Votre liste de courses était frugale. Et pourtant, au fil des rayons, votre chariot s’est rempli de produits non prévus mais qui vous apparaissent ô combien nécessaires. C’est l’effet d’une technique de vente qui progresse dans la grande distribution.

Vous voyez des tire-bouchons au rayon vin, des bombes de chantilly près des fraises ou plus récemment du pain de mie à côté du foie gras : cette pratique commerciale s’appelle du « cross-merchandising » ou, en bon français, de la multi-implantation produit. Elle consiste à placer un produit hors de son rayon habituel mais dont l'usage est complémentaire avec ceux qui y sont présents. Le « cross-merchandising » vise à accroitre les ventes de la grande distribution mais peut aussi rendre service aux consommateurs en anticipant sur ses besoins.

Lorsque vous faites vos courses, il est facile de se perdre dans les rayons pour trouver tout ce dont vous avez besoin. En plaçant des produits hors de leurs zones habituelles et près d’un produit complémentaire, vous pouvez gagner du temps. « Le cross-merchandising n’est pas une invitation à la surconsommation. Cette pratique surfe entre le service et la stimulation d'achat. Elle permet de mettre à l’esprit du client un produits complémentaire à celui qu'il s'apprêtait d'acheter », explique à MoneyVox Olivier Dauvers, spécialiste marketing de la grande distribution. Les rince-doigts près des crustacés ou les bouillons cube près des pâtes. On n’y pense pas naturellement et pourtant l’association de ces produits peut-être utile au consommateur.

Mettre en avant la marque distributeur

« Cette pratique surfe entre le service et la stimulation d'achat »

Mais, en dehors de leur stand habituel, ces produits bénéficient d’une exposition accrue. Et surtout, les consommateurs ne peuvent pas les comparer avec ceux de la concurrence, à moins de revenir sur leur pas et de se rendre dans leur rayon d’origine. C’est pourquoi les grandes surfaces choisissent souvent de mettre ainsi en avant leur marque distributeur.

Bio Village chez Leclerc, les produits de la Sélection des Mousquetaires chez Intermarché ou Reflets de France chez Carrefour... Les articles des marques distributeur sont dans tous les rayons de vos supermarchés, et plutôt bien positionnés, à la portée des yeux. Même s’ils connaissent un succès grandissant, la concurrence peut être rude avec les marques connues habituées des spots publicitaires. Or, grâce au cross-merchandising, les grandes surfaces disposent d'une façon de plus de faire connaître leurs produits « maison ».

Des retombées commerciales difficiles à connaître

« Pour une surface de 10 000 m2, on peut voir 200 ou 300 points de cross-merchandising »

Selon Olivier Dauvers, la multi-implantation reste encore assez peu utilisée en France par les enseignes de la grande distribution, même si elle se développe. « Pour une surface de 10 000 m2, on peut voir 200 ou 300 points de cross-merchandising. Ce qui fait à peine plus de 3 ou 4 produits par allée. Intermarché et Leclerc en font peu, Carrefour à peine plus que la moyenne », avance ce spécialiste du commerce et du marketing. Soumise à aucun contrôle particulier, cette pratique est utilisée pour tous les types de produits, alimentaires ou non.

Présent en rayon, le cross-merchandising se décline aussi en ligne, sur les drives de vos super et hypermarchés. A la rentrée de septembre dernier, une période importante pour la grande distribution, beaucoup de marques avaient en effet choisi de référencer leurs laitages ou leurs jus de fruits sur les pages internet « épicerie sucrée » des drives, d'après une étude de Publicis Commerce rapportée par le site spécialisé LSA. Concrètement, entre le 15 août et le 15 septembre, c'était le cas de 36% des marques référencées sur les pages « épicerie sucrée » de Carrefour. Cette proportion atteignait 21% chez Leclerc, 13% pour Auchan et 9% chez le drive d’Intermarché.

D’un point de vue extérieur, il est difficile d’estimer l’efficacité commerciale du cross-merchandising. L’utilité et la pertinence du croisement des articles dépendent évidemment des clients et de leurs besoins. Mais surtout, « les produits gardent leur code-barre donc impossible de savoir s’ils sortent de leur rayon habituel ou d’un autre et donc d’avoir des chiffres fiables pour les ventes », souligne Olivier Dauvers.

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