Arrêt de la Cour d'appel de Besançon, le 30 avril 2019, n° 17/01235 :
trois points importants abordés par les Magistrats
Cette décision, qui est favorable aux emprunteurs, a examiné trois aspects du litige lombard qui sont souvent débattus :
1) La banque argumentait sur le fait que la notion de mois normalisé visée à l’annexe de l’article R.313-1 ancien du Code de la consommation concerne le TAEG des prêts à la consommation, mais qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne l’interdit pour les prêts immobiliers, la jurisprudence approuvant cet usage pour les prêts immobiliers remboursables par mensualités.
Cependant, ce point de vue a été balayé par les Magistrats, à juste titre : « il ne résulte nullement des dispositions de l’article R.313-1 ancien du code de la consommation que le recours au mois normalisé soit licite en matière de calcul des intérêts conventionnels, et la Cour de cassation ne s’est, par ailleurs, pas prononcée directement sur la question de l’incidence du mois normalisé sur ce calcul, son arrêt du 15 juin 2016 (Cass. civ. 1re, 15 janvier 2016, pourvoi n°15-16.498) n’étant relatif qu’à l’incidence du mois normalisé sur le calcul du TEG. »
2) Le contrat de prêt contenant une clause précisant que les intérêts intercalaires étaient calculés sur la base d'une année bancaire de 360 au lieu d'une année de 365 jours, les Magistrats ont considéré que cette clause se trouvait donc frappée de nullité, « peu important que la banque poursuivante soutienne l’absence de surcoût d’intérêts ou l’équivalence des calculs au motif que les intérêts contractuels sont dans les deux cas, 360 ou 365 jours, calculés sur une base de 1/12e. »
La sanction a donc été prononcée : « emportant substitution du taux d’intérêt légal à l’intérêt conventionnel depuis le début de chacun des prêts et pour les échéances à venir jusqu’à la fin des prêts, sans qu’il y ait matière à s’arrêter sur la stipulation du TEG. »
Ce qui est intéressant, c'est que les Magistrats ont souligné les contradictions de point de vue entre les deux Chambres de la Cour d'appel de Paris, ce qui n'est pas rassurant en matière de sécurité juridique pour les justiciables que nous sommes qui attendons naturellement que, dans une même juridiction, il soit statué de la même manière.
3) Néanmoins, il convient de relever que ces Magistrats de Besançon, malgré une bonne analyse de la “problématique lombarde“, n'ont pas bien compris la différence qui existe entre les règles qui gouvernent le taux contractuel et celles concernant le TEG.
En effet, voici ce qu'ils écrivent : « ce qui conduit à une majoration des intérêts versés par M. X de 6,61 euros au total pour les deux prêts, de sorte que l’incidence de cette clause litigieuse sur l’expression des taux d’intérêt est inférieure au seuil de précision réglementaire de 0,1 %. »
Il va de soi qu'aucun “texte réglementaire“ n'autorise le moindre écart dans la fixation du taux conventionnel, nous ne sommes pas sur un calcul de TEG.
Pour cela, je vous joins à nouveau l'excellente publication du non moins excellent Maître MANOUKIAN, qui traite précisément de l’autonomie de l’année lombarde par rapport au TEG.
Au passage, je me permets de répondre au dernier post d'agra07 (« On a vu des décisions de justice, à mon humble avis aberrantes, qui condamnaient les banques pour une erreur infime mais je ne connais pas de décision ayant condamné une banque pour une erreur profitable à l'emprunteur. La notion de préjudice ne peut être ignorée totalement. »).
Désolé mon cher agra, mais cette décision condamne la banque à 20 833,30 euros pour une erreur de 6,61 euros !
C'est ainsi, il y a des lois, et celles-ci doivent être respectées. Les textes nous disent que les intérêts d'un prêts doivent être calculés sur l'année civile, et pas autrement. Le prêteur qui ne le fait pas contourne donc la loi, et se trouve sanctionné.
Dura Lex, sed Lex.