Le Parlement a définitivement adopté lundi un projet de loi censé réguler l'activité bancaire et financière, quelques semaines avant le sommet de Séoul (11-12 novembre) et le début de la présidence française du G20 pour un an.

Le gouvernement a dû s'y reprendre à deux reprises pour faire voter à main levée par l'Assemblée ce texte sans qu'il soit modifié par rapport à la version adoptée au Sénat le 1er octobre.

En effet, dans un premier temps, un amendement anti-paradis fiscaux a été adopté, contre l'avis de la ministre de l'Economie Christine Lagarde et du rapporteur Jérôme Chartier (UMP). Présenté par l'opposition, soutenu par le villepiniste Daniel Guarrigue et Nicolas Perruchot (Nouveau centre), cet amendement voulait interdire « la commercialisation de produits financiers par des entités (banques) enregistrées dans des paradis fiscaux ».

« Le gouvernement est défavorable, non pas parce qu'il est contre la lutte contre les paradis fiscaux mais parce qu'il faut une réglementation harmonisée au niveau européen », a détaillé Mme Lagarde.

Moment d'inattention dans la majorité ? Malgré l'intervention de la ministre, l'amendement a été voté, alors que ses détracteurs étaient de l'avis général plus nombreux (huit, contre sept défenseurs de l'amendement).

Adopté à main levée

En fin d'examen, Mme Lagarde a obtenu une deuxième délibération pour revenir sur l'amendement, conformément au règlement de l'Assemblée. Le texte a alors été adopté sans changement, à main levée, en présence de 19 députés.

L'opposition a dénoncé un texte qui comprend « des mesurettes » et « ne va pas assez loin », pour Christian Eckert (PS). « Avec cette loi de régulation, notre pays pourra tourner le dos à la finance dérégulée, et se présenter la tête haute à Séoul » puis lors de la présidence française du G20, a souligné Mme Lagarde.

« Pour la première fois la loi vient réguler les marchés dérivés. L'Autorité des marchés financiers (AMF) pourra sanctionner les abus de marché, les manipulation de cours sur les marchés dérivés et les Credit default swaps (CDS) » (produits financiers dérivés, ndlr), a-t-elle ajouté.

Autre mesure: l'AMF enregistrera, surveillera et, au besoin, sanctionnera les agences de notation, si elles commettent des erreurs en évaluant la dette des entreprises ou des Etats. La loi va aussi introduire en droit français la régulation du marché des quotas de CO2, selon un ajout du Sénat.

« N'avez-vous pas un certain sentiment de culpabilité dans la mesure où les autorités de contrôle avaient loupé le contrôle sur la Société générale? », a demandé M. Eckert à la ministre, en revenant sur l'affaire Kerviel.

La gauche a aussi demandé la séparation des activités bancaires d'investissement et de dépôts. « Il n'est pas normal que les banques de dépôts exercent des activités de spéculation avec l'argent de leurs déposants. Il convient qu'elles se consacrent au financement de l'économie réelle. Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont engagé une réflexion en la matière », selon les auteurs de l'amendement - qui a été rejeté.

La loi prévoit enfin la création « d'obligations à l'habitat », c'est-à-dire de titres émis par les banques pour refinancer plus facilement les prêts immobiliers qu'elles accordent aux particuliers. L'opposition PS a demandé en vain la suppression de cette mesure, voyant dans ce nouveau produit financier « une nouvelle forme de titrisation ».