En ce début d’année, les bonnes nouvelles pour votre porte-monnaie n’étaient déjà pas légion… Et alors que la Loi d’orientation des mobilités, adoptée en novembre, prévoyait un remplacement plus facile et moins cher de certaines pièces détachées automobiles, la mesure a finalement été retoquée par le Conseil constitutionnel. Du moins temporairement…

L’article 110 de la loi LOM (loi d’orientation des mobilités) avait mis tout le monde d’accord ou presque. Sur un amendement du gouvernement, les députés et sénateurs avaient voté une modification du Code de la propriété intellectuelle, mettant fin au monopole des constructeurs automobiles sur les pièces détachées dites « visibles » à compter du 1er janvier 2020. Concrètement, les dessins et modèles concernant les rétroviseurs, les pièces de vitrage et d’optique ne devaient plus être la propriété exclusive des constructeurs automobiles mais devaient pouvoir être utilisés par n’importe quel fabricant pour produire et vendre les pièces aux particuliers. Pour les éléments de carrosserie « de première monte », c'est-à-dire d'origine, la libéralisation était actée au 1er janvier 2021. Enfin, pour les autres pièces de carrosserie, il était prévu de faire tomber les dessins et modèles dans le domaine public au bout de 10 ans (et non 25 ans comme aujourd'hui).

Après l’adoption définitive de la loi, le 20 novembre 2019, l’UFC-Que Choisir saluait cette ouverture à la concurrence, synonyme de baisse des prix pour le consommateur (et pour les assurances) lors du remplacement d’une pièce endommagée. « L’enjeu est essentiel pour le pouvoir d’achat des automobilistes qui peuvent escompter une économie importante sur les frais de réparation », rappelait l’association de consommateurs, qui œuvre depuis près de 10 ans pour la libéralisation du marché des pièces détachées de voiture. « Selon notre étude de l’époque [2011, ndlr], l’automobiliste pourrait économiser jusqu’à 34% sur le prix des pièces de carrosserie. Et il pourrait même espérer une baisse de sa prime d’assurance ».

C’était sans compter l’intervention du Conseil constitutionnel, chargé de vérifier si l’adoption de la loi d’orientation des mobilités respectait la Constitution. Or, dans une décision du 20 décembre 2019, les Sages ont estimé que l’article 110 constituait un « cavalier législatif », c’est-à-dire que la disposition prévoyant la libéralisation des pièces détachées n’avait « pas de lien, même indirect » avec le reste du texte de loi. En gros, le Parlement a voulu faire passer une nouvelle règle mais sans l’incorporer dans le bon moule… Un problème de forme (et de respect de la Constitution), pas de fond.

Une décision qui fait réagir évidemment l’UFC-Que Choisir. Mathieu Escot, directeur adjoint de l’action politique, déplore « une mauvaise nouvelle ». « C’est une mesure dont on attend des effets positifs pour les consommateurs. De plus, elle permet de libérer du pouvoir d’achat sans que cela coûte aux finances publiques ». Mathieu Escot veut cependant rester positif : « Le Premier ministre s’était engagé en faveur de la mesure. Il y a eu de la bagarre, notamment parce que les constructeurs automobiles n’entendaient pas lâcher comme ça leur rente, mais les députés et sénateurs ont tenu bon ». Il espère qu’une nouvelle présentation du texte aura lieu sur le premier semestre 2020 (sous la forme d’une loi consommation un peu large, d’un projet de loi spécifique à cette question ou d’une proposition de loi soutenue par un député) : « Il faut battre le fer tant qu’il est chaud. Les débats ont été longs et mouvementés mais l’article de loi est prêt et des équilibres politiques se sont exprimés. Le Conseil constitutionnel ne s’est pas prononcé sur le fond du texte mais sur la forme. Sa décision n’est pas une victoire pour les opposants à la réforme ».

L’UFC-Que Choisir estime qu’au final, avec l’ouverture à la concurrence des pièces automobiles, ce sont 415 millions d’euros qui pourraient revenir chaque année dans le porte-monnaie des automobilistes français. Soit en allégeant la facture des réparations qu’ils engagent directement, soit en diminuant leurs cotisations d’assurance (puisque les 2/3 des pièces auto sont aujourd’hui payées par les assureurs via la prise en charge des sinistres, et que l’association espère bien que les compagnies fassent bénéficier leurs assurés des économies réalisées par la libéralisation).