Le gouvernement français a exprimé jeudi quelques réserves, et les banques leur opposition, aux propositions de la Commission européenne visant à créer une taxe bancaire pour financer des fonds nationaux.

La Commission européenne, par la voix de Michel Barnier, commissaire chargé du marché intérieur, a proposé d'instaurer un « réseau européen de fonds de résolution des défaillances bancaires » financé par une taxe prélevée sur les revenus des banques. Le montant de cette taxe n'a pas encore été précisé. Toutefois, la contribution de chaque banque pourrait être proportionnelle à la « toxicité » de ses activités. « [Les contribuables] ne doivent plus se trouver en première ligne. Je crois au principe du pollueur-payeur » a ainsi expliqué Michel Barnier.

Divergence sur l'affectation de la taxe

En France, les réactions au projet sont contrastées. Le ministère de l'Economie s'est dit « très satisfait » des propositions de Bruxelles sur le principe du « pollueur-payeur », selon l'entourage de la ministre Christine Lagarde, interrogé par l'AFP. Mais la France a également rappelé son désaccord sur l'affectation des sommes, qui reste un « point de divergence », selon cette source. Christine Lagarde a depuis longtemps fait savoir qu'elle préférait que les recettes d'une telle taxe bancaire soient affectées directement au budget de l'Etat « pour renflouer les finances publiques » mises à mal par la crise financière, tandis que Bruxelles a d'ores et déjà annoncé qu'elle n'aurait pas vocation à alimenter le budget des Etats.

Christian Noyer, de son côté, a appelé à une certaine vigilance. « Est-ce qu'il faut un deuxième niveau de fonds qui seraient financés par une taxe ? C'est au gouvernement de le décider. Mais ce qu'il faudra bien faire, c'est le calcul total de ce qu'on demande aux banques à la fois dans leur bilan et éventuellement dans une taxe en sus », a souligné le gouverneur de la Banque de France. « Parce qu'au total, ce sont des prélèvements qui peuvent être répercutés sur le coût du crédit, et donc répercutés négativement sur la croissance. Donc il faut faire très attention à trouver le juste équilibre de toutes ces mesures ! »

Répercussion sur le coût du crédit ?

L'argument est repris par les banques françaises, dont l'opposition à une taxe bancaire à l'échelle européenne reste inébranlable. « La position de la Fédération bancaire française n'a pas évolué depuis avril dernier, la taxe n'est pas une priorité aujourd'hui », a-t-on déclaré jeudi à la FBF, où l'on précise qu'il faudrait mettre plutôt l'accent sur la régulation. Au Crédit Agricole, on indiquait jeudi redouter tout ce qui dans les circonstances actuelles affaiblirait le financement de l'économie.

Si les banques étaient taxées, elles repercuteraient le coût de cette taxe sur le coût du crédit, cela aurait un effet négatif sur la croissance, ce qui augmenterait le chômage, soulignait de son côté un banquier central européen, sous couvert d'anonymat.