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Hello,Article paru dans Village-Justice : Les modalités de calcul des intérêts d’emprunt : vers la fin d’un contentieux de masse ? (par Fabrice Tournier-Courtes, Avocat)
Je vous laisse prendre connaissance d'un article publié ce 22 août :
Point de vu de l'Avocat
Je ne me permettrais pas de critiquer l'apport fait par un juriste (Avocat de banques, tel qu'il ressort de son site web) sur le contentieux portant sur les taux des prêts, mais je m'arroge malgré tout le droit d'exprimer mon point de vue en disant que je ne suis pas du tout en phase avec une telle analyse.
VOICI LA RÉPONSE QUE J'AI APPORTÉE :
Que fait-on de la rencontre des volontés ?
Affirmer que l’équivalence 30,41666 / 365 = 30 / 360 = 1 / 12 est « parfaitement conforme aux prescriptions de l’annexe à l’article R 313-1 du Code de la consommation » revient à appliquer des règles qui ne concernent que le seul calcul du T(A)EG d'un crédit à la consommation au calcul des intérêts conventionnels d'un crédit immobilier.
Jusqu'à présent, s'agissant des prêts immobiliers, la Cour de cassation ne s'est jamais prononcée sur l'usage du mois normalisé de 30,41666 jours, rapporté à une année de 365 jours (quand bien même l'année serait bissextile) pour le calcul des intérêts du prêt.
Cet aspect du mois normalisé a malgré tout été évoqué dans un arrêt du 15 juin 2016 (Chambre civile 1, n° 15
-16.498), sachant que les Hauts magistrats ne faisaient que répondre à la demande de l'emprunteur qui critiquait le calcul du TEG, et non les intérêts conventionnels de son prêt. Donc rien dans cette décision qui n'expliquerait la possibilité d'user d'un mois de 30,41666 pour l'intérêt contractuel.
Il suffit de relire l'analyse du Conseiller rapporteur, M. Vitse, sous l'arrêt précité, pour relever que le décret n° 2002-927 du 10 juin 2002, entré en vigueur le 1er juillet 2002, a condamné la méthode dite “proportionnelle” et retenu la méthode dite “équivalente”, mais uniquement pour les crédits à la consommation, une telle modification ayant été rendue nécessaire par la directive n° 98/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998, qui a retenu la méthode dite “équivalente” à l’échelle communautaire, s’agissant seulement des crédits à la consommation.
La méthode « dite du mois normalisé » ne saurait donc s'appliquer aux crédits immobiliers, l'article R.313-1 du Code de la consommation n'invoquant que le calcul du taux effectif global selon une méthode proportionnelle par rapport au taux de période, mais ne disant rien du taux conventionnel.
Par ailleurs, en admettant que l'équivalence soit possible pour les prêts immobiliers dont les intérêts sont calculés mensuellement (soit en 1/12è d'année ou selon un ratio 30/360), comment pensez-vous que l'établissement prêteur pourra être en mesure de justifier d'une équivalence de calculs lorsque la première échéance du prêt (« dite échéance brisée ») aura été calculée en usant d'un diviseur 360 (au lieu d'un diviseur 365 ou 366 lorsque ladite échéance se situe en année bissextile) ?
En pareil cas, l'emprunteur va se retrouver en présence de deux taux contractuels (conventionnels) : celui stipulé dans l'offre (qui est toujours exprimé en mois pleins) et celui appliqué par la banque dans le contrat (offre acceptée), nécessairement plus élevé puisque calculé mathématiquement avec un diviseur 360 (au lieu d'un diviseur 365 ou 366).
De toute évidence, le consommateur, a priori réputé profane, n'a pas pu donner un consentement intègre en présence de deux taux d'intérêt quand il s'attendait à signer son offre sur la base d'un seul et unique taux contractuel, dont il pouvait supposer en toute bonne logique qu'il était déterminé sur la base d'une année civile.
