crapoduc
Contributeur régulier
Voilà des juges bien pédagogues... un vrai cours sur la “clause lombarde“ !
(Tribunal de grande instance de Metz, 21 février 2019, n° 2017/471)
Un passage de la décision est particulièrement à relever car il souligne ce que j'essaie de partager avec vous sur ce Forum, à savoir la transparence d'un contrat d'adhésion et la rencontre des volontés au moment de la formation du contrat lorsque l'emprunteur profane signe son contrat de prêt.
« Que la banque ne peut s’appuyer sur l’équivalence d’un calcul qui n’a pas été porté à la connaissance de l’emprunteur alors que l’absence d’incidence sur l’exactitude du taux n’est pas de nature à pallier l’inobservation de la règle impérative relative à la prohibition de l’année lombarde ;
Attendu qu’il y a lieu de relever encore que la banque, qui est un professionnel et qui rédige le contrat d’adhésion qu’elle soumet à la signature de l’emprunteur, doit assurer une parfaite cohérence et transparence entre ce qu’elle écrit et ce qu’elle fait au sujet du calcul de l’intérêt conventionnel ;
Qu’elle ne saurait donc, comme cela a déjà été relevé, se prévaloir du calcul qu’elle a appliqué à l’insu de l’emprunteur auquel elle fait signer le contrat qu’elle a émis, lui interdisant de connaître la réalité du calcul opéré avec ses conséquences sur le montant des intérêts exactement perçus par la banque. »
Pour tous ces motifs, la banque est sanctionnée.
Normalement, les juges auraient dû prononcer la nullité relative du contrat sur les fondements du droit des obligations, c'est-à-dire annuler purement et simplement la clause de stipulation de l'intérêt conventionnel.
Au lieu de cela, ils ordonnent la déchéance du droit aux intérêts de la banque, en la limitant au montant des intérêts au taux légal.
Mais il y a une explication à cette décision pas tout à fait “conforme“ : les emprunteurs, par extraordinaire, ne demandaient que la seule déchéance, et n'ont jamais visé la nullité dans leur action, tout en évoquant l'article 1907 du Code civil (j'ai du mal à comprendre la stratégie de l'Avocat concernant ce dossier, alors qu'il est connu pour intervenir régulièrement et avec succès dans des contentieux “dit lombard“).
Le Tribunal, comme le Code de procédure le lui impose, n'a statué que sur ce qui lui était demandé.
Au passage, et pour répondre aux interrogations de Crapoduc, les juges ont décidé que le taux légal ne subirait pas les variations de la loi :
« Qu’il y a donc lieu d’ordonner la substitution au taux conventionnel de 2,950% pour le PRET PRIVILEGE N°05683091 du taux légal en vigueur au jour de l’acceptation du prêt soit en 2014 celui de 0,04%, et ce, sans révision en fonction de l’évolution du taux légal. »
Moralité : avec un taux de 0,04 %, l'emprunteur a bénéficié d'un crédit quasi gratuit pendant toute la durée de son prêt.
C'est limpide. Chose pas fréquente, article 700 et execution provisoire