Dans un marché de la banque pro en plein essor, l'écart se creuse entre banques traditionnelles et néobanques, révèle l'agence de notation D-Rating.

Le nombre de comptes pros en France a explosé au cours des derniers mois. Fin octobre 2021, D-Rating l'évaluait ainsi à plus de 6,6 millions. Les groupes BPCE et Crédit Mutuel caracolent pour l'instant en tête du classement, avec tous deux 1,65 million de comptes pros à leur actif.

Le marché évolue toutefois rapidement. L'arrivée de nouveaux acteurs tels que Shine, Prisméa ou Blank a permis d'étendre les progrès du digital banking à la sphère professionnelle. A elle seule, la néobanque Qonto comptabilise ainsi 200 000 comptes depuis sa création, en 2016.

Il faut dire que la période est propice pour les challengers, avec notamment une flambée du nombre de nouveaux clients potentiels. Sur la seule année 2020, la France enregistre ainsi près de 1 million de créations d'entreprises, pour la plupart sous le statut de micro-entreprise. Un chiffre record, en hausse de 31% sur 1 an.

La loi PACTE, en vigueur depuis 2019, donne également un cadre juridique favorable au développement du marché de la banque pro. Elle oblige les indépendants à ouvrir un compte bancaire spécifiquement dédié à leur activité professionnelle dès lors que leur chiffre d'affaires dépasse 10 000 euros par an pendant deux ans.

Les banques en retard

Quant à savoir comment les acteurs vont se partager le marché... D-Rating pointe pour l'instant un retard important des banques traditionnelles sur les nouveaux acteurs. « L'écart est similaire à ce que l'on pouvait observer dans la banque de détail il y a quelques années », observe Sylvain Deniau, responsable des études chez D-Rating.

L'agence de notation a comparé les performances digitales des acteurs du marché pro sur près de 350 critères. Et le résultat est sans appel. Les néobanques Qonto, Shine et Blank raflent par exemple les 3 premières places sur l'ouverture de compte. Par contraste, La Banque Postale est la seule banque de réseau à proposer un parcours digital complet jusqu'à l'ouverture effective du compte. Pour les autres acteurs, impossible d'ouvrir un compte pro sans vous rendre dans une agence.

Les banques s'en sortent mieux sur la question des canaux de contact. C'est d'ailleurs Hello bank !, une banque digitale de première génération, qui prend la tête de ce classement. Mais c'est sur le sujet des offres et fonctionnalités disponibles via les canaux digitaux que l'écart se creuse. Si Boursorama Banque s'octroie la première place du classement sur les fonctionnalités bancaires classiques, les néobanques règnent en effet sans partage sur le terrain du beyond banking (gestion des factures, aide à la création d'entreprise, notes de frais...).

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Selon les cas, ces services extra-bancaires sont développés en interne ou par le biais de partenariats avec d'autres acteurs innovants. La néobanque Anytime travaille par exemple avec Smile&Pay et SumUp pour proposer à sa clientèle un terminal de paiement électronique.

Pour Sylvain Deniau, « Les banques traditionnelles ont encore tendance à se concentrer sur les services bancaires à proprement parler. Les néobanques adoptent, quant à elles, une approche plus transversale et centrée sur le besoin de l'utilisateur ».

Un constat qu'il convient toutefois de nuancer, car si la victoire des acteurs digitaux est indéniable côté application mobile, le match s'avère plus serré côté web. Forte de l'expertise de sa banque en ligne Hello bank !, l'enseigne BNP Paribas rivalise par exemple avec les néobanques en termes de nombre de fonctionnalités proposées via l'espace client web.

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Indépendants vs Entreprises

Alors, les néobanques sont-elles les grandes gagnantes du classement ? Oui, mais peut-être pas pour longtemps. « Compte tenu des enjeux croissants attachés à ce segment de clientèle, cette nouvelle concurrence devrait stimuler les acteurs historiques dans la mise à niveau de leur performance numérique », conclut D-Rating.

D'autant que plusieurs de ces nouveaux acteurs entretiennent en réalité des liens étroits avec les banques traditionnelles. Shine a par exemple rejoint le giron de Société Générale l'an dernier. Blank, quant à elle, sort tout droit de La Fabrique by CA, le startup studio du groupe Crédit Agricole.

« Au vu des évolutions actuelles, on pourrait imaginer une segmentation de l'offre des banques traditionnelles sur leurs différentes marques avec d'une part leurs marques digitales orientées sur les indépendants, professions libérales, commerçants, micro-entrepreneurs ou TPE, et d'autres part leurs marques historiques - qui vont progressivement enrichir leur proposition digitale - orientées vers les acteurs de plus grosses tailles qui ont besoin d'un accompagnement plus poussé et d'un conseiller dédié », estime Sylvain Deniau.

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