L'association des « Américains accidentels », regroupant des Français nés sur le sol américain, a engagé une procédure judiciaire pour s'opposer à l'application en France du Fatca, une réglementation fiscale américaine dont ils s'estiment victimes, a-t-on appris mardi auprès de leur avocat.

Le Fatca (Foreign Account Tax Compliance Act), entré en vigueur en 2014 et destiné à lutter contre l'évasion fiscale, permet à l'administration fiscale américaine de demander aux banques étrangères des informations sur la situation de leurs clients désignés comme « personnes américaines ».

Cette réglementation s'est notamment imposée aux « Américains accidentels », ces Français disposant d'une double nationalité en raison de leur naissance sur le sol américain, mais qui assurent n'avoir aucun lien avec les Etats-Unis... et s'opposent aux exigences américaines.

« Une situation proprement kafkaïenne »

Ces citoyens, « dont la double nationalité ne représente pour la plupart que le vestige lointain d'une histoire familiale particulière », se retrouvent « confrontés à une situation proprement kafkaïenne », explique leur avocat, Me Patrice Spinosi.

Certains se sont ainsi vus réclamer plusieurs milliers d'euros d'impôts par les Etats-Unis, sans avoir jamais travaillé dans ce pays. D'autres s'exposent à des poursuites faute de pouvoir transmettre leur numéro d'identification fiscale américain, dont ils ne disposent pas.

Un arrêté jugé illégal

Dans sa requête, déposée lundi au Conseil d'Etat et que l'AFP a pu consulter, l'association des Américains accidentels demande ainsi « l'annulation » de l'arrêté qui a permis la création, par la direction générale des finances publiques, du « traitement automatisé d'échange automatique des informations dénommé EAI ».

Cet arrêté, daté du 25 juillet 2017, « est une des modalités de mise en œuvre de l'accord conclu entre la France et les Etats-Unis le 13 novembre 2014, qui vise à assurer l'application, sur notre territoire de la législation américaine », explique Me Spinosi. Pour l'avocat, cet arrêté est tout d'abord « illégal » parce que l'accord « n'est pas mis en œuvre de façon réciproque par les Etats-Unis ». Or « un accord international ne peut être valablement appliqué en droit interne qu'à la condition qu'il fasse l'objet d'une mise en œuvre réciproque », souligne-t-il.

L'accord franco-américain remis en cause ?

L'association dénonce par ailleurs « le caractère massif du stockage et de la transmission des données fiscales à l'administration fiscale américaine » autorisée par l'accord. Une situation qui « méconnaît le droit à la vie privée et à la protection des données personnelles », insiste-t-elle.

Selon Me Spinosi, le Conseil d'Etat dispose d'un délai de 18 mois environ pour statuer sur le bien fondé du recours. « S'il fait droit à la demande d'annulation », « la mise en œuvre de l'accord de collaboration fiscale conclu entre la France et les Etats-Unis se trouverait alors remise en cause », assure-t-il.