique est de « taxer les positions de marché potentiellement illiquides (d'institutions financières) et affecter le produit de cette taxe au budget de l'Etat ».

La ministre de l'Economie Christine Lagarde s'était déjà prononcée, le 1er avril, pour une taxe servant à abonder le budget de l'Etat, alors que l'Allemagne souhaite elle alimenter un fonds dédié au sauvetage ou au démantèlement éventuels des banques.

Pour M. Lepetit, il convient, au contraire, « de distinguer cette taxe d'un mécanisme d'assurance qui risquerait de renforcer l'aléa moral et les comportements à risque ». L'aléa moral consiste, dans le cas des dirigeants de banques, à prendre des risques excessifs en tablant sur un soutien de l'Etat en cas de coup dur.

Mais, pour l'auteur du rapport, « les entités assujetties à cette taxe n'auraient cependant aucun droit à un soutien de l'Etat en cas de difficultés ».

Un « Moyen de dissuasion » qui doit être défini au niveau international

Pour M. Lepetit, les modalités de cette taxe vue comme un « moyen de dissuasion » devront être définies au niveau international afin de ne pas créer de « distorsions de concurrence entre les différents systèmes bancaires et financiers », indique le rapport.

Cette taxe concernerait toutes les institutions financières, qu'elle soient déjà régulées ou non (banques, assurances, fonds spéculatifs etc), mais elle ne viserait pas leur dette, qui peut servir au financement des entreprises, ni les actifs déjà réglementés, par le Comité de Bâle par exemple.

M. Lepetit juge que la meilleure assiette pour appliquer la taxe serait constituée, pour chaque établissement, de l'ensemble des instruments de marchés potentiellement illiquides, c'est à dire les produits dérivés susceptibles de devenir difficiles ou impossibles à vendre en cas de crise financière (CDO, CDS, swaps, options).

Le rapport recommande également de renforcer les pouvoirs de certains superviseurs en les dotant « du pouvoir de limiter de façon temporaire le volume de certaines activités systémiques ou le développement de nouvelles activités complexes ».

Ancien président du Conseil national de la comptabilité et de la Commission des opérations de Bourse (COB, aujourd'hui AMF), M. Lepetit s'était vu confier fin 2009 cette mission sur le risque systémique.