L'Assemblée nationale a donné son aval jeudi soir à une transformation facilitée de bureaux vides en logements, « un progrès » selon le gouvernement, mais qui conduit pour la gauche à « oublier » la mixité sociale et « faire sauter des garde-fous ».

Le projet de loi « Elan », examiné en première lecture, entend renforcer l'attractivité de la transformation de bureaux en logements en accordant un « bonus de constructibilité », c'est à dire des droits à construire supplémentaires (fixés à 30%). Il permet aussi de déroger aux obligations de mixité sociale prévues par les plan locaux d'urbanisme (PLU), sauf dans les communes « carencées » en logements sociaux.

Selon Séverine Gipson (LREM), la disposition va permettre « une réelle embellie sur le front du logement en transformant des milliers de bureaux vacants en logements », notamment dans la capitale. Mais l'ex-ministre PRG du Logement Sylvia Pinel a vu dans cet article « un recul important » car il « remet en cause les avancées de la loi égalité et citoyenneté qui avait permis que la mixité sociale soit un objectif dans la construction de logements ».

« Normalement ce texte devrait permettre à la fois la construction de logements tout en assurant la mixité », a abondé le socialiste François Pupponi, reprochant au gouvernement d'« oublier » cet aspect et estimant que si « là où il y a des bureaux » on ne construit pas de logements sociaux, « on ne risque pas de régler le problème de la ghettoïsation ». « Vous faites sauter des garde-fous sur la réalisation de plus-values immobilières », a aussi affirmé Valérie Rabault (PS) à l'attention de la majorité. « Tout cela est davantage fait pour la spéculation », a lancé à son tour l'Insoumis Eric Coquerel, tandis que Stéphane Peu (PCF) a vu dans cette disposition « une petite touche qui parsème cette loi et qui entame la loi SRU (imposant aux communes un quota de logements sociaux) dans ses fondamentaux ».

Mézard : « Ce que nous proposons est un progrès »

« Ce que nous proposons est un progrès » alors que « jusqu'ici, les propriétaires de ces bureaux voulaient les laisser vacants », a affirmé de son côté le ministre de la Cohésion des territoires Jacques Mézard. Sur cet « article important » alors qu'il y a « des centaines de milliers de mètres carrés de bureaux vacants dans les zones tendues », le secrétaire d'Etat Julien Denormandie a récusé tout « détricotage » de la loi SRU.

S'agissant de la mixité sociale, il a souligné que « les autorisations restent dans la main du maire », notant aussi que dès lors qu'une commune est carencée en logements sociaux, les avantages ne s'appliquent pas. La loi « fait à la fois la carotte et le bâton » avec des incitations et la possibilité pour le préfet de réquisitionner ces bureaux pour faire de l'hébergement d'urgence, a-t-il affirmé.

Un amendement Nouvelle gauche, adopté avec l'aval du gouvernement, a prévu que ces réquisitions ne pourront se faire dans les quartiers prioritaires qu'après l'accord du maire, afin de ne pas amplifier « l'empilement de la misère » dans ces territoires.