Il sera rappelé qu'un contrat de prêt est un contrat d'adhésion qui suppose la rencontre des volontés entre les parties, donc a minima une information claire et précise de l'établissement financier pour recueillir le consentement intègre de l'emprunteur.
Ainsi, une lecture attentive de l'avis de l'Avocat général, Madame Falletti, sous l’arrêt que vous évoquez du 19 juin 2013, fait ressortir sans ambiguïté l’obligation d'information qui incombe au prêteur, en précisant qu’il résulte de l’article L.111-1 du Code la consommation que tout professionnel doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du service.
Cette obligation informative a encore été rappelée par les chambres civile et commerciale de la Cour de cassation, les 12 janvier et 14 décembre 2016, lesquelles ont précisé que la sanction de l'annulation de la stipulation d'intérêts assortissant le crédit est fondée sur l’absence de consentement de l’emprunteur au coût global du prêt (Cour de Cassation, Chambre commerciale, 12 janvier 2016, n° 14-15203 – Publié au bulletin ; Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 décembre 2016, n° 15-26.306 – Publié au bulletin).
Il en ressort qu'en matière de contentieux mettant en cause l'usage d'un diviseur 360, la Haute Cour a toujours raisonné sur les fondements du droit des obligations, en sanctionnant l'absence de rencontre des volontés. Votre article n'évoque à aucun moment une telle problématique.
Il ne s'agit donc pas de savoir si les calculs sont prétendument équivalents, mais de vérifier, pour le juge, si l'emprunteur avait bien conscience de ce qu'on lui demandait de signer et s'il avait effectivement donné son plein et entier accord en toute connaissance de cause, notamment lorsque le taux conventionnel de l'offre n'est pas celui du contrat puisqu'une année de 360 jours aura été appliquée s'agissant du calcul des échéances brisées.
Si les Avocats d'emprunteurs adoptaient la position inchangée depuis 1995 de la Cour de cassation, je ne pense pas que le « contentieux de masse viendrait à cesser », ainsi que vous le laissez supposer.
Bien qu'il y aurait beaucoup à dire, je ne m'étendrai pas sur l'aspect non écrit de la clause abusive prévoyant un calcul d'intérêts selon un ratio 30/360 ou 30,41666/365, à tout le moins s'agissant des calculs journaliers de l'intérêt dans le cadre des échéances brisées, nécessairement calculées en jours exacts rapportés à l'année civile (365 ou 366 jours). En pareil cas, la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels ne pourra qu'être prononcée, l'intérêt légal venant dès lors se substituer à l'intérêt contractuel prévu.
À ce propos, il sera utile de relire l'analyse de Gérard BIARDEAUD dans une publication parue au Recueil Dalloz - n° 13 du 11 avril 2019 - page 711.
Il faut savoir que l'auteur est magistrat, ayant exercé comme enseignant à l'École nationale de la magistrature (ENM), et auteur de plusieurs ouvrages, dont « Les calculs financiers du juriste » (Éditions Berger-Levrault). Il avait auparavant travaillé au Ministère des finances de 1976 à 1991, avant d'être juge d’instance à Guéret, puis juge d’instruction à Limoges, vice-président au tribunal de Tulle et vice-président placé à la cour d’appel de Limoges. On peut donc penser qu'il sait de quoi il parle...
Pour Gérard BIARDEAUD, il convient de considérer que la clause lombarde et le taux conventionnel indiqué forment un tout indivisible, de sorte que le non-écrit de l'une valait aussi pour l'autre, et affecterait le prêt en son entier, sans qu'il y ait à distinguer entre les échéances brisées (seules indûment majorées par le calcul lombard des intérêts intercalaires) et les suivantes.
VOIR MON POST DU 29 JUILLET à ce sujet.
Publication du 29 juillet
Ce n'est pas juste un avocat de banque, c'est un ancien directeur juridique de la BPCE.
Surement un de ceux qui validé la mise en place d'une habile faute lucrative....
El crapo