Tomas466
Contributeur régulier
On voit souvent apparaître dans les discussions le fait d'être (ou d'avoir été jusqu'à présent) un "bon client" d'une banque de détail, en particulier lorsqu'il faut tenter une négociation pour tel ou tel produit. C'est la vision que le client a : je suis chez eux depuis X années, je n'ai jamais eu de découvert, j'ai un livret A correctement rempli, j'ai un prêt que je rembourse rubis sur l'ongle, etc. Mais est-ce que cette notion de "bonne clientèle" est la même si on prend le point de vue de la banque ?
Sauf rares exceptions, une banque est un établissement privé comme bon nombre d'autres entreprises. Son but est le profit. A la fin de l'année comptable, elle doit pouvoir tirer de son bilan un résultat net qu'elle redistribuera à ses actionnaires/sociétaires sous forme de dividendes, ou qu'elle reportera dans ses comptes pour l'année suivante. Pour elle, un "bon client" est donc quelqu'un de rentable, ou en tout cas de plus rentable que la moyenne. Un tel client génère ainsi, d'une façon ou d'une autre, un montant plus important de revenu bancaire que la moyenne, et on doit aussi pouvoir dire sans se tromper que c'est celui qui génère auprès de la banque le moins de coûts possibles.
On trouve facilement dans la littérature que l'essentiel des revenus d'une banque de détail provient de deux sources : l'activité de crédit et les commissions bancaires. L'activité de crédit consiste, pour la banque, à obtenir de l'argent à un certain prix puis à le prêter à un prix supérieur. C'est donc la différence entre taux d'intérêt qui va assurer ses bénéfices : si une banque obtient des liquidités à 1% et qu'elle les prête à 3%, elle génère 2% de marge, hors charges diverses. Le risque, bien évidemment, est que celui à qui elle prête ne rembourse pas, ou pas tout ; elle cherchera donc à minimiser la prise de risque. Côté commissions, c'est presque plus simple, puisque cela consiste à placer des frais sur tous les autres services qu'elle peut rendre, à l'acte ou à la période (mois, année, etc.), de façon à être rentable une fois les coûts déduits (personnel, locaux, systèmes, etc.).
Donc c'est quoi être un bon client d'une banque de détail, concrètement ? De mes lectures diverses et de ma compréhension basique du système bancaire, j'en tire ceci :
- s'il n'est pas fournisseur de liquidités, c'est quelqu'un qui détient un ou plusieurs crédits, et qui les rembourse avec le minimum de défaut. Une fois accordé, le crédit bancaire assure un produit régulier à la banque, sur un nombre d'années important, et toute entreprise apprécie de pouvoir sécuriser ses rentrées d'argent à l'avance. La structure d'un échéancier est faite pour minimiser les risques, puisqu'un client rembourse majoritairement les intérêts les premières années (celles où sa situation et sa solvabilité vont a priori le moins changer). On y adjoint diverses assurances, divers produits complémentaires et d'autres exigences (comme domicilier ses revenus dans le même établissement par exemple) qui vont encore, en moyenne, augmenter la rentabilité.
- s'il est fournisseur de liquidités, c'est quelqu'un qui ne favorise pas le livret A pour les conserver. En effet, la banque a l'obligation de reverser les deux tiers de l'encours du livret A à la CDC, ce qui diminue mécaniquement la réutilisation possible de l'encours ; d'autre part, le livret A ne génère aucune commission pour la banque puisque sa gestion est entièrement gratuite pour le client. A montant égal, une banque préfèrera donc que le client place ses liquidités sur des produits maison qui génèrent des commissions régulières (d'entrée, de gestion, de garde, d'arbitrage, de sortie), ou à défaut, sur des placements peu rémunérateurs pour le client, et donc peu coûteux pour la banque.
- dans tous les cas, c'est quelqu'un qui paye beaucoup par carte bancaire (déjà près d'une transaction sur deux en France selon la FBF !). La banque prélève une commission sur le montant effectivement payé au commerçant : elle gagne donc de l'argent à chaque transaction. Elle a tout intérêt à ce que le client domicilie ses revenus chez elle afin qu'ensuite les dépenses courantes ou ponctuelles soient réalisées par CB. On comprend mieux les obligations de certaines banques en ligne.
