Selon un rapport de la Cour des comptes, les relations entre fisc et contribuable français ont grandement bénéficié du passage au début des années 2000 à une gestion fiscale centrée sur l'usager, avec un retard de dix ans sur nombre de pays, mais d'importants progrès restent à faire.

« Rechercher l'adhésion de la majorité des contribuables permet mieux que les moyens répressifs, d'optimiser le rendement de l'impôt », explique la Cour des comptes dans un rapport consacré aux « relations de la Direction générale des Finances publiques avec les contribuables ».

A la fin des années 1990 prévalait encore en France la vision traditionnelle d'une gestion fiscale centrée sur les besoins de l'administration et le mot d'usager rencontrait il y a seulement dix ans encore des réticences parmi les agents du fisc, « nourris d'une culture régalienne », fait remarquer la juridiction. Mais depuis la fin des années 1980, le point de vue des acteurs extérieurs occupait déjà dans de nombreux pays développés une position centrale.

L'accueil téléphonique, un « point noir »

Une offre de services de plus en plus étendue : téléphone, guichet sur internet, accueil physique, courriel, courrier, télépaiement, mensualisation, etc, a entraîné des « progrès remarquables dans les relations avec le contribuable », se félicite la Cour, ajoutant néanmoins « des marges de progrès importantes existent ».

Elle énumère alors nombre de manquements dont l'accueil téléphonique, qualifié de « point noir » « à repenser dans son ensemble », mode de contact le plus critiqué par les usagers et l'administration. Quant au guichet unique pour la détermination de l'assiette et le recouvrement de l'impôt, il souffre en ce qui concerne les PME d'un manque d'information sur la satisfaction de ces entreprises.

Les agents n'aiment pas le mail

Pour les particuliers, on note de « fortes disparités dans la qualité de service » et des applications informatiques ne permettant pas au rapprochement des différentes fonctions en un seul guichet de « produire ses pleins effets » malgré des « personnels bien formés ». La messageries électronique est le mode de contact qui se développe le plus, le courrier traditionnel ne présentant « plus la fiabilité qu'il avait autrefois ». Néanmoins « l'administration ne s'est pas encore organisée pour traiter efficacement les courriels ». En outre, les agents redoutent les dérives qu'autorise la facilité de communication (effet de conversation à répétition, dite « chat », manque de rigueur...).

Concernant le site impots.gouv.fr, la Cour reproche des plateformes « trop souvent saturées » et estime que la direction générale des Finances publiques, DGFIP « devrait assortir chaque usage d'une procédure électronique d'un test de satisfaction ».

Les moyens de paiement automatiques (mensualisation, prélèvement automatique à l'échéance, paiement en ligne) ont représenté en 2010 87% des montants payés de l'impôt sur le revenu (IR) mais seulement 53,9% de l'ensemble IR et impôts locaux.

Des instructions fiscales trop tardives

Les contribuables doivent être « informés, rassurés, écoutés » face à « l'instabilité du droit fiscal », née de multiples réformes parfois supprimées, estime le rapport. Ces incertitudes sur l'entrée en vigueur et la pérennité des normes fiscales « pèsent sur la compétitivité et l'attractivité de la France dans une économie mondialisée » met plus largement en garde la juridiction.

Si la mise en ligne depuis une date récente de projets d'instructions fiscales est très appréciée des entreprises, « les délais se révèlent souvent trop courts au point que certaines réformes entrent en vigueur sans que les termes des instructions correspondantes soient connus en temps utile », assène le rapport. La Cour des comptes recommande par ailleurs à l'administration de dépasser « la conception binaire opposant le bon citoyen au fraudeur » pour appliquer une analyse plus fine et d'accepter aussi que « les usagers deviennent les acteurs de sa propre transformation ».