Une nouvelle manière d'apprécier le litige lombard : la Cour d'appel de Paris excelle à trouver des parades pour ne pas prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts
(Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 4 septembre 2019, n° 17/08390)
Voilà un arrêt bien documenté, où les arguments de l'emprunteur sont repris jusque dans les plus petits détails par la Cour. L'avocat de l'emprunteur, Maître Julien S. (avocat à Lille) sait de quoi il parle, étant du reste à l'origine de quelques décisions retentissantes de la Cour d'appel de Douai. Je connais personnellement son expert, et je sais qu'il est pointilleux et professionnel. Je suppose donc, et cela n'engage que moi, que le dossier de l'emprunteur était “bien ficelé“, comme on dit dans le langage courant, ou en d'autres termes, que l'emprunteur avait mis toutes les chances de son côté pour convaincre les magistrats du bien fondé de son action en nullité.
Ainsi, alors que l'emprunteur arrive à démontrer l'usage du diviseur 360 proscrit sur la première échéance de son prêt (dite échéance brisé), la Cour adopte un raisonnement qui me laisse pantois, d'autant qu'il ne repose sur aucun fondement juridique (du reste, les magistrats ne nous disent pas lequel) :
« Considérant que la notion d’intérêt journalier utilisée par monsieur X pour calculer le montant des intérêts de l’échéance dite brisée (et des autres), par l’application d’une formule incluant une base de 365 jours ou de 360 jours, afin de chercher à démontrer que ces intérêts conventionnels auraient été ou non calculés sur la base d’une année civile dans le premier cas ou lombarde dans le second, n’a pas d’existence légale au regard du principe de l’égalité des mois posé par le législateur, principe d’application générale ; qu’il s’ensuit que le calcul proposé par monsieur X n’est pas probant ;
Qu’au surplus, à la supposer démontrée, l’erreur sur le montant des intérêts de la première échéance et partant leur sur-facturation, ne serait susceptible que de s’analyser en une mauvaise exécution du contrat, et ne pourrait donner lieu qu’à la restitution de la part d’intérêts trop versés, non demandée en l’espèce ;
Qu’ainsi monsieur et madame A B seront déboutés de leurs prétentions. »
En deux mots, à suivre une telle décision, il ne serait plus possible d'argumenter que la banque a utilisé une mauvaise méthode de calcul pour les échéances brisées (mois incomplets), sans le consentement de l'emprunteur, dans le cadre d'un contrat où les volontés n'ont pas pu se rencontrer.
Si quelqu'un pouvait nous expliquer ce qu'a voulu dire la Cour : « ... n’a pas d’existence légale au regard du principe de l’égalité des mois posé par le législateur. » ???