- c'est quelqu'un qui n'a pas trop recours aux espèces. La gestion des pièces et des billets coûte du temps et de l'argent. Même si l'activité est de plus en plus sous-traitée et mécanisée (automates de dépôt, de retrait ou de change de monnaie, etc.), il faut compter, trier, vérifier, livrer, alimenter, commander des coupures spécifiques, etc. Ca ne rapporte rien à la banque et ça coûte en mesures de sécurité.
- c'est quelqu'un qui n'a pas recours aux chèques. La gestion administrative d'un chèque nécessite une organisation assez lourde : impression, envoi, vérifications, archivage, contestations, etc.
- c'est quelqu'un qui retire de l'argent au DAB de son réseau bancaire uniquement. J'imagine assez facilement que lorsqu'on retire de l'argent à un DAB d'un autre réseau bancaire, ce dernier facture une commission à la banque du client. D'ailleurs les réseaux se mettent de plus en plus à les refacturer au client au bout d'un certain nombre de retraits par mois, et les plafonds de retraits autorisés sont en baisse régulière depuis quelques années.
- c'est quelqu'un qui ne contacte pas trop souvent sa banque pour des virements, des prélèvements, des questions précises ou des litiges. Là aussi, tout contact de ce genre nécessite du personnel, des procédures, du temps, des réponses à des courriers, des études de dossiers. Pour les virements et la gestion des prélèvements, on lui proposera de les réaliser en ligne. C'est aussi quelqu'un de plutôt stable dans le temps : un client zappeur ou qui regarde ailleurs va inévitablement se poser des questions, fermer des comptes, retirer tout ou partie de ses liquidités, et donc entraîner une administration importante (envois de courrier, appels à la plateforme, etc.).
- c'est quelqu'un qui paye de temps en temps voire régulièrement des commissions diverses ou des agios. Sans aller jusqu'à un comportement excessif (et donc devenant risqué pour la banque), le fait de se servir d'un découvert autorisé permet à la banque de marger de façon conséquente puisqu'il s'agit de fait d'un micro crédit à un taux élevé, et qu'elle peut aller jusqu'à facturer des commissions d'intervention si le découvert dépasse le plafond autorisé. Ces commissions généraient 2 à 3 milliards d'euros en moyenne par an de revenu global tout secteur confondu avant la dernière réforme.
Qu'en pensez-vous ? Voyez-vous autre chose ?
Sauf rares exceptions, une banque est un établissement privé comme bon nombre d'autres entreprises. Son but est le profit. A la fin de l'année comptable, elle doit pouvoir tirer de son bilan un résultat net qu'elle redistribuera à ses actionnaires/sociétaires sous forme de dividendes, ou qu'elle reportera dans ses comptes pour l'année suivante. Pour elle, un "bon client" est donc quelqu'un de rentable, ou en tout cas de plus rentable que la moyenne. Un tel client génère ainsi, d'une façon ou d'une autre, un montant plus important de revenu bancaire que la moyenne, et on doit aussi pouvoir dire sans se tromper que c'est celui qui génère auprès de la banque le moins de coûts possibles.
On trouve facilement dans la littérature que l'essentiel des revenus d'une banque de détail provient de deux sources : l'activité de crédit et les commissions bancaires. L'activité de crédit consiste, pour la banque, à obtenir de l'argent à un certain prix puis à le prêter à un prix supérieur. C'est donc la différence entre taux d'intérêt qui va assurer ses bénéfices : si une banque obtient des liquidités à 1% et qu'elle les prête à 3%, elle génère 2% de marge, hors charges diverses. Le risque, bien évidemment, est que celui à qui elle prête ne rembourse pas, ou pas tout ; elle cherchera donc à minimiser la prise de risque. Côté commissions, c'est presque plus simple, puisque cela consiste à placer des frais sur tous les autres services qu'elle peut rendre, à l'acte ou à la période (mois, année, etc.), de façon à être rentable une fois les coûts déduits (personnel, locaux, systèmes, etc.).
Donc c'est quoi être un bon client d'une banque de détail, concrètement ? De mes lectures diverses et de ma compréhension basique du système bancaire, j'en tire ceci :
- s'il n'est pas fournisseur de liquidités, c'est quelqu'un qui détient un ou plusieurs crédits, et qui les rembourse avec le minimum de défaut. Une fois accordé, le crédit bancaire assure un produit régulier à la banque, sur un nombre d'années important, et toute entreprise apprécie de pouvoir sécuriser ses rentrées d'argent à l'avance. La structure d'un échéancier est faite pour minimiser les risques, puisqu'un client rembourse majoritairement les intérêts les premières années (celles où sa situation et sa solvabilité vont a priori le moins changer). On y adjoint diverses assurances, divers produits complémentaires et d'autres exigences (comme domicilier ses revenus dans le même établissement par exemple) qui vont encore, en moyenne, augmenter la rentabilité.
- s'il est fournisseur de liquidités, c'est quelqu'un qui ne favorise pas le livret A pour les conserver. En effet, la banque a l'obligation de reverser les deux tiers de l'encours du livret A à la CDC, ce qui diminue mécaniquement la réutilisation possible de l'encours ; d'autre part, le livret A ne génère aucune commission pour la banque puisque sa gestion est entièrement gratuite pour le client. A montant égal, une banque préfèrera donc que le client place ses liquidités sur des produits maison qui génèrent des commissions régulières (d'entrée, de gestion, de garde, d'arbitrage, de sortie), ou à défaut, sur des placements peu rémunérateurs pour le client, et donc peu coûteux pour la banque.
- dans tous les cas, c'est quelqu'un qui paye beaucoup par carte bancaire (déjà près d'une transaction sur deux en France selon la FBF !). La banque prélève une commission sur le montant effectivement payé au commerçant : elle gagne donc de l'argent à chaque transaction. Elle a tout intérêt à ce que le client domicilie ses revenus chez elle afin qu'ensuite les dépenses courantes ou ponctuelles soient réalisées par CB. On comprend mieux les obligations de certaines banques en ligne.
- c'est quelqu'un qui n'a pas trop recours aux espèces. La gestion des pièces et des billets coûte du temps et de l'argent. Même si l'activité est de plus en plus sous-traitée et mécanisée (automates de dépôt, de retrait ou de change de monnaie, etc.), il faut compter, trier, vérifier, livrer, alimenter, commander des coupures spécifiques, etc. Ca ne rapporte rien à la banque et ça coûte en mesures de sécurité.
- c'est quelqu'un qui n'a pas recours aux chèques. La gestion administrative d'un chèque nécessite une organisation assez lourde : impression, envoi, vérifications, archivage, contestations, etc.
- c'est quelqu'un qui retire de l'argent au DAB de son réseau bancaire uniquement. J'imagine assez facilement que lorsqu'on retire de l'argent à un DAB d'un autre réseau bancaire, ce dernier facture une commission à la banque du client. D'ailleurs les réseaux se mettent de plus en plus à les refacturer au client au bout d'un certain nombre de retraits par mois, et les plafonds de retraits autorisés sont en baisse régulière depuis quelques années.
- c'est quelqu'un qui ne contacte pas trop souvent sa banque pour des virements, des prélèvements, des questions précises ou des litiges. Là aussi, tout contact de ce genre nécessite du personnel, des procédures, du temps, des réponses à des courriers, des études de dossiers. Pour les virements et la gestion des prélèvements, on lui proposera de les réaliser en ligne. C'est aussi quelqu'un de plutôt stable dans le temps : un client zappeur ou qui regarde ailleurs va inévitablement se poser des questions, fermer des comptes, retirer tout ou partie de ses liquidités, et donc entraîner une administration importante (envois de courrier, appels à la plateforme, etc.).
- c'est quelqu'un qui paye de temps en temps voire régulièrement des commissions diverses ou des agios. Sans aller jusqu'à un comportement excessif (et donc devenant risqué pour la banque), le fait de se servir d'un découvert autorisé permet à la banque de marger de façon conséquente puisqu'il s'agit de fait d'un micro crédit à un taux élevé, et qu'elle peut aller jusqu'à facturer des commissions d'intervention si le découvert dépasse le plafond autorisé. Ces commissions généraient 2 à 3 milliards d'euros en moyenne par an de revenu global tout secteur confondu avant la dernière réforme.
Qu'en pensez-vous ? Voyez-vous autre chose